J’ai beau être un nationaliste breton convaincu depuis ma plus tendre adolescence, c’est à dire voici plusieurs décennies déjà, je n’en demeure pas moins très sceptique sur la question de la réunification de la Bretagne à venir, dans les prochaines années.
Une réunification actuellement discutée notamment à Rennes et à Nantes, deux métropoles qui étouffent déjà suffisamment la Bretagne pour s’interroger sur ce qui se cache derrière cette volonté manifeste de membres du PS ou anciennement affiliés de réunir la Loire-Atlantique à la Bretagne.
Car ne nous faisons aucune illusion : ce ne sont ni l’UDB, ni les élus autonomistes avec leur poids ridicule dans les différentes assemblées qui feraient peser la balancer dans le sens de la réunification. Ce qui est d’ailleurs regrettable, c’est que certains d’entre eux soient persuadés d’avoir de l’influence et les bonnes oreilles ici de Johanna Rolland, là de Nathalie Appéré ou encore de Jean-Yves Le Drian, alors qu’en réalité, ils ne servent que de caution « Breizhou » à des édiles politiques aux antipodes du combat beton. On se demande bien ce que le nationaliste breton sincère Christian Troadec et son mouvement « Oui la Bretagne » cherchent à négocier avec le socialiste Loig Chesnais-Girard… si ce n’est risquer de se compromettre.
Parce que ce sont des membres du PS qui envisageraient, éventuellement, la réunification de la Bretagne, il faut par principe se méfier. Voyez ce qu’ils ont fait de Rennes, de Nantes, et même de Brest, trois métropoles vampires, qui s’étendent de plus en plus au sein de notre Bretagne, déséquilibrant les territoires comme jamais, nuisant à la ruralité, et ouvrant grand les portes à une bourgeoisie parisienne désireuse de fuir une capitale française de plus en plus invivable… pour reconstruire la même chose en plus petit, chez nous, en Bretagne.
Alors quelle Bretagne réunifiée pour demain ? La Bretagne des métropoles contre la Bretagne de la ruralité ? La Bretagne de la pieuvre PS (pour ne pas employer un autre mot) contre les Bretons ? Voulons nous la Bretagne devenue banlieue de Paris, pour le pire (le bétonnage, l’immobilier qui explose, les cités dortoirs, la ligne grande vitesse qui rase tout sur son passage)…et pour le pire (l’accélération de l’arrivée en Bretagne de tous les maux qui font de l’Ile de France une poudrière ethnique) ?
Ne faut-il pas par ailleurs prendre en compte que si la ville de Rennes compte déjà une importante évolution ethnique depuis plusieurs années, la ville de Nantes est en proie à une immigration massive, non contrôlée par les autorités, et que les contribuables de Bretagne se retrouveraient à devoir sortir le portefeuille encore plus pour accueillir « toute la misère du monde » ?
Quelle Bretagne voulons-nous pour demain ? Avec quels Bretons ? Le projet de réunification de la Bretagne ne doit-il pas avant tout rentrer dans un projet plus global de sécession d’avec la République française ? Quels nationalistes bretons peuvent accepter que des élus qui n’ont de cesse de se proclamer « Républicains » et d’en appeler aux « valeurs de la République » usurpent la lutte bretonne ?
Certains dirons « prenons déjà ce qu’on nous donne ». C’est un vieux réflexe de colonisé. « Tout est à nous, rien n’est à eux », devrait plutôt être la règle dans cette situation. Et quand bien même un référendum serait organisé, sommes nous vraiment certain du résultat ?
Qu’est-ce qu’attendent les nationalistes bretons pour enfin se mettre au boulot, et prêcher la bonne parole dans nos villes et nos villages, pour expliquer aux Bretons que la République française, en sortir maintenant, c’est s’en sortir demain ? Quand est-ce qu’ils se mettent autour d’une table en vue des élections régionales, durant laquelle la seule thématique de la réunification ne fera pas gagner une liste ?
N’est-il pas venu le temps de comprendre, enfin, que la défense de la langue bretonne et de la réunification de la Bretagne ne font pas un programme politique, mais que les Bretons attendent des réponses et des propositions précises qui concerne leur avenir, économique, identitaire, social, et aussi culturel ?
Qu’on se le dise. Si demain la Bretagne bénéficiait de pouvoirs élargis entre les mains de bons Républicains français partisans de plus de décentralisation, les Bretons n’en seraient pas moins esclaves de cette République française « une et indivisible » qui par ailleurs est en train de proclamer, par l’immigration massive de peuplement, la mort des peuples autochtones.
« Blacks lives matter », y compris en langue bretonne, cela veut dire la même chose. Une Bretagne réunie et autonome avec en son sein des Bretons ayant une mentalité de bons Français républicains (ou colonisés mentalement par toutes les tares actuelles made in USA, du gender au privilège blanc…) ne changerait rien à la donne. Il faut changer de logiciel. C’est la seule chose à faire et c’est ce que depuis plusieurs décennies, aucun mouvement estampillé « Mouvement breton » ne fait.
Les nationalistes Corses n’ont pas mendié des miettes aux représentants des partis français en Corse. Ils ont conquis l’âme de leur peuple, et ils ont été élus. Les nationalistes Bretons doivent en faire de même et s’organiser rapidement.
Sinon, ils peuvent songer dès à présent à quitter leur pays qui n’existera bientôt plus, quand bien même le Gwen Ha Du flotterait dans toutes les rues et les écoles Diwan seraient la norme, de Brest à Clisson…
Vive la Bretagne libre et décolonisée mentalement.
Julien Dir
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