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Jean-Paul Gourévitch : « L’avenir de l’Union européenne ne se fera pas sans les Africains ni contre eux » [Interview]

La présence française en Afrique fait partie des tabous de l’Histoire. Depuis les indépendances, aucun pays d’Afrique francophone subsaharienne n’a connu la paix civile totale ou une croissance soutenue, alors que cette Afrique ne manque ni de richesses ni d’atouts. Quel est le bilan de cinq siècles de présence de la France en Afrique ?

Dans La France en Afrique, 1520-2020, synthèse documentée et réactualisée, Jean-Paul Gourévitch s’efforce de rétablir une histoire largement travestie. La France du XXIe siècle en fait-elle trop ou pas assez pour l’Afrique ? Quelle est aujourd’hui son image auprès des Africains et celle de l’Afrique auprès des Français ?

Pour ce spécialiste des migrations, aucun doute, la France et l’Afrique ont un avenir commun. Mais lequel ? C’est ce qu’il nous invite à penser à travers son analyse, toujours précise, comme lorsqu’il évoque les chiffres de l’immigration en France et son coût…

Pour évoquer cet ouvrage, qui vient de paraître aux éditions de l’Harmattan (voir ici), nous avons interrogé Jean-Paul Gourévitch :

Breizh-info.com : Qu’est-ce qui vous a amené à écrire ce livre, La France en Afrique ? On vous connaissait plus spécialiste de l’immigration et des migrations notamment…

Jean-Paul Gourévitch : Mon ouvrage est une refonte complète d’un ouvrage précédent du même titre publié par Le Pré aux Clercs-Acropole et qui a eu trois éditions successives (2004, 2006, 2008). J’ai effectué une quarantaine de missions en Afrique depuis 1987 pour le compte d’organismes très différents (UNESCO, Banque mondiale, ministère de la Coopération puis des Affaires étrangères, Commission européenne, Fonds nordique international, des ONG et des cabinets d’experts…) et je travaille depuis une dizaine d’années auprès des diasporas africaines en France, notamment dans le cadre du Partenariat eurafricain.

Je dirai plutôt que c’est mon expérience africaine qui m’a conduit à travailler scientifiquement sur les migrations,  l’économie informelle, la géopolitique…

Breizh-info.com : Lors de vos recherches, quelles sont les principales découvertes que vous avez réalisées ? Des tabous sont-ils amenés à être brisés ?

Jean-Paul Gourévitch : Je ne parlerai pas de « découvertes », encore que quand on travaille aussi avec des chercheurs ou des responsables africains on ouvre les yeux sur des problèmes jusqu’ici peu connus : les royaumes africains avant la colonisation, les résistances africaines à la colonisation, les diverses tentatives récentes pour fédérer un certain nombre d’États. Mais la comparaison entre les manuels scolaires français et africains montre qu’il y a dans ces derniers de très graves déformations du passé : la traite arabo-islamique n’est quasiment pas mentionnée alors qu’elle a fait à peu près autant de morts (12 millions) que la traite atlantique ; la confusion est permanente entre esclavage et traite négrière ; la participation des Africains à la guerre de 14-18 et de 39-45 est largement schématisée, souvent dans une optique manichéenne ; les indépendances sont parfois décrites comme ayant été arrachées à la France par la volonté des Africains et non facilitées à la suite du référendum de 1958 par le général de Gaulle ; les Occidentaux sont rendus systématiquement responsables et coupables de l’état actuel de l’Afrique sans qu’on s’interroge sur la responsabilité des Africains eux-mêmes…

Des faits indiscutables comme l’importance de l’économie informelle, la corruption omniprésente du haut au bas de l’échelle sociale, l’enrichissement des chefs d’État et de leur nomenklatura ne sont pas approfondis.

Breizh-info.com : La colonisation française en Afrique a-t-elle été une abomination comme le suggèrent entre autres nos autorités éducatives ?

Jean-Paul Gourévitch : Malheureusement beaucoup d’ouvrages qui traitent de la colonisation n’évitent pas le manichéisme. C’est tout blanc ou tout noir parce qu’on regarde le passé avec des lunettes idéologiques et sans éviter les amalgames. Tintin au Congo n’est pas un ouvrage raciste, mais paternaliste. Il y a dans la colonisation des aspects très négatifs (massacres, confiscation des ressources, travail forcé, faible formation des élites…) et d’autres nettement positifs en matière de santé, d’éducation, de transport, d’apprentissage de la démocratie… D’où la nécessité d’un état des lieux le plus « objectif » possible. Ce que j’ai essayé de faire.

Breizh-info.com : Qu’est-ce qui explique l’incapacité de l’Afrique à se développer économiquement malgré un potentiel démographique énorme et des ressources inégalées ? Le pillage de ce continent notamment par de grandes compagnies mondialistes explique-t-il ce décollage qui n’intervient pas ?

