L’enseignement immersif au Pays basque inspire la Corse, dont une délégation s’est rendue à Bayonne pour étudier le fonctionnement des écoles associatives de la fédération Seaska. Avec l’idée de faire pareil, ou presque, sur l’île de Beauté.
Réussite d’un modèle au Pays basque Nord
Si le modèle d’enseignement immersif en langue basque suscite des réticences de la part de l’Éducation nationale française, comme nous l’évoquions cet été, il est en revanche étudié avec intérêt par les défenseurs des autres langues régionales de l’Hexagone. Ainsi, une délégation corse menée par le député européen François Alfonsi s’est rendue à Bayonne du 12 au 14 septembre dernier afin de rencontrer des acteurs associatifs, politiques et économiques de la région.
Une délégation corse qui comprenait dans ses rangs : Jean-Félix Acquaviva, député à l’Assemblée nationale ; Lisandru de Zerbi, adjoint au maire de Bastia en charge de la langue corse ; Noël Tomasi, premier adjoint au maire de Biguglia, Ghjiseppu Turchini, porte-parole de l’AILCC, association des enseignants de langue et culture corses ; Jean-Pierre Luciani, responsable du Syndicat enseignant STC Educazioni ; Denis Luciani, président de l’Association des parents d’élèves Associ di i Parenti Corsi ; Antonia Luciani, secrétaire générale de la fondation Coppieters ; Mathieu Ceccaldi, maire de Marignana, assistant du député européen ; et enfin Fabienne Giovannini, conseillère territoriale et assistante du député européen.
L’occasion d’approcher au plus près la réalité de l’enseignement 100 % en langue basque développé par la fédération des ikastola, Seaska. Les Corses ont notamment visité plusieurs établissements de la maternelle au lycée, tous gérés par des associations de parents d’élèves dans un but non lucratif.
La Corse veut tester l’immersif en associatif
Ce déplacement de la délégation corse s’explique par la réussite des Basques en la matière. La fédération Seaska, dont les établissements sont reconnus par le ministère de l’Éducation nationale, accueillait plus de 4 000 enfants à travers 31 ikastola répartis dans le Pays basque Nord à la rentrée 2019. C’est en 1969 que la première ikastola a été créée à Arcangues. Un beau chemin a donc été parcouru depuis pour la sauvegarde du basque.
Ce modèle immersif a aussi séduit François Alfonsi : « Il suffit de voir les statistiques des dernières années. Le Pays Basque est l’un des pays en Europe où l’on observe que les jeunes générations, de 15 à 25 ans, sont celles qui parlent le plus la langue basque, plus encore que les personnes de plus de 80 ans. » Un résultat d’autant plus spectaculaire que le Pays basque Nord ne dispose d’aucune structure institutionnelle propre, étant noyé dans le département des Pyrénées-Atlantiques, sans cohérence historique ni géographique.
Dans le même temps, en Corse, les filières bilingues classiques peinent à assurer la transmission de la langue, laquelle nécessiterait un système d’enseignement plus offensif. « Aujourd’hui, on assiste à une érosion de langue corse au fur et à mesure des générations. Les gens sont de moins en moins corsophones. », rappelle le député européen.
Mais ce voyage en terre basque donne des idées aux Corses, qui ne comptent pas perdre de temps pour passer à l’action. L’objectif est clair pour François Alfonsi : formaliser une « initiative corse pour l’enseignement immersif de type Seaska dont le contenu sera défini sur la base de l’expérience basque » et ce, dès la prochaine rentrée scolaire.
Les Basques ont rendez-vous en Corse au mois de décembre
L’idée de la délégation corse est donc de proposer de l’enseignement immersif en commençant d’abord avec des classes de maternelle puis en mettant en place par la suite une offre jusqu’au bac. Si deux villes (Bastia et Biguglia) se sont déjà portées candidates et comptent apporter des moyens humains et financiers pour la création de tels établissements, le projet s’inspirera aussi des Basques sur le plan juridique puisque ces écoles seront gérées sous forme associative. Et, pour le député européen, il n’y a pas de doute, « les parents verront ensuite que le système de type ikastola est de loin le plus performant ».
Par ailleurs, si la Corse compte déjà trois expérimentations du système immersif dans le public, les résultats de la filière bilingue mise en place dans l’enseignement public seraient insatisfaisants. En effet, le français y est encore trop présent, que ce soit dans la cour de récréation ou à la cantine et le coefficient d’imprégnation serait donc insuffisant.
Les échanges entre Basques et Corses sont amenés à se poursuivre. Une rencontre portant sur la question de l’apprentissage immersif de la langue régionale, mais aussi sur des questions plus larges liées à l’autonomie, est prévue les 4 et 5 décembre prochains à Bastia. Le président de la Communauté d’agglomération Pays Basque Jean-René Etchegaray est notamment attendu sur l’île, accompagné d’une délégation basque composée d’acteurs associatifs, politiques et économiques. Des échanges auxquels le président du conseil exécutif corse Gilles Simeoni a apporté son soutien. Un bel exemple de coopération directe sans passer par Paris !
Crédit photo : DR (photo d’illustration)
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