« Loin des grandes théories » gauchistes… Jean-Jacques Goldman chante aussi pour les policiers

Le chanteur populaire n’a oublié personne : dans sa reprise qui a fait le buzz sur You Tube (550 000 vues), il remercie bien sûr le personnel soignant, en première ligne contre le coronavirus, mais aussi tous les professionnels qui assurent les arrières. Et parmi eux les forces de l’ordre, dont la tâche est particulièrement difficile en ce moment.

Le renfort d’un chanteur populaire n’est pas de trop

Sans masque, en allant au-devant de groupes parfois hostiles, au contact direct des postillons et des crachats, les policiers ont du mal à faire respecter le confinement.

Les policiers et gendarmes ont toujours eu le sale boulot impopulaire de faire respecter les règles. Comme dit Louis de Funès dans le Gendarme de Saint Tropez, « le gendarme est à la nation ce que le chien de berger est au troupeau. Il faut souvent aboyer, parfois mordre, mais toujours se faire craindre ».

Mais aujourd’hui une hostilité systématique à leur égard est développée dans les milieux gauchistes et décolonialistes, avec comme slogan : la police est raciste. Un refrain qu’on entend depuis les années 70…

Derrière la chanson de Jean-Jacques Goldman, un secret biographique

Dans les années 70, la famille de Jean-Jacques Goldman a été au centre d’une retentissante affaire judiciaire et médiatique. Plus particulièrement son demi-frère aîné, Pierre Goldman.

Né en juin 1944, juste avant la Libération, d’un père et d’une mère d’origine juive polonaise et tous deux combattants de la Résistance communiste, Pierre, fidèle à la tradition familiale, s’engage politiquement à la fin de son adolescence. Etudiant, il est un militant actif de l’organisation communiste de la Sorbonne et lutte à l’occasion contre les « fascistes » (les étudiants de droite qui défendent le Viet Nam libre). En 1968, il part combattre dans la guérilla vénézuélienne. En 1969, il revient en France et à la manière de Robin des Bois commet des braquages contre le « grand capital » (des petits commerces, dont une pharmacie). Il est arrêté suite à une dénonciation anonyme. L’enquête de la police lui attribue alors le meurtre de 2 pharmaciennes qui avaient été braquées à la même époque. En l’absence de preuves matérielles, alors qu’il clame son innocence, il est condamné à la prison à vie.

Pour la gauche unie, ses journalistes, ses intellectuels, ses artistes (Maxime Le Forestier), ses avocats, ses dirigeants politiques (François Mitterrand), Pierre Goldman est innocent du meurtre des deux pharmaciennes. Il est victime de son origine, d’une police et d’une justice racistes et restées pétainistes. L’affaire Goldman serait une deuxième affaire Dreyfus. Après une mobilisation qui fait plier les institutions, Pierre Goldman est innocenté et libéré. Il devient journaliste à Libération, mais est assassiné froidement par une organisation terroriste d’extrême-droite infiltrée dans la police, « Honneur de la police ».

50 ans après, l’affaire Pierre Goldman reste d’actualité : portrait d’un « antifa » des années 60

D’autres versions de l’affaire Goldman ont depuis été élaborées, à partir d’éléments troublants et d’une meilleure connaissance de la personnalité de Pierre Goldman.

C’était un ado et grand ado à part, tourmenté, privé de sa mère jeune (elle est partie volontairement construire la Pologne communiste, tandis que son père se remarie) ; il fera un séjour en hôpital psychiatrique (comme Jules Vallès un siècle plus tôt). Sa référence constante à la Résistance a quelque chose d’obsessionnel, comme si l’épopée lui permettait d’échapper à une réalité trop grise ; il raconte dans ses mémoires que ses parents cachaient dans sa poussette des tracts et des armes pour les transporter à la barbe des Allemands : vu sa date de naissance, cela ressemble fort à une légende familiale. Il n’est pas poussé vers la gauche radicale par générosité sociale. C’est plutôt une manière de vivre une aventure, et même d’exprimer ses pulsions violentes de façon légitime. Dans les années 60, il aurait ainsi fait partie des « étudiants katangais » : c’étaient les plus violents et les plus incontrôlables des gauchistes parisiens, les ancêtres des « antifas » et « black-blocks » d’aujourd’hui. Son équipée au Vénézuela s’est mal passée (la vie en maquis est trop spartiate pour ce fêtard), il revient en France en 1969, sans perspective. Pour ses anciens copains gauchistes, il est une surtout une gêne car il ne cesse leur « taper » de l’argent.

L’affaire des deux pharmaciennes conservent des zones d’ombre, de même que la ligne de défense de Pierre Goldman, ou encore son assassinat. Dans la théorie la plus « romanesque », Pierre Goldman aurait lui-même orchestré son assassinat, pour rester fidèle au personnage qu’il s’était créé. C’est du moins ce qu’évoque cet épisode de « Faites entrer l’accusé ».

https://www.youtube.com/watch?v=Z0Mf6FTgohM

Jean-Jacques Goldman a sa vérité sur l’affaire Pierre Goldman

Cette affaire a été un cataclysme pour le futur chanteur. Il évoque son frère dans une chanson de 1984, « Ton autre chemin ». Plein d’affection pour son frère disparu, il s’interroge aussi sur le mystère de sa personnalité. Un passage de la chanson semble évoquer une vérité différente de celle qui a été retenue par la justice, quand elle a relaxé Pierre Goldman :

« Et puis la vérité
Celle qu’on suppose
Celle qu’on cache
Celle qu’on chuchote
Celle qui dérange
Celle qu’on élude
Ton autre chemin
Ton autre chemin
 »

Jean-Jacques Goldman a voulu suivre un autre chemin que son frère : il refuse « les grandes théories » qui masquent le réel et peuvent être destructrices. Il préfère regarder le comportement concret des individus, plutôt que leur étiquette sociale. Même s’ils sont policiers.

Enora

Crédit photo :DR
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