Nantes. Pascal Bolo (PS) affirme détester l’ultra-gauche, mais ne dit pas tout

L’ultra-gauche nantaise est célèbre ; elle appartient à la culture locale. Mais pour qui travaille-t-elle ? Pascal Bolo a oublié de répondre.

Une vaste nébuleuse

La ville de Nantes est habituée aux défilés, manifestations et émeutes : contre le projet de construction de l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes, contre la loi El Khomri, contre les ordonnances d’Emmanuel Macron, pour les Gilets jaunes… Et lorsque l’ultra-gauche intervient, il y a de la casse : violences contre les forces de l’ordre, destruction de mobilier urbain et de vitrines. Qui est à la manœuvre ? « On estime ici qu’un noyau de 200 à 300 personnes est prêt à s’associer à des actions violentes », explique Pascal Bolo, premier adjoint (PS) à la maire de Nantes, pour qui « l’ultra-gauche nantaise est composée de militants d’extrême gauche dont certains se transforment en ultras lorsque l’occasion leur est offerte ». Sans parler de l’appui occasionnel de black blocks capables d’affluer de toute l’Europe… Pour cet élu, fin connaisseur de la gauche locale, le camp de l’extrême-gauche et ultra-gauche découle de plusieurs courants très implantés historiquement. L’anarcho-syndicalisme tient une place prépondérante, notamment avec les trotskistes lambertistes qui dominent l’union départementale CGT-FO. On croise aussi des anciens de la défunte Ligue communiste révolutionnaire aujourd’hui passés au Nouveau Parti anticapitaliste ou au syndicat SUD… La mouvance anarchiste est également présente grâce à la branche active de la Confédération nationale du travail (CNT) ou de groupuscules comme l’Union communiste libertaire (ex-Alternative libertaire) ou la Section carrément anti-Le Pen (Scalp), une mouvance antifasciste du réseau No Pasaran. Sans oublier la « composante zadiste », une nébuleuse qui rassemble des groupuscules anticapitalistes et antipolice, née lors de l’occupation de la ZAD de Notre-Dame-des-Landes et qui perdure aujourd’hui, « encouragée par une gauche plus prompte à dénoncer la police que les casseurs », soupire le premier adjoint (Le Point, 27 février 2020).

Il paraît que tous les milieux de l’ultra-gauche reconnaissent à Nantes ce statut particulier d’eldorado libertaire. « Aujourd’hui, une partie de l’extrême gauche nantaise a pignon sur rue, notamment grâce à des lieux autogérés comme le B 17, un ancien atelier qui accueille le Groupe nantais pour la décroissance, le Théâtre de l’opprimé.e ou encore différents collectifs pour des soirées débats “contre les violences machistes” ou “contre l’agrochimie et son monde”. La frange la plus radicale s’organise aussi autour des squats qui fluctuent au gré des expulsions. » Quant aux cadres de la police, ils pointent « une forme de tolérance culturelle, “pour ne pas dire de complaisance”, vis-à-vis de l’ultra-gauche nantaise » (Le Point, 27 février 2020).

Mais à quoi sert l’ultra-gauche ?

Cette enquête du Point passe à côté de l’essentiel : à quoi sert l’ultra-gauche ? Question qui s’impose lorsqu’on sait que ces activistes ne possèdent pas de projet politique véritable. L’action demeure une fin en soi : on casse pour le plaisir de casser ; créer le chaos fait le bonheur de ces jeunes gens qui éprouvent le besoin de se défouler. Certes ils invoquent la lutte contre le Système… Mais lorsque ces images de violence sont bien mises en valeur au JT de 20 heures, qui est gagnant ? Eux ou bien ceux qui tirent les ficelles du Système ? À coup sûr les seconds. Effrayé, le Français moyen – surtout les retraités – se félicite de pouvoir compter sur la protection du parti de l’Ordre – c’est-à-dire Macron et son gouvernement. Le réflexe légitimiste l’emporte alors sur toute autre considération. Par conséquent, tout gouvernement – de droite ou de gauche – a besoin de l’ultra-gauche pour faire peur au « bourgeois », surtout lorsqu’une période électorale approche.

Une autre observation s’impose : ces milieux marginaux sont habituellement infiltrés par la police. Manipulés, ces activistes sont donc appelés à « rendre service » au pouvoir. Instrumentalisés, ils contribuent à donner une mauvaise image des manifestations dans lesquelles ils se faufilent ; c’est ce qu’on attend d’eux en haut lieu.

Bernard Morvan

Crédit photo : Breizh-info.com
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