Qu’un promoteur immobilier brosse dans le sens du poil la ville où il travaille, personne ne s’en étonne. Sauf quand la municipalité de la ville en question est en rupture avec le mondialisme…
La France a découvert voici quelques semaines les méthodes contestables du parquet national financier (PNF). Les craintes pour l’indépendance de la justice pourraient s’étendre à d’autres instances. Le 22 juillet dernier, un grand article du Canard enchaîné révélait que la juridiction interrégionale spécialisée (JIRS) de Marseille a ouvert une enquête préliminaire pour corruption et abus de biens sociaux. Elle vise Robert Ménard, maire de Béziers, et un promoteur immobilier régional, Socri Reim.
Deux faits sont en cause : la réalisation d’un clip vidéo à la gloire de Béziers, projeté lors d’une réunion publique de Robert Ménard en 2017, et le financement d’un projet de site internet municipal. Dans les deux cas, les dépenses auraient été effectuées par Socri Reim.
Le plus étonnant dans cette affaire, réside dans la modestie des sommes en cause : respectivement à 25 656 euros et 23 500 euros. Et il n’est pas question de valises de billets. La vidéo a bien été réalisée et, si le site incroyablebeziers.fr n’existe pas à ce jour, le domaine a été réservé en 2018 par Creativia, une agence de publicité de Montpellier.
Une piste qui fait flop pour les municipales
Ce n’est pas du tout pour ce genre de bagatelle que les JIRS (il en existe huit, dont une à Rennes) ont été créées. Elles se consacrent en principe aux affaires de criminalité et de délinquance les plus graves : meurtres, vols, proxénétisme ou trafic de stupéfiants en bande organisée, fabrication et détention d’armes biologiques, etc.
Cerise sur le gâteau, les informations précises du Canard enchaîné, reprises à sa suite par toute la presse nationale, ne peuvent provenir que d’une violation du secret de l’enquête. L’hebdomadaire satirique serait d’ailleurs à l’origine de l’affaire. Il a évoqué les dépenses de Socri Reim dans deux articles parus en mars 2019. Quelques semaines plus tard, la JIRS avait ouvert une enquête. Un calendrier parfait pour révéler un scandale juste avant les élections municipales de 2020 – si scandale il y avait eu. Ce qui, de toute évidence, n’est pas le cas.
Partout et depuis toujours, les promoteurs immobiliers qui ont des biens à vendre dans une ville s’efforcent de chanter les louanges de celle-ci. Quelle que soit la couleur politique du maire. Mais ce qui est naturel à Rennes ou Nantes, municipalités socialistes, devient gravissime quand le maire s’appelle Robert Ménard !
L’argent des promoteurs bienvenu à Nantes
Nantes, tenez. Depuis 2007, la métropole caresse l’idée de construire une attraction touristique, l’Arbre aux Hérons, qui seconderait le Grand éléphant des Machines de l’île. D’hésitations en tergiversations, Jean-Marc Ayrault a laissé le dossier à ses successeurs, l’éphémère Patrick Rimbert puis Johanna Rolland. Cette dernière a repris le projet Elle en a fait l’une des promesses de sa campagne municipale en 2020. Elle a créé un Fonds de dotation Arbre aux Hérons pour récolter de l’argent privé, et a confié sa direction à une ancienne députée socialiste battue aux élections de 2017.
Si le site incroyablebeziers.fr n’est pas encore réalisé, l’Arbre aux Hérons ne l’est pas non plus. Mais les promoteurs immobiliers chantent déjà ses louanges, tel Gaalon-Guerlesquin. Et il a déjà donné lieu à quantité de belles vidéos. Enfoncés, les 25 656 euros bitterois : les sommes espérées s’élèvent à 11,7 millions d’euros. Or parmi la trentaine d’entreprises qui financent le fonds de dotation figurent déjà trois promoteurs immobiliers. Bati-Nantes s’est engagé à verser au moins 200 000 euros, Marignan et Brémond au moins 50 000 euros.
E.F.
Illustration : le site de la carrière de Misery, à Nantes, destiné à recevoir l’Arbre aux Hérons. Photo BI, droits réservés
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