Le coronavirus est l’occasion pour les Écossais de prouver qu’ils sont mieux organisés que les Anglais. Ce qui ne peut que renforcer le sentiment national écossais.
Écrivain, scénariste et réalisateur, William Boyd est fort occupé en cette période de confinement avec la correction d’un nouveau roman, Trio, l’écriture d’une série télévisée sur l’incendie de Notre-Dame, la rédaction de critiques littéraires et l’introduction à un roman noir de Simenon. Il trouve même le temps de traiter Boris Johnson de « fumiste fumeux ». Car Boyd est écossais, donc hostile au Brexit et prompt à souligner les différences existant entre son pays et l’Angleterre : « Je crois que l’Écosse affronte la crise différemment. Certes, c’est un plus petit pays, beaucoup moins peuplé ; mais le gouvernement écossais paraît uni, prend des mesures fermes et les fait appliquer, et a la chance d’avoir à sa tête Nicola Sturgeon, une femme responsable, respectée et capable de décisions claires et pragmatiques. Le contraste avec Boris Johnson n’en est que plus saisissant. » (L’Obs, 9 avril 2020)
Rancunes ancestrales
Le Brexit, inspiré par les Anglais, a ravivé les rancunes ancestrales entre l’Écosse et l’Angleterre et qui furent exacerbées lorsque Margaret Thatcher démantela l’industrie écossaise. Mais il faut également tenir compte du fait que, comme tous les pays pauvres de l’Union européenne, l’Écosse avait tout à perdre à quitter l’Europe. En effet, grâce aux fonds structurels de Bruxelles, elle touche aides et subventions. Si bien qu’on assiste à l’affrontement d’un nationalisme écossais ave la montée en puissance de l’identité anglaise. Avec une tonalité particulière pour le Parti national écossais, comme l’explique David Goodhart dans son ouvrage Les deux clans (Les Arènes) : « Le parti national écossais qui, comme son nom l’indique, est un parti nationaliste doté d’une base ancrée dans la majorité blanche, mais teinté de civique de centre-gauche : « Des décisions sur l’Écosse, prises par ceux qui tiennent le plus à l’Écosse ». Comme l’a souligné le commentateur politique Andrew Marr (The Times, 4 septembre 12016), la campagne pour le oui tendant la campagne du référendum de 2014 sur l’indépendance de l’Écosse jouait parfois sur les mêmes pulsions anti-système que l’UKIP et que le soulèvement anti-UE en Angleterre : « Le sentiment que le système ne fonctionne plus pour « les gens comme nous » (…) et que le pouvoir doit être ramené à un niveau bien plus local. » Le Brexit était un élan pour reprendre le contrôle/ la souveraineté face à une UE supranationale ; le SNP est un mouvement pour reprendre le contrôle/ la souveraineté à un Royaume-Uni plurinational. »
Pour David Goodhart, la force du SNP repose sur le « sentiment national écossais. Et il peut brandir ce sentiment avec un nationalisme civique en attaquant le Parlement de Westminster – plutôt que les Anglais – pour dénoncer le peu de pouvoir, de financement et de mesures sociales accordés au peuple d’Écosse. »
B. Morvan
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