Jean-Paul Gourévitch : Que les ressources africaines qui sont potentiellement parmi les plus importantes aient été exploitées par des multinationales ou des États (France, États-Unis, Russie, Chine, Corée…) n’est pas discutable. Pourquoi les États africains et leurs chefs n’ont-ils pas su préserver leur contrôle ?

La première explication est que ces puissances extérieures proposent immédiatement des paiements en échange des marchés qu’ils traitent et que cet argent sert à payer les fins de mois des fonctionnaires ou/et à enrichir le Président et ses proches. Mais les Africains ont souvent renégocié ces premiers contrats, en République du Congo pour le pétrole, au Niger pour l’uranium…

La seconde explication est l’absence d’un réseau de cadres prêts à prendre la relève. Il existe une pléiade de cadres africains et pas seulement ceux que nous avons contribué à former. Mais les uns sont partis vendre leur savoir-faire à l’étranger, les autres n’ont pas toujours la culture ni la pratique du travail en synergie. Ce qui est possible sur le plan communautaire en mobilisant les énergies pour un projet au niveau d’un village ne l’est pas pour un pays.

Une troisième explication vient du fait que nous n’avons pas la même conception du temps et des investissements que les Africains. Le temps occidental est chronologique, le temps africain est ontologique.

Breizh-info.com : Vous évoquez l’unité africaine difficile, comme on pourrait parler d’Union européenne. Est-ce réellement concevable un jour que ce continent s’unisse, alors que les différences (ethniques, religieuses, civilisationnelles) semblent majeures (quel rapport entre un Égyptien et un Kenyan ?)

Jean-Paul Gourévitch : La carte établie par le FMI que vous trouverez dans l’ouvrage liste le périmètre des diverses organisations régionales africaines et donne l’impression que l’Afrique, au-delà de la balkanisation des États, est presque totalement segmentée en puissances économiques fortes (CEDEAO, CEMAC, SADC…) capables de traiter d’égal à égal avec les bailleurs de fonds. Mais cette construction administrative n’a pas de dynamisme et sur le plan politique, il suffit de voir les difficultés de l’Union africaine pour gérer les conflits qui se multiplient sur ce continent, malgré la médiation de plusieurs chefs d’État, pour mesurer à quel point le chemin vers une « unité africaine » n’est ni balisé ni sécurisé.    

Breizh-info.com : Question historique d’actualité enfin : les Blancs d’Europe sont-ils les principaux responsables de la traite négrière ?

Jean-Paul Gourévitch : J’ai un peu répondu. N’oublions pas qu’au fur et à mesure que la traite atlantique se développe, les puissances occidentales qui ne veulent pas s’aventurer dans l’hinterland demandent aux roitelets africains de leur fournir ou de leur vendre ceux qu’ils vont embarquer dans ces voyages sans retour. Les chercheurs africains eux-mêmes ont trouvé peu de traces de résistances ou de refus de ce trafic.

Breizh-info.com : Parmi les 4 scénarios pour l’avenir de l’Afrique que vous proposez, lequel pensez-vous comme étant le plus probable ?

Jean-Paul Gourévitch : Notre travail n’est pas de dire lequel est le plus probable des quatre scénarios décrits par les Africains eux-mêmes. Les futurologues se sont régulièrement trompés parce qu’ils ont pensé que l’évolution des sociétés était linéaire alors que le chemin de petit a à petit c ne passe pas automatiquement par petit b. Nous pouvons faire des prévisions sur cinq ans, voire des approches sur dix ans,  mais en tant que scientifique, je me refuse à extrapoler. Personne aujourd’hui ne peut évaluer l’impact de la transition démographique en Afrique et chez les Africains en France, du réchauffement climatique, de l’islamisation radicale progressive du Sahel, du développement des pandémies, de l’émergence d’une classe de jeunes entrepreneurs et créateurs africains… Ce sont les Africains qui décident de leur avenir, pas les experts. Même si l’avenir de l’Union européenne ne se fera pas sans les Africains ni contre eux.

Propos recueillis par YV

Crédit photo : DR
[cc] Breizh-info.com, 2020, dépêches libres de copie et de diffusion sous réserve de mention et de lien vers la source d’origine – V

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4 réponses à “Jean-Paul Gourévitch : « L’avenir de l’Union européenne ne se fera pas sans les Africains ni contre eux » [Interview]”

  1. Droal dit :

    L’Europe aux Européens.

    L’Afrique aux Africains.

    Pas de 5G.

    Tout le monde en calèche comme les amis des chevaux: les Amish.

    Les €uropéens sont priés de sortir et de rentrer chez eux (sans claquer la porte, SVP).

    Merci.

  2. FGLR dit :

    (version courte)
    L’Afrique est un puits sans fond de misère et de sous-développement.
    .
    La remigration seule solution.

