Peu de Français le savent, mais la nuit, il est possible de traverser l’Europe. Du nord au sud, et de mieux en mieux. Mais ce progrès ne s’écrit pas en français. Il s’écrit en suédois, en italien… et surtout en allemand avec les trains de nuit Nightjet de l’opérateur autrichien ÖBB.
Depuis fin 2016 et le rachat de City Night Line, la filiale nocturne déficitaire de la Deutschbahn, c’est l’opérateur autrichien qui a fait redécouvrir le train de nuit à un nombre croissant d’européens. L’artère centrale du réseau, Zurich – Hambourg (700 km), ne passe pas par l’Autriche, et les deux hubs principaux sont Zurich et Hambourg. Les lignes s’étendent maintenant de Hambourg à Rome, et de Bâle jusqu’à Vienne.
Ces trains ont été rentables dès la première année, du fait de l’alliance de l’économie (liaisons est-ouest supprimées, pas de restaurant à bord), de prix attirants (29€ pour un siège incliné, 49€ pour une couchette – à comparer avec les 75€ de la SNCF pour un siège ou une couchette sur Toulouse – Paris, 680 km, épine dorsale des reliquats du réseau français de nuit), et de services (voitures rénovées, douche dans les compartiments luxe à 139€). En tout, 27 destinations sont couvertes la nuit.
Le succès a entraîné une hausse des investissements : aux 160 voitures anciennes se sont ajoutées dès 2018 13 rames Nightjet de 7 voitures, qui devront être livrées en 2022 pour les lignes vers l’Italie, et encore 20 rames Nightjet en 2020 de 7 voitures ; ces rames de 160 places couchées et 100 places assises sont toutes construites chez Siemens à Vienne, favorisant l’emploi autrichien.
En 2024, la nuit de Barcelone à Prague via la Suisse ?
ÖBB ne manque pas de projets : après avoir lancé les trains Bruxelles – Munich – Innsbruck et Bruxelles – Linz – Vienne en janvier dernier, l’opérateur s’est lancé vers Cracovie en Pologne (via Graz) et Satu Mare en Roumanie via Debrecen (Hongrie). Il existe aussi une ligne entre Vienne et Kosice (Slovaquie), Vienne et Varsovie (Pologne), Munich – Rijeka en Croatie, et évidemment entre l’Autriche ou l’Allemagne et Rome, Venise, Milan.
Un accord a aussi été annoncé avec les CFF, l’opérateur suisse, pour développer à l’horizon 2024 des lignes vers Barcelone (via Genève, Lyon et Montpellier), Rome, Prague, Budapest et Berlin avec du matériel loué pour les CFF et neuf pour les ÖBB.
Trains de nuit : jusqu’au bout de l’Italie
En réalité, on peut déjà, grâce au réseau ÖBB, traverser l’Europe de Hambourg jusqu’au sud de l’Italie. Dans un certain anonymat, Trenitalia a maintenu un réseau d’une quinzaine de lignes qui permettent de traverser le pays, de Rome à Trieste, de Lecce (Pouilles) à Milan par Rome ou Rimini, de Syracuse (ou Palerme, ou Reggio di Calabria) à Milan ou Rome, de Salerne à Turin et de Bolzano à Rome.
Véritables trains d’équilibre du territoire, ils s’arrêtent en moyenne tous les 40 km et opèrent en plus une desserte périurbaine de Milan (ou Rome) de nuit, ainsi que des principales villes du parcours (pas moins de trois arrêts dans l’aire métropolitaine de Bari). L’un des nœuds centraux est la gare de Bologne (centre) d’où on peut venir de Milan et repartir sur Venise, Rome, la Sicile ou la cote adriatique et les Pouilles. Gros avantage par rapport à Brive ou Toulouse, à quatre heures du matin, avant les restrictions du Covid, on arrivait à trouver des bars et des sandwicheries ouverts en ville. Un autre monde…
Il s’agit cependant d’une desserte très lente (11h à 13h30 (!) pour Milan – Lecce, 1032 km), sans services (pas de restaurant, ni même d’eau), avec un confort rudimentaire (les compartiments avec des places assises sont pleins ras-bord, les voyageurs réveillés toutes les 3 heures par des contrôleurs qui peinent à suivre le mouvement).
Contrairement à la France (contrôle préalable en gare) et à la Russie (contrôle à l’entrée de la voiture par un contrôleur qui y est affecté et chargé du service à la place), les trains de nuit italiens manquent de personnel, d’où ces brigades de contrôle qui réveillent sans ménagement les voyageurs, plusieurs fois par nuit.
En échange, le voyageur bénéficie de prix attractifs (sur Trainline, sans réduction et pour le jour même, de 43 à 76€ en 2nde classe, sur la plus longue relation Milan – Lecce) et d’une régularité plutôt intéressante. Il n’est pas rare que ces trains de nuit arrivent même en avance… situation impossible en France, ce qui est bien pratique à l’arrivée à Milan pour aller chercher la correspondance avec la SNCF, qui s’est évidemment installée ailleurs qu’à la gare centrale (pourquoi faire simple ?). Heureusement, la gare Garibaldi n’est qu’à 10 minutes et deux stations en métro…
Louis-Benoît Greffe
Crédit photo : DR
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3 réponses à “Traverser l’Europe… avec les trains de nuit”
réveillé toutes les 3 heures. Je dis NON.
A quand le retour des wagons lits façon Orient Express, mais a des prix raisonnables?
tu n’as rien compris ! les trains americains en plein expension en europe !!merci l’europe !!
Quand j’étais plus jeune je prenais régulièrement le Nantes Vintimille pour m’arrêter a Montpellier et de nuit , c’était super sans compter que c’était des voyages 100% SNCF , avec ces arrêts dans toutes les grandes gares traversées !!! c’était le bon temps !!!