La pisciculture est l’un des secteurs durement touchés par la crise économique liée au confinement en France. L’inquiétude grandit dans les exploitations avec une commercialisation de la production à l’arrêt. Le point sur la situation.
Produits aquatiques : les bons mots des organisations de producteurs
Dans un communiqué de presse commun en date du 24 mars dernier, le CIPA (Comité Interprofessionnel des Produits de l’Aquaculture), le CNC (Comité National de la Conchyliculture) et France Filière Pêche (association à vocation interprofessionnelle qui réunit tous les maillons de la filière de pêche française) évoquaient alors les impacts causés par la pandémie de coronavirus sur leurs secteurs d’activité.
Ils indiquaient que « l’ensemble des acteurs des filières de pêche, de pisciculture et de conchyliculture français » restaient mobilisés « pour maintenir l’approvisionnement en produits aquatiques et contribuer à l’alimentation des Français » et ce, « malgré le contexte contraignant de la propagation du Covid-19, et le renforcement des mesures de confinement ».
Selon ces organisations, tous les professionnels de la filière se sont engagés à « continuer à proposer aux consommateurs des produits aquatiques frais, sains et de qualité ». Cependant, si les entreprises d’aquaculture envisageaient, selon la CIPA, de continuer de « prendre soin des poissons et de pêcher à la commande », les choses ne se sont pas déroulées aussi simplement depuis le début du confinement. Et certains pisciculteurs rencontrent actuellement de graves difficultés économiques.
Pisciculture : de quoi parle-t-on ?
Avant d’aller plus loin, qu’entend-on précisément par aquaculture ? Celle-ci désigne, selon la réglementation européenne relative à la politique commune de la pêche (PCP), « l’élevage ou la culture d’organismes aquatiques au moyen de techniques visant à augmenter, au-delà des capacités naturelles du milieu, la production des organismes en question, ceux-ci demeurant tout au long de la phase d’élevage et de culture, et jusqu’à la récolte incluse, la propriété d’une personne physique ou morale ».
Une aquaculture qui comprend donc plusieurs activités, dont la pisciculture continentale, pratiquée en bassins ou en étangs et qui élève des salmonidés (truites, ombles), des esturgeons (chair et caviar…) ainsi que des poissons d’étang (carpes, brochets, sandres…), et la pisciculture marine destinée à élever des espèces d’eau de mer (bars, daurades, saumons, turbots etc., sans oublier les écloseries qui produisent œufs et alevins.
Une réalité beaucoup plus dure pour les pisciculteurs
Revenons sur le terrain, où de l’eau (plutôt amère cette fois) a coulé sous les ponts depuis ce 24 mars. Notamment chez les pisciculteurs, dont nous avons déjà évoqué il y a quelques jours la détresse de plusieurs de ces derniers. Comme dans cette exploitation qui, faute de disposer de débouchés commerciaux actuellement du fait du confinement, organise un don de truites arc-en-ciel (250 grammes) le samedi 18 avril prochain au matin pour les particuliers, sur le marché de Pleyben. S’ils ne trouvent pas preneurs, les poissons seront tout simplement détruits. Triste gâchis.
Plus loin, en Occitanie, les pisciculteurs doivent là aussi surmonter le problème des stocks, avec une production qu’ils doivent impérativement écouler avant l’été tandis que les circuits de commercialisation habituels sont coupés par le confinement. Alors c’est la prime à la débrouille, de la vente directe au consommateur en passant par la livraison à domicile, tout est bon pour se débarrasser de quelques poissons et pour regonfler un peu la trésorerie.
Dans le Puy-de-Dôme, c’est cette fois un jeune pisciculteur spécialisé dans l’élevage de truites arc-en-ciel et fario biologiques qui fait part de son désarroi dans la presse locale. En temps normal, il fournit les restaurants étoilés et les centres de vacances de la montagne voisine. Mais, là encore, le confinement est venu mettre un terme à tout cela. Et la vente directe compense très péniblement le manque à gagner.
Autre exemple de la gravité de la situation dans les Deux-Sèvres, où une pisciculture d’Availles-sur-Chizé spécialisée dans l’élevage de poissons pour la pêche loisir se retrouve aujourd’hui avec 23 tonnes de stock de truites sur les bras. À titre de comparaison, l’exploitation vend chaque année en moyenne 26 tonnes de truites. Sur ce volume, 30 % est destiné au repeuplement des rivières et 70 % pour la pêche loisir en étangs. En outre, la prolongation du stockage occasionne en parallèle une hausse des coûts puisqu’il faut bien nourrir ces poissons : quelques cinq tonnes de granulés évaluées pour un montant de 10 000 €.
Pisciculture : le point sur la filière
Plus globalement, la filière piscicole représentait un volume de chiffre d’affaires de 168 millions d’euros en France pour l’année 2016. Poids lourds de l’activité, la truite et le saumon totalisaient à eux seuls 113 millions de cette somme avec 27 900 tonnes vendues en France. Au total, la pisciculture a cumulé 40 730 tonnes de poissons commercialisés dans le pays pour cette même année 2016. Un dynamisme que les professionnels souhaitent voir revenir rapidement le long des bassins…
AK
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