  3. FGLR dit :

    (version longue)
    L’Afrique est un puits sans fond de misère et de sous-développement.
    .
    La France, en tant qu’empire, a fait une énorme erreur lors de la colonisation : vouloir intégrer les populations sous le prétexte d’universalisme imbécile, qu’il soit chrétien ou républicain. Les anglais ont été plus malins en ayant plus tendance à laisser les pays soumis se débrouiller au niveau politique (du moins en apparence cf softpower), tout en exploitant les ressources bien entendu.
    .
    Comment les dirigeants de ces différentes époques (16è-20è siècle) ont pu s’imaginer une seconde qu’il était possible d’intégrer à l’empire des peuples aussi étrangers, distants, lourdement sous-développés, ET surtout ne produisant quasiment RIEN du point de vue civilisationnel (art, science, technique, architecture, industrie, systèmes politiques, niveau de vie, spiritualité, etc).
    .
    Ces dirigeants auraient été autrement mieux inspirés en colonisant principalement l’Asie. La comparaison entre les anciennes colonies européennes en Asie et en Afrique est un bon moyen parmi d’autres de constater l’effroyable et irrémédiable gouffre civilisationnel qu’est l’Afrique : En environ 200 ans, l’Asie nous a rattrapé alors que l’Afrique stagne toujours au même niveau et fonce droit vers une catastrophe démographique largement due à son irresponsabilité et à l’assistanat occidental.
    .
    Mais des erreurs tout le monde en fait, l’important est de les reconnaître et de corriger le tir.
    .
    Aujourd’hui l’empire français a perdu une grande partie de sa puissance depuis la défaite des européens contre une certaine tribu organisée qui ne se prive pas de renforcer son pouvoir toxique (marxisme et libéralisme hyperfinancier apatride) et de multiplier avec brio les actions revanchardes contre les peuples européens; donc ce vieil universalisme, ainsi que toute forme d’intégration, doit être combattu avec détermination.
    .
    Concrètement la seule solution pour l’Europe est la remigration d’environ 80% de la population immigrée depuis les années 60 majoritairement d’origine africaine et maghrébine, descendants inclus, avec bien entendu prise d’empreinte génétique et priorité à ceux qui ont un lourd casier judiciaire.
    Si l’on considère qu’actuellement cette population représente 20% de la population vivant sur notre sol, on se retrouverait avec moins de 5% de la population d’origine immigrée africaine/nord africaine. Cette population serait d’autant plus facile à intégrer que l’on n’aurait conservé que les éléments dévoués et productifs.
    .
    En attendant cette remigration ou parce qu’elle ne se produira peut-être jamais, la moindre des choses est de remettre à sa place toute cette masse grouillante odorante, bruyante et haineuse, à la moindre opportunité leur marcher sur la gueule (et oui), les rejeter systématiquement, rappeler les réalités historiques, etc.
    .
    La place des africains est en Afrique.
    .
    Les peuples européens ont le droit irrévocable de vivre en tant que civilisation et peuples blancs, tout comme les peuples asiatiques, arabes, africains, indiens. Pour quelle mystérieuse raison nous n’y aurions pas ce droit comme les autres ?
    .
    Remplacer massivement une population est non seulement très antidémocratique, mais aussi générateur de conflits inévitables et d’autant plus violents que les population immigrées et locales sont profondément différentes et historiquement antagonistes.
    On peut raisonnablement se poser la question de savoir qui nous impose cette immigration et avec quelles objectifs et conséquences possibles : mort lente par bougnoulisation/paupérisation/dysgénisme/rétrogradation civilisationnelle (cf harmonisation heureuse) ? mort brutale par incapacité à gérer un conflit suite à une crise qui dégénère ? réveil lent d’une civilisation menacée mais résistante ? réveil brutal des peuples européens exaspérés par l’injustice et le culot incroyable de certains (cf en France il faut être j*** pour avoir le droit de discuter de l’identité française en public !!?)
    .
    L’Armée française : s’y engager pour apprendre les techniques de combat est une excellente idée, par contre ne pas y rester une fois le savoir-faire acquis, sauf si l’on veut servir les intérêts étrangers (us en gros) opposés aux nôtres (ex : la France contre les serbes en Yougoslavie, ou pour les mafias immigrationnistes en Libye), et se mettre en position très inconfortable étant donné la proportion importante d’extraeuropéens.
    .
    .
    La remarque à la fin de l’article de Gourévitch ressemble à un troll ou je n’ai peut-être pas bien interprété, mais de mon point de vue un immigré n’a aucune légitimité pour s’immiscer dans les débats français : qui serais-je si je faisais de même en tant que français en Russie, au Japon, au Gabon, ou en Bolivie ? on me montrerait plus ou moins poliment la direction de la frontière la plus proche et fin de l’histoire. C’est quand-même incroyable tous ces étrangers/immigrés/fils ou fille d’immigrés en tout genre qui la ramène et en vienne à obtenir le pouvoir. (au passage je note que les anglais avec leur maire, ou ministre de la justice musulmans sont à un stade plus avancé de pourrissement, le libéralisme anglo-saxon dans toute sa splendeur)

  4. ermaz dit :

    C’est un peu copié sur Bernard Lugan, non?

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