L’Association Saint Benoît Labre doit publier ses comptes au J.O., comme toute association bénéficiant de plus de 153 000 euros de subventions publiques. Elle vient de le faire – avec un copieux retard – pour ses comptes de 2018 et 2019. Ils révèlent que les subventions reçues par l’association ont bondi en un an de 25 millions d’euros à 32 millions d’euros (+ 28 %) ! Elles sont versées surtout par le département de Loire-Atlantique.
Le rapport du commissaire aux comptes n’explique pas cette augmentation phénoménale. Le rapport d’activité publié par l’association permet d’en savoir plus. L’association est devenue ces dernières années le principal sous-traitant du département de Loire-Atlantique en matière d’aide aux migrants. Légaux ou non. Longtemps consacrée aux sans-logis et autres personnes en grande difficulté sociale, elle a créé dès 2001 un centre d’accueil pour demandeurs d’asile (CADA). Ce secteur a vite pris une place croissante dans ses activités.
Cette évolution s’est traduite par une professionnalisation accélérée de l’association. Ses activités étaient autrefois assurées par des bénévoles émus par la misère. Elle le sont aujourd’hui par des salariés. Les migrants inspireraient-ils moins de compassion que les blessés de la vie ? L’association a versé en 2019 près de 9,3 millions d’euros à ses 343 salariés (à quoi s’ajoutent près de 3,7 millions de charges sociales), soit un salaire brut moyen un peu supérieur à la moyenne départementale.
Elle affirme compter encore 50 bénévoles mais ses comptes n’enregistrent pas un seul euro de cotisation ! Le travail des bénévoles est valorisé dans les comptes à hauteur de 126 000 euros en 2019. Cela représente l’équivalent de 6,5 personnes à plein temps, soit pas grand chose au regard du travail fourni par les salariés. Et le bénévolat a reculé de 13 % d’une année sur l’autre.
Un afflux de mineurs délinquants
Les mineurs non accompagnés (MNA) représentent une grosse part des activités de l’Association Saint Benoît Labre. En 2019, elle en a pris en charge chaque jour près de 600. Contre 30 en 2012, quand elle a ouvert ce service – et 550 prévus par sa convention avec le département. On pourrait imaginer que sa tâche essentielle est de retrouver leur famille, puisqu’il s’agit en principe d’adolescents fugueurs. Il n’en est rien : elle les prend en charge de A à Z.
Et même au-delà : passé leurs 18 ans, un nombre croissant de MNA bénéficient de « contrats jeunes majeurs ». C’est-à-dire que la collectivité continue à les prendre en charge. « Faute de service dédié à la prise en charge de ce public en Loire Atlantique, un très grand nombre de places du dispositif MNA de notre association reste donc occupé par des majeurs », révèle l’association. Celle-ci s’occupe aussi de près de 800 ménages migrants d’Europe de l’Est – en clair des Roms de Roumanie ou de Bulgarie, qui sont environ 2 500 en Loire-Atlantique.
À quoi s’ajoute un petit cadeau fait par Paris au département breton : « La direction de la Protection Judiciaire de la Jeunesse (DPJJ) nationale transfère 277 MNA sous Ordonnance de Placement Provisoire (OPP) déjà évalués dans un autre département vers la Loire Atlantique », note l’association, qui hérite aussi de ce public difficile de mineurs délinquants.
Photo : manifestation de migrants à Nantes en 2019, Breizh-info, droits réservés.
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