Il y a vingt ans, sur un malentendu, le Franco-Suisse que je suis, vint s’établir dans la région parisienne. Dans mon esprit, je prenais définitivement pied sur la terre de Chateaubriand, de Flaubert, de Gounod, du professeur Jacques Monod et de tous les grands esprits qui, dans la plus parfaite liberté de penser, créer, dire, écrire ce qu’ils croyaient juste, important et légitime d’affirmer, ont contribué à la grandeur passée de la France. Quatre ans plus tard, je fuyais ce pays dont je me sentais de moins en moins citoyen. Ce pays devenu invivable par la faute d’une invasion migratoire de plus en plus insupportable, par la faute aussi d’une atmosphère générale irrespirable.
Car la France que je croyais un vaste espace d’intelligence et d’ouverture, permettant des débats peut-être houleux mais sans entrave, est redevenue la France de 1793, celle de la Terreur intellectuelle sur le chemin de la Terreur physique la plus crue. Pour comprendre que les méthodes que l’on eût attendues de l’URSS de Staline, de la Chine de Mao ou de quelque autre lieu où l’on étouffe non seulement la parole mais celui qui en est l’auteur ; pour comprendre que ces méthodes soient devenues les méthodes pratiquées en France, il convient d’entendre le vrai sens des trois mots sacrés : Liberté, Egalité, Fraternité.
Héritière de la victoire des possédants (au détriment du peuple) lors de la Révolution de 1789, la France de la Liberté est celle pour qui le mot signifie en réalité liberté du commerce, liberté, pour ceux qui pensent juste, de dire ce que le pouvoir exige qu’ils disent. Pour ce qui est de l’Egalité, Chateaubriand écrit dans les Mémoires d’Outre-Tombe : « Les Français vont instinctivement au pouvoir ; ils n’aiment point la liberté ; l’égalité est leur idole. Or, l’égalité et le despotisme ont des liaisons secrètes ». Ces liaisons se révèlent dans la Fraternité, aujourd’hui partout présente : celle des loges, des sectes et des chapelles intellectuelles et philosophiques. Ni Voltaire ni Diderot ni même Rousseau n’envisageaient le peuple comme faisant partie à jeu égal de cet ensemble national qu’on appelle les citoyens. Ils manifestaient bien plutôt à leur endroit – surtout l’odieux Voltaire – un mépris profond.
Ce que l’on nommait l’absolutisme royal, on doit à la vérité de le dire, était simplement le devoir du Roi, après avoir écouté ses conseillers et examiné avec attention et honnêteté les affaires en cours, de prendre ab-solutus, c’est-à-dire de lui seul, sous son unique responsabilité, en son âme et conscience – avec le risque de se tromper, – la décision qui s’imposait pour le bien du royaume. Là était son rôle plein et entier, en toute légalité. L’absolutisme républicain, en revanche, n’est que le droit que s’arroge un pouvoir issu d’une tromperie – celle des urnes, elles-mêmes alimentées par le charabia des factions (partis politiques, organisations dites humanitaires, mandarins économiques, financiers, intellectuels, journalistiques, tous mondialistes, c’est-à-dire traîtres à leur patrie) et par la farce des élections – d’assembler autour de lui ceux qui sont de son côté, de son avis, partagent les mêmes apriorités (et les mêmes intérêts), tout cela dans le dédain le plus absolu du peuple qui pourtant permet, par malentendu, que tous ces sinistres clowns soient là où ils ne devraient en aucun cas se trouver.
Ce qui précède explique pourquoi la France d’aujourd’hui, qui a piétiné et continue à piétiner tout ce qui est essentiellement propre à la France éternelle et sacrée, a franchi un pas supplémentaire dans le despotisme et la tyrannie : ne pas penser, ne pas s’exprimer juste, c’està-dire de la seule manière que permet le pouvoir, vaut désormais au coupable d’être condamné pour délit d’opinion et d’être jeté en prison. Tout cela ravale la grande nation de Chateaubriand, de Flaubert et de tant d’autres au rang de Chine de Mao et d’URSS de Staline.
La partie de moi-même qui est française a fortement rapetissé au profit de la partie helvétique de mon être. Non que je me fasse des illusions : la Suisse, entièrement aux mains des forces financières et mondialistes, empruntera tôt ou tard la voie de la France. Pour l’heure, toutefois, existe un répit, répit dont j’entends profiter avant de mourir écœuré et ayant des hommes exclusivement l’opinion d’Alceste : « Je hais tous les hommes : les uns parce qu’ils sont méchants et malfaisants, et les autres, pour être aux méchants complaisants ». De cette opinion, l’avouerai-je, je ne suis pour l’heure guère éloigné.
Dr Michel Bugnon-Mordant, géopolitologue
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3 réponses à “Le virage français vers le despotisme [L’Agora]”
Comme je partage complètement votre analyse. Comme j‘aimerai pouvoir m’évader de cette prison républicaine sachant qu’il ne s’agirait que d‘un sursis…
Oui, Ouestchengen n’est pas la France.
Et l’€urope n’est pas l’Europe.
assez bien résumé un sondage pour savoir ce que pense les européens dans l’union serait interessant mais bfm se gardera d’en faire rassurez vous