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L’État islamique de plus en plus menaçant au Mozambique

Actif en Afrique de l’Ouest, l’État islamique fait aussi parler de lui récemment au nord du Mozambique – avec plusieurs villes attaquées ; la dynamique terroriste ne cesse de s’intensifier au nord du Mozambique, tandis que le gouvernement semble éperdu et l’économie de la drogue prospère.

Ce 6 avril, des combattants affiliés à l’EI ont attaqué deux villes, Muidumba et Chitumbe, peuplées d’environ 72 000 habitants. Ils sont aussi présents aux abords des localités Miteda, Chilund, Nampah et Kaposa, dans la même région du Cabo Delgado qui fait face déjà depuis trois ans à l’offensive de l’EI. Le 7 avril, de nouvelles attaques ont eu lieu – les habitants des localités concernées affirment qu’il n’y a eu guère de violences, car les forces gouvernementales ont fui. Sur des vidéos, on voit les rebelles qui discutent avec les habitants, distribuent des vivres et appellent les chrétiens à se convertir à l’islam.

Le 23 mars dernier, la ville de Mosimboa de Praya a été attaquée par les rebelles, équipés d’artillerie. Ils ont barré toutes les issues de la ville et pris la base militaire locale. Le 21 mars, les analystes de l’ACLED avaient affirmé dans un rapport que le Mozambique était le pays où le terrorisme islamique était le plus dynamique en 2019, avec une augmentation de 237 % de l’activité terroriste et de 197 % des morts.

Outre l’EI, qui a revendiqué 26 attentats en 2019, les shebabs somaliens et des islamistes chassés du Congo-Zaïre sont eux aussi impliqués dans le conflit, qui se rapproche de Pemba, la capitale de la province. Depuis le début du conflit, plus de 900 personnes ont été tuées et 100 000 ont fui les localités rurales. L’exode a conduit certains réfugiés sur des îles côtières où ils s’entassent, ce qui a provoqué fin février une résurgence du choléra – au 26 février, au moins 273 cas étaient signalés et 20 personnes en étaient mortes.

Au sujet de ce conflit, le canal Telegram russe spécialisé sur l’Afrique Zangaro Today – inactif depuis – commentait le 21 mars dernier : « l’on sent que le gouvernement est complètement perdu. Le président avait déjà proposé des pourparlers de paix et une agence pour le développement des trois provinces du Nord avait été créée, avec la création d’emplois pour les jeunes qui sont la base sociale des guerrillas islamistes. En même temps, le pouvoir se prépare à une vaste opération militaire dans la province, qui se déroulera probablement avec l’appui de la compagnie de sécurité privée russe Wagner. Africa Intelligence affirmait qu’un avion de transport russe AN-124 avait atterri le 23 février à Nakal avec un chargement d’armes et probablement un hélicoptère Mi-17 ». Le 29 octobre 2019, Carta de Moçambique affirmait que 5 combattants de Wagner étaient morts dans l’attaque par des islamistes le 27 octobre d’un groupe de militaires locaux qu’ils appuyaient ; 20 militaires locaux étaient aussi morts.

« La dynamique actuelle risque d’enterrer les projets de Total SA et d’Exxon pour exploiter les hydrocarbures offshore sur le plateau continental du Mozambique [la crise économique et le krach pétrolier ont probablement sonné leur glas, désormais] Les embuscades sur les routes, la destruction d’infrastructures de transport et le chantage des militaires qui demandent des sommes de plus en plus folles pour gardienner l’infrastructure d’extraction pétrolière renchérissent la production et ne permettent pas un bon climat pour le business ».

Le Mozambique, étape de la route de l’héroïne d’Afghanistan en Europe

Alors que le Mozambique est aussi frappé par une déforestation massive – les billes partent nourrir l’insatiable ogre de l’économie chinoise depuis l’an 2000 – en revanche, l’économie de la drogue se porte à merveille, comme le montre la saisie d’1,5 T d’héroïne par les garde-côtes du Mozambique le 26 décembre dernier. Les contrebandiers avaient incendié leur bateau puis avaient sauté à l’eau quand ils ont été arraisonnés – tous Iraniens, les 12 survivants croupissent désormais en prison.

En juillet 2019, des experts estimaient que jusqu’à 40 tonnes d’héroïne traversaient le pays chaque année, via une route assez tortueuse où l’héroïne est transbahutée d’Afghanistan au Pakistan, prend la mer sur de petites et moyennes embarcations du Pakistan au Mozambique, s’en va en camions jusqu’à Johannesburg avant d’être transférée en Europe. Environ 100 millions de dollars restent chaque année au Mozambique, comme paie des dealers et en pots-de-vins. Les trafiquants utilisent Whatsapp, pour indiquer aux pilotes des embarcations venues du Pakistan où décharger la marchandise et comment se faire payer.

L’EI aussi actif en Inde, Tunisie, Irak, Russie…

Ce 7 avril, l’EI – qui avait appelé à intensifier le djihad alors que les pays étaient frappés par la pandémie du coronavirus – a revendiqué une attaque sur une patrouille de la police indienne et du 116ème bataillon des forces de réserves centrales de la police à Bidjebara en Jammu-et-Cachemire. L’attaque a fait un mort et un blessé selon la police indienne, qui a envoyé des renforts dans le secteur.

En Tunisie dans les environs de Kasserine, où l’État islamique est actif depuis plusieurs années et a organisé des camps d’entraînement aux confins de la Tunisie, de l’Algérie et de la Libye, la police tunisienne a neutralisé dans le village de Khassi el Farid ce 5 avril deux combattants de l’EI du groupe Jund al Khiljafa, affillié à l’EI dans le secteur.

Le 30 mars, des sources proches du gouvernement syrien ont affirmé qu’une cellule terroriste de la Brigade Davud, affiliée à l’EI, était active à Sarmin, près de la ville d’Idlib – et à quelques kilomètres seulement des positions des forces gouvernementales à Saraqib. Le même jour, dans le nord-ouest de la Syrie sous contrôle turc, une manifestation a eu lieu à Tell Abyad contre l’EI après que des tags à la gloire de l’organisation terroriste ont été découverts un peu partout en ville. Le même jour, une mutinerie de combattants de l’EI a eu lieu dans la prison d’As Sina, dans la zone sous contrôle kurde ; de quatre à quinze selon les sources ont réussi à fuir la veille et n’ont pas été retrouvés.

Dans l’Irak voisin, le 2 mars, le nombre de combattants de l’EI était estimé entre 2 000 et 5 000 hommes dans le désert, à cheval avec la Syrie voisine – surtout la zone sous contrôle nominal des Kurdes, au nord-est, où les attaques et embuscades de l’EI se multiplient depuis début 2019. Selon des sources proches du ministère de la Défense irakien, le pays possède plusieurs zones de plus de 40 km² où il y a une « absence de sécurité » liée à l’EI.

En Russie, plusieurs projets d’attentats ont été déjoués début avril. Le 4, les forces spéciales ont neutralisé à Mourmansk – ville située au nord de la partie européenne du pays qui abrite aussi d’importantes bases militaires – un homme équipé d’une arme de poing et d’explosifs qui prévoyait de commettre un attentat. Le 3 avril, un islamiste a été neutralisé et un autre arrêté à Stavropol – eux aussi préparaient des attentats. Un autre a été déjoué dans la région pétrolière de Khanty-Mansiisk – trois islamistes du groupe terroriste Imarat Kavkaz s’apprêtaient à faire sauter un centre commercial.

Louis-Benoît Greffe

Photo : DR
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