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Laurent Ryder : « La France compte plus de dix millions de joueurs et joueuses qui s’adonnent aux jeux vidéo »

E-sport, deviens le maître du jeu. Tel est le titre du livre de Laurent Ryder, aux éditions Dragon D’oc, qui fait le point sur un phénomène en pleine expansion : la professionnalisation dans les jeux vidéo. Ils sont aujourd’hui des milliers, à travers le monde, à vivre en effet, concrètement, professionnellement, en jouant aux jeux vidéos. Une petite minorité parmi des millions qui en rêveraient sans doute.

Sujet de fantasmes ou d’inquiétudes, l’e-sport s’installe durablement dans nos quotidiens au fil des ans. Toujours sujet à interrogations, l’auteur aborde cette thématique sous la forme d’un vade-mecum. En partant de l’origine historique de l’e-sport (les jeux vidéo), l’auteur répond aux interrogations que peuvent se poser novices, jeunes joueurs ou parents dans cette pratique qui ne cesse d’attirer le feu des projecteurs et promet fortune aux meilleurs joueurs, avec des sommes d’argent rivalisant ou dépassant celles, connues, du monde du sport. Un guide indispensable pour ceux qui souhaitent découvrir l’e-sport et s’y investir.

Pour faire le point sur ce sujet, et pour parler d’un livre particulièrement intéressant pour comprendre ce phénomène, nous avons interviewé Laurent Ryder.

Breizh-info.com : Pouvez-vous vous présenter à nos lecteurs ?

Laurent Ryder : Jeune homme, passionné par les jeux de stratégie, j’imaginais peut-être faire carrière dans le jeu vidéo alors naissant et balbutiant. À l’époque, il y a plus de trente ans, on pouvait programmer seul des jeux, il ne fallait pas avoir de grosses équipes et des budgets colossaux comme aujourd’hui pour pouvoir sortir un jeu. J’avais obtenu la reconnaissance d’un de mes jeux d’alors, «  Les Aventuriers »,  par un prix « meilleur logiciel de l’année » et avais signé avec un éditeur un important contrat pour un jeu qui n’a finalement jamais vu le jour, l’éditeur ayant mis la clé sous la porte alors que le jeu commençait a être annoncé dans les médias spécialisés de l’époque. Je me suis alors retiré de cet univers et me suis investi dans ce qui me tenait à cœur : le journalisme et les nouvelles technologies pour lesquelles j’avais l’intime conviction – déjà, dans les années 1980 – qu’elles viendraient chambouler nos quotidiens. Certains savent ou se souviennent que j’ai créé Aphaïa, le premier journal numérique interactif à voir le jour à la fin des années 1980. L’information dématérialisée, pour utiliser un terme actuel, était une évidence pour moi. Ce fut pourtant un échec commercial cuisant à l’époque : trop en avance sur mon temps et les mentalités d’alors. Quand je vois aujourd’hui comment se déroulent nos vies quotidiennes avec le numérique ! Je n’ai ensuite jamais quitté la sphère professionnelle de l’industrie des médias, de l’édition et de la communication.

Breizh-info.com : Quand est-ce qu’est né le e-sport ? Quels sont ses ancêtres ?

Laurent Ryder : L’e-sport est l’enfant des jeux vidéo, dont les premières expériences sont apparues dans les années 1950. La première compétition est considérée – a posteriori – comme étant celle organisée au début des années 1970 sur le jeu « Spacewar ». En fait, l’idée de compétition avec classement commence avec les jeux d’arcade (on entre son nom ou un pseudo dans la machine pour connaître son ranking) mais c’est surtout la décennie 1980 qui marque réellement l’empreinte des débuts de compétitions de jeux vidéo avec, notamment, « Space Inviders ».

Dès 1981 se créée la structure « Twin Galaxies » qui se charge, à l’origine, de tenir à jour les classements des jeux « Donkey Kong » et « Space Inviders ». Aujourd’hui cette structure existe toujours et s’est ouverte à d’autres jeux, principalement ceux des décennies 1980 et 1990.

Breizh-info.com : Quels sont aujourd’hui les jeux les plus pratiqués en e-sport ?

Laurent Ryder : L’e-sport regroupe un nombre incroyable de jeux avec leurs spécificités propres. Dans cette offre très large, il est possible de séparer les jeux en deux catégories : ceux qui permettent une pratique compétitive avec de l’argent à la clé et ceux dépourvus de systèmes de gains financiers. Par exemple, les jeux dits « auto-chess » connaissent un énorme succès depuis 2019 (le plus emblématique, « Teamfight Tactics », regroupait, selon son éditeur, déjà plus de 30 millions de joueurs mensuels dans le monde il y a déjà un an) mais n’offrent pas encore une scène compétitive avec des dotations financières importantes à la clé comme le peuvent des jeux comme « League of Legends », « Fortnite » ou « Dota2 ». Ensuite certains jeux peuvent être des gros succès, mais limités à un pays ou une zone géographique. Je pense par exemple à « Shadowverse », un jeu phénomène au Japon, mais relativement peu connu en dehors. Pourtant le prochain vainqueur de la World Grand Prix qui se tiendra en décembre 2020 partira avec un pactole de 1 000 000 de dollars US.

Breizh-info.com : Comment expliquez-vous cet engouement mondial ? Il y a tout de même une différence entre jouer aux jeux vidéos… et venir supporter des joueurs de jeux vidéos dans une arène par exemple, non ?

