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La Chambre régionale des comptes tire à boulets rouges sur le palais des congrès de Saint-Malo

Globalement, Saint-Malo se porte bien. La chambre régionale des comptes vient de publier un rapport d’observations définitives (ROD) portant sur les années 2013 à 2018. Inutile de rappeler tout ce qui s’est passé depuis lors – mais à fin 2018, du moins, les budgets de la ville sont tenus, sa situation financière est « portée par des recettes dynamiques ». Autrement dit, elle collecte de plus en plus d’impôts. Cela risque de ne pas durer. Les dépenses prévues vont augmenter son endettement, « ce qui limitera la capacité de la commune à financer de nouveaux investissements à partir de 2024 ».

Au chapitre des griefs, la Chambre retombe sur un grand classique : la durée annuelle de travail des agents communaux. Elle est réglementée : c’est 1 607 heures par an. Saint-Malo ignore délibérément la règle. Ses agents travaillent entre 1 552 et 1 593 heures par an. Ils bénéficient de deux jours de congé supplémentaires par an (27 au lieu de 27), prévus par aucun texte et autorisés par aucune délibération ! Pour les contribuables, cela représente au bout du compte un surcoût de 722 064 euros pour la seule année 2017.

Hélas, ce régime allégé n’assure pas une meilleure santé aux agents municipaux malouins. Ils sont absents pour motif de santé en moyenne 30,9 jours par an. Contre 26 jours en moyenne dans les communes comparables.

Saint-Malo, mauvais élève

La Chambre doit aussi recopier ses propres recommandations. Lors d’un précédent contrôle, en 2013, elle avait expressément recommandé à Saint-Malo d’élaborer un plan d’entretien de son patrimoine historique, de définir une politique d’utilisation de ce patrimoine et d’encadrer les missions et déplacements des élus par une charge de bonnes pratiques. « Aucune de ces trois recommandations n’a été suivie d’effet », déplore-t-elle.

Saint-Malo devra aussi « élaborer un règlement d’attribution des subventions aux associations ». Ces subventions pèsent lourd dans le budget de la commune : 5,7 millions en 2017. Huit associations accaparent à elles seules 60 % de cette enveloppe. Parmi elles figurent classiquement le centre des œuvres sociales ou l’Académie malouine d’arts plastiques. Mais la plus copieusement subventionnée en 2017 n’est ni le festival Étonnants voyageurs, ni Quai des bulles : c’est Rock Tympans, organisateur de La Route du Rock (que la Chambre vient par ailleurs de contrôler). Elle s’arroge plus de 15 % du total des subventions !

Palais du grand n’importe quoi

Mais le morceau de choix du nouveau ROD, bien entendu, c’est le Palais du Grand large. La Chambre dénonce expressément son « exploitation irrégulière » jusqu’au 30 juin 2019. Là encore elle se recopie : elle avait déjà dénoncé la situation en 2013. La commune avait alors conclu en 2015 une nouvelle convention avec l’association gestionnaire, elle aussi étrillée par la Chambre en 2013.

Saint-Malo n’était pas revenu dans les clous pour autant. Selon la Chambre, « des doutes sérieux existent sur la qualification juridique des conventions signées en 1987 et en 2015 par la commune avec l’association qui ont permis de s’affranchir des obligations de publicité et mise en concurrence, en méconnaissance des dispositions du code des marchés publics et du code général des collectivités territoriales ».

Pendant trente-deux ans, l’association Palais du Grand Large a ainsi géré le centre des congrès sans procédure de publicité et de mise en concurrence. Et sans le moindre risque, au moins dans un premier temps. En effet, la commune s’était engagée en 1987 à garantir son équilibre financier.

Au terme d’une analyse détaillée, la Chambre rejette aussi la convention de 2015. La situation, souligne-t-elle « présente un risque pénal au regard des dispositions de l’article 432-14 du code pénal », qui punit la violation des règles des marchés publics. Sanction prévue : deux ans de prison et 200 000 euros d’amende, quand même… Et la Chambre d’insister : le risque pèse non seulement sur la commune mais aussi sur « les tiers qui auraient pu être favorisés, comme l’association ‘Palais du Grand Large’ et son président, qui dispose d’intérêts dans le secteur de l’hôtellerie, du tourisme et des services à Saint-Malo » – en clair, Serge Raulic, patron des Thermes marins de Saint-Malo et de plusieurs hôtels.

630 000 euros d’indemnités contestables

Le festival ne s’arrête pas là. Construit en 1954, le centre des congrès a fait l’objet de grands travaux à partir de l’automne 2018 (le Palais rénové a été inauguré voici tout juste un an, le 18 novembre 2019). En juin 2017, alors que ces travaux étaient déjà prévus, la commune a prolongé de deux ans sa convention avec l’association Palais du Grand Large. Quand il a fallu fermer boutique, l’association a réclamé à la commune une indemnité de 440 000 euros et la renonciation à 190 000 euros de loyer. Pratiquement sans discussion, Saint-Malo a accepté une transaction sur ces bases. Coût total pour les contribuables malouins : 630 000 euros.

La Chambre taille en pièces cette transaction. Ses dispositions, estime-t-elle « sont constitutives d’une libéralité de la part de la commune de Saint-Malo ». Libéralité, le mot paraît anodin. Il ne l’est pas, car les personnes publiques n’ont pas le droit de consentir des libéralités. Saint-Malo s’est donc derechef mis dans l’illégalité.

Il y a largement de quoi inquiéter Claude Renoult, maire divers droite de Saint-Malo de 2014 à 2020. Il s’est fendu d’une réponse à la Chambre. Ce n’est peut-être pas une bonne idée : il y révèle que la société publique locale qui gère le Palais du Grand Large depuis 2019 a été créée… pour reprendre l’équipe de l’association avec laquelle Saint-Malo a si longtemps entretenu des relations irrégulières.

E.F.

[cc] Palais du Grand Large à Saint-Malo avant rénovation, photo Dinkley, Wikimedia Commons.
[cc] Breizh-info.com, 2020, dépêches libres de copie et de diffusion sous réserve de mention et de lien vers la source d’origine.

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Une réponse à “La Chambre régionale des comptes tire à boulets rouges sur le palais des congrès de Saint-Malo”

  1. FRANCHETTI Patrice dit :

    … Et alors ? Cette Cour ne pouvait-elle pas intervenir AVANT ces dépenses somptuaires qui comme toujours seront supportées par le citoyens cochon de payant, y compris les salaires versés à ces ponctionnaires incapables ?

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