Pour la filiale de la Poste Mavillemonshopping, les confinements à répétition sont une bonne opération. En deux attributions de subventions (200.000 € fin septembre, 100.000 € le 4 décembre) les contribuables nantais viennent de payer 300.000 € à cette plateforme, qui affiche son appartenance au groupe La Poste (en bas, à droite). Un géant qui n’a guère besoin d’être aidé, au contraire du petit commerce.
Depuis le 24 mars, cette plateforme créée en 2017 qui vivotait fait des affaires d’or. En effet, il a été annoncé que « pendant toute la période de confinement, les collectivités n’ont pas à s’acquitter de l’abonnement à la plateforme pour que leurs commerçants puissent s’inscrire et la commission sur les ventes des commerçants sera supprimée et ramenée à 0 ». La plateforme se garde bien de dire ce qu’il en sera, après.
Pendant ce temps, les commerçants font eux-mêmes tout le travail : « Le commerçant ouvre gratuitement un profil en renseignant ses informations sur le site www.mavillemonshopping.fr : sa boutique en ligne est créée instantanément. Il référence ses produits directement dans son espace en ligne sécurisé et dédié : il renseigne le nom du produit, la catégorie des produits, le prix TTC, ajoute une photo s’il le souhaite, et valide. Les produits sont alors mis en ligne et disponibles à la vente ».
Après, « il faudra certainement payer », s’alarme un commerçant baulois. « Ils tablent sur le fait que comme on aura entièrement rentré les données – et c’est un travail de romain ! – on n’ira pas voir ailleurs ». La plateforme s’est aussi appuyée sur un démarchage considérable auprès des collectivités locales, qui ont largement donné suite, y compris des municipalités plutôt hors-système comme Perpignan (RN).
« Pourtant, ce n’est pas comme si c’était efficace », relève un commerçant du quartier des Hauts-Pavés. « L’ergonomie est nase, les clients doivent rentrer toutes leurs données avant d’accéder aux produits, et on a très peu de retours », poursuit-il. A Guérande, pas mieux : « le gars qui fait deux commandes par semaine avec cette plateforme, c’est notre Amazon local », ironise un producteur. « En gros, c’est une par semaine, au mieux ».
Sur la côte, un autre producteur coupe, « quand on voit l’argent public qui est mis dedans, ils auraient été mieux inspirés de le donner aux associations de commerçants pour faire des animations pour Noël et cet hiver ». Avec un chiffre d’affaires en hausse de 25 milliards d’euros en 2019, le groupe La Poste a-t-il besoin d’aide ? Et même s’il est déficitaire d’1.2 milliards d’euros à la suite du 1er semestre 2020, est-ce aux collectivités locales et aux commerçants de lui venir en aide, au risque de sacrifier à la grande tradition française du capitalisme de connivence ? Pourtant, cela finit mal en général, comme en témoignent les déconfitures d’Areva, de l’écotaxe, du Crédit Lyonnais par le passé ou d’EDF maintenant.
Louis-Benoît Greffe
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