On croyait que les écolos aimaient le vélo. Pas toujours, en faisant pression sur Nathalie Appéré (PS), maire de Rennes, ils ont obtenu que le Tour de France 2021 ne parte pas de Rennes. Ne détenant pas la majorité absolue au conseil municipal, cette dernière est contrainte de tenir compte du poids politique de ses « alliés » écolos.
La presse parisienne s’est intéressée à l’affaire du Tour de France à Rennes. C’est le cas du Canard enchaîné (19 août 2020) : « Les écolos bretons n’aiment pas les rassemblements populaires qui échauffent les esprits. Ah, le populo qui traîne avec lui son lot de déchets ! « Impact écologique », ont décrété les verts locaux. Ils ont refusé que le Tour 2021 parte de Rennes, du coup il s’élancera de Brest, où le maire socialiste est, lui, moins prompt à verdir ses positions que son homologue d’Ille-de-Vilaine ».
Le Canard enchaîné (19 août 2020) s’amuse à rappeler cette déclaration de Nathalie Appéré (PS), maire de Rennes, en 2015 : « On est particulièrement heureux de recevoir le Tour de France à Rennes. Le Tour de France à Rennes. Le Tour de France à Rennes. Le Tour de France est dans la capitale de la région, qui est la capitale du vélo, la Bretagne. Donc c’est vrai que c’est un grand moment de sport. Mais c’est surtout un grand moment de fête populaire, et je crois que le Rennais ont lâché les freins pour accueillir le Tour de France ».
Mais, cette année, elle a cédé devant la pression du groupe écolo de sa majorité. Car 2020 n’est pas 2014. Le rapport de force au sein de la gauche a changé et, en politique, il n’y a que cela de vrai – avec l’argent, bien entendu. En clair, les élections municipales de 2020 et celles de 2014 ne donnent pas le même résultat politique : les écolos sont passés du statut de petite minorité à celui de grosse minorité au sein du conseil municipal.
Voyons les résultats des élections municipales. Au premier tour de 2014 (23 mars), Nathalie Appéré (PS) arrive en tête avec 35,57% des suffrages exprimés. La deuxième place est occupée par la liste de droite (30,12%). Et celles des écolos – Front de gauche (Matthieu Theurier et Valérie Faucheux) n’arrive qu’en troisième position (15,03%). Pour le second tour (30 mars), la fusion étant opérée, la liste d’union conduite par Nathalie Appéré accorde 18 places aux écolos sur 61 colistiers. Certes, petite consolation, Matthieu Theurier figure n°2… Et cela débouchera sur la constitution d’un groupe écolo de 11 membres.
Changement de programme en 2020. Au premier tour (15 mars), Nathalie Appéré (PS) arrive à nouveau en tête avec 32,78% des voix. Mais, cette fois, la liste écolo (Mathieu Theurier) termine deuxième (25,37%). Pour le second tour (28 juin), la fusion d’impose. La nouvelle liste comprend 35 candidats de la maire sortante et 2 écolos. Bien entendu, Matthieu Theurier figure à la seconde place. Résultat des courses : 51 élus sur 61 sièges à pourvoir, soit 30 sièges pour Mme Appéré et ses amis et 21 pour les écolos ; tandis que les Marcheurs et la droite jouent les figurants avec cinq sièges chacun. Première observation : la maire ne dispose pas de la majorité absolue avec ses fidèles (30 sièges sur 61). Deuxième observation : pour tout dossier, elle a besoin soit de l’accord des écolos, soit d’une petite magouille avec la droit et les Marcheurs afin d’obtenir la majorité. Troisième observation : en cours de mandat, elle cherchera à débaucher quelques éléments ici ou là ; avec des sucettes, elle parviendra à récupérer des élus de droite ou des Marcheurs. Quatrième observation : elle aura à supporter la pression de ses « alliés » écolos qui pratiqueront marchandage et chantage ; il y aura des « négociations » pour l’urbanisme, la place du vélo, la police municipale (armée ou pas), le verdissement…
Dans ces conditions, Nathalie Appéré était contrainte de faire preuve de retenue pour le début de son deuxième mandat ; elle ne pouvait pas se permettre de braquer ses « alliés » écolos d’entrée de jeu et de montrer une majorité divisée un mois après les élections municipales. Et comme le Tour de France n’est pas une question stratégique, elle a jugé préférable de jeter l’éponge. Mais elle ne pourra pas se permettre de reculer sur des sujets auxquels elle tient – et auxquels les milieux d’affaires tiennent tout autant. Ce qui permet de belles empoignades à l’hôtel de ville. Droite et Marcheurs pourront jouer alors les arbitres… ou les supplétifs !
Bernard Morvan
Illustration : DR
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