Laurent Ryder : Je n’explique pas le phénomène, je le constate. Je suis de cette génération qui a grandi avec les premiers ordinateurs individuels et consoles de jeu (et même les calculettes sophistiquées avec lesquelles on pouvait essayer de jouer) et connu le développement de l’industrie du jeu vidéo de ses débuts à aujourd’hui.

L’e-sport, à l’instar du sport, permet aux gens de choisir (ou cumuler les deux aspects) entre la pratique active (je joue pour le plaisir de jouer, en amateur ou en compétiteur pro ou semi-pro) ou passive : j’aime tel jeu, telle équipe ou tel joueur et j’aime les évènements ou spectacles qui sont organisés autour, donc, j’y participe, seul, ou avec des amis, pour profiter de l’ambiance qui jaillit de ces rassemblements. Phénomène relativement analogue lors des compétitions d’e-sport retransmises sur des chaînes de télévisions ou des sites de streaming.

Breizh-info.com : L’e-sport n’est-il pas une impasse économique pour l’énorme majorité des joueurs ?

Laurent Ryder : À l’image du monde du sport, l’e-sport comporte de nombreux pratiquants. Au final, sur la masse, il y en a relativement peu qui peuvent en vivre de manière décente, et, dans ce carré-là, quelques-uns gagnent des sommes stratosphériques. Vous pouvez jouer au foot, au tennis, au golf, ou à un autre sport, rien ne va vous garantir que vous serez le prochain Messi, Nadal ou Woods. L’e-sport connaît ce même phénomène d’entonnoir. Beaucoup d’appelés, peu d’élus.

Breizh-info.com : Est-ce que les sociétés et les sponsors ne font pas trop miroiter à des jeunes qui se disent que pour eux aussi, ce serait possible alors qu’au final, ils sont si peu à se professionnaliser ?
Laurent Ryder : L’e-sport est un phénomène encore jeune et se structure au fil des ans. Je n’ai pas cas de mauvaises pratiques, tout en sachant que ce risque-là ne peut être écarté, car, dans le milieu des affaires, mieux vaut être bien informé des tenants et aboutissants d’un contrat. L’avenir de l’e-sport est devant lui, pas derrière.

Breizh-info.com : Quelle est la durée de vie moyenne d’un gamer au plus haut niveau ?

Laurent Ryder : L’e-sport est une pratique encore récente en comparaison à la pratique sportive. Je n’ai pas d’informations à ce sujet. D’autre part, l’e-sport regroupe des pratiques ludiques parfois très différentes : certains jeux nécessitent des capacités liées à la dextérité, la rapidité, la précision, la coordination, mais d’autres sont plus dans la stratégie intellectuelle et le raisonnement dans la prise de décision et le calcul de probabilités. Dans la première catégorie, il est raisonnable de penser qu’un joueur ne pourra pas avoir une très longue carrière à très haut niveau. La deuxième me paraît échapper à cette limite restrictive de temps et offrir des possibilités de participation à des compétitions sur des durées beaucoup plus longues.  Des jeux comme « Magic the Gathering Arena », « Gwent » (en jeu de cartes) ou « Hearthstone » s’inscrivent typiquement dans cette veine-là.

Breizh-info.com : Pouvez-vous nous donner quelques chiffres sur la pratique de l’e-sport en France ? Et sur les retombées financières ?

Laurent Ryder : La France compte plus de dix millions de joueurs et joueuses (presque à parité) qui s’adonnent aux jeux vidéo. Environ 10 % ont une pratique compétitive.
Les retombées financières ? Un vaste sujet ! Il y a la vente des jeux physiques (par téléchargement ou sur support pour les ordinateurs et les consoles). À cela s’ajoutent tous les jeux payants ou gratuits avec options d’achat qui occupent l’univers des smartphones. Avec la vente de produits dérivés, il faut également compter les annonceurs et les droits de retransmissions… Pour rappel l’industrie du jeu vidéo, dont l’e-sport dépend, « pèse » financièrement plus lourd que l’industrie du cinéma… Je n’ai pas fait le cumul de toutes les retombées financières, mais, au niveau mondial, l’industrie du jeu vidéo représente plusieurs dizaines de milliards, tout cumulé.
L’e-sport est – pour le moment – une galaxie en pleine expansion !

Breizh-info.com : Que souhaitiez-vous démontrer à travers cet ouvrage ?

Laurent Ryder : Ce livre est avant tout un ouvrage d’information destiné à ceux qui s’interrogent sur l’e-sport et aborde – entre autres, parmi de nombreux sujets – une donnée souvent occultée : celle du droit. Vous me parliez tout à l’heure d’une possibilité par des sociétés ou des sponsors de faire miroiter des rêves à de jeunes joueurs. Ce risque existe. Par une méconnaissance du droit. C’est pourquoi j’ai voulu faire de ce livre un vade-mecum, justement, pour donner différents conseils et des lignes de conduites indispensables à ceux qui souhaiteraient s’investir dans l’e-sport.
Ce livre est conçu pour aider les novices, comme un accompagnant !

Propos recueillis par YV

Crédit photo : DR
[cc] Breizh-info.com, 2020, dépêches libres de copie et de diffusion sous réserve de mention et de lien vers la source d’origine – V

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Une réponse à “Laurent Ryder : « La France compte plus de dix millions de joueurs et joueuses qui s’adonnent aux jeux vidéo »”

  1. FGLR dit :

    C’est Space Invaders pas Space Inviders !

    D’ailleurs ca me rappelle lorsqu’à 13 ans j’avais programmé mon propre jeu (sur TO7D) : un Space Invaders next gen !

    Bon après je suis passé à la planche à voile / funboard que j’avais jugé plus sain…

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