La plus grande économie de l’UE n’a beau avoir chuté « que » de 10.1% au second trimestre (contre 13.8% en France et 20% en Angleterre), la pauvreté est déjà là, et avec elle, les tensions sociales. Selon une étude du fond Bertelsmann, 15.9% de la population est au niveau ou sous le seuil de pauvreté, fixé à 1074€ par mois.
A Brême, ville portuaire qui forme aussi un des plus petits Länder du pays, un quart de la population (24.9%) est sous le seuil de pauvreté, contre à peine un bavarois et un badois sur neuf (11.9 et 12.3% respectivement). Depuis 2009, la pauvreté a reculé au Mecklembourg (de 23.1 à 19.4%), tout en restant élevée, mais a encore augmenté à Brême en dix ans (de 20.1 à 24.9%) et en Hesse (de 12.4 à 16.1%).
Autre enseignement intéressant de l’étude, les chômeurs sont plus exposés à la précarité (57.9%) que les migrants (35.2%). De quoi donner de l’eau au moulin de ceux, de plus en plus nombreux au sein des allemands et des expatriés en provenance d’Europe de l’Est, qui estiment que les migrants reçoivent trop de largesses de la part de l’Etat, et ce aux dépens des allemands installés dans le pays depuis des années ou qui y sont nés.
« Les chiffres montrent clairement que la pauvreté s’était déjà aggravée avant la crise du coronavirus Covid19, à un moment où l’économie était en plein essor et les chiffres du chômage étaient bas», a déclaré Verena Bentele, présidente de l’association sociale Sozialverbandes VdK. Le coronavirus a fait, comme ailleurs, exploser le chômage : il y avait en juillet 2.910.000 chômeurs en juillet en Allemagne, soit 635.000 de plus en un an.
Cette agravation de la pauvreté allait de pair avec une augmentation des écarts entre des riches toujours plus riches et une classe moyenne en voie de déclassement rapide, précipitée dans la précarité et les « mini-jobs » qui rapportent au maximum 450 € par mois (7.6 millions de titulaires en 2018, à 70% des femmes). Pis, ces mini-jobs sont une bombe à retardement sociales, car du fait de charges sociales réduites, ils ne rapportent que 140 € de retraite par mois à leur titulaire.
Les faibles retraites y sont aussi pour beaucoup : alors qu’un minimum vieillesse doit enfin être créé début 2021 pour ramener les plus basses retraites de 512 à un peu plus de 1000 €, 11% des retraités, soit 942.000 personnes, étaient obligés de travailler en 2017, et la retraite moyenne était de 1100 € brut par mois, contre 1370€ en France.
Par ailleurs, selon une autre étude parue il y a trois semaines, 2.8 millions d’enfants et de jeunes gens sont sous le seuil de pauvreté, soit un enfant ou jeune homme sur cinq (21.3%). Les années Merkel, glorieuses pour les grands patrons, moins pour l’allemand de base, semblent achevées mais elles laissent un cortège de bombes sociales – retraites très basses, immigration de masse, grandes villes rendues invivables par la délinquance, éclatement de la classe moyenne, accroissement de la pauvreté etc.
Louis Moulin
Crédit photo : DR (photo d’illustration)
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