Avant la crise du Covid-19, des dizaines de millions de jeunes Africains voyaient l’Europe comme une terre à prendre peuplée de vieillards repus ou épuisés, d’hommes mentalement castrés par les groupes de pression féministes, de femmes n’enfantant plus et dont les dirigeants étaient soumis au diktat de l’émotionnel…
Encore plus merveilleux, au nom des « anciennes vertus chrétiennes devenues folles » (Chesterton), le pape « François » les encourageait à s’introduire par effraction dans cette Europe gavée.
Or, ce n’était pas le jihadisme que fuyaient ces « migrants ». En Afrique, ce dernier provoque en effet trois fois moins de victimes que les morsures des serpents. En 2017, mamba, vipères des sables et autres naja, tuèrent ainsi entre 25 000 et 30 000 malheureux et fait autant d’infirmes (source Slate Afrique). Nous étions donc au terme du processus entre la lente et mortelle asphyxie « soustellienne » de l’intégration et le « radeau de la Méduse » de la laïcité…
Mais voilà que le Covid-19 va peut-être forcer Européens et Africains à revenir au réel grâce au principe de « l’imprévu dans l’histoire » si magnifiquement conceptualisé par Dominique Venner. En effet, comme le Covid-19 va demander d’immenses efforts à l’Europe pour se relever, délaissée, l’Afrique va donc devoir se prendre enfin en main. Cela passera par trois grandes mesures :
1) Régler la question démographique
Avec un taux de croissance de 4 % la population africaine double tous les 18-20 ans.
Résultat, d’ici à 2030, l’Afrique va voir sa population passer de 1,2 milliard à 1,7 milliard, avec plus de 50 millions de naissances par an. Puis, en 2100, avec plus de 3 milliards d’habitants, le continent africain abritera 1/3 de la population mondiale, dont les trois quarts au sud du Sahara. Le principal blocage de toute politique familiale étant à la fois culturel et religieux, les dirigeants africains devront donc prendre des mesures très courageuses. Ou bien l’Afrique mourra.
2) Oublier le mythe du développement
Bloqués par leurs présupposés idéologiques, moraux et religieux, les dirigeants européens qui s’obstinaient à ne pas tenir compte des réalités, avaient choisi de s’accrocher au mythe du « développement », refusant de voir que tout avait déjà été tenté en ce domaine depuis les indépendances. En vain car, en dépit des sommes abyssales déversées pour la faire « démarrer », l’Afrique n’avait cessé de régresser. En effet, comme il fallait une croissance de 7 % par an pour simplement commencer à réduire la pauvreté, le calcul était vite fait, année après année, il manquait donc à l’Afrique entre 3 et 4 % de croissance, ce qui faisait que loin de se combler, la pauvreté africaine augmentait.
D’ailleurs, comment prétendre développer l’Afrique quand les investisseurs s’en détournaient ? Dans son rapport de mai 2018, la BAD (Banque africaine de développement) soulignait ainsi que pour les investissements dans le seul domaine des infrastructures, l’Afrique avait besoin annuellement de 170 milliards de dollars d’IED (Investissements étrangers directs), alors que, au total de tous ses postes, elle n’en reçut que 60 mds. Avec le Covid-19, il y a fort à parier qu’elle en recevra encore moins.
Or, ses besoins seront de plus en plus colossaux car la baisse du prix du pétrole et de presque toutes les matières premières va avoir des conséquences catastrophiques pour des pays tirant entre 75 et 98 % de leurs recettes de ces productions. Phénomène aggravant, quand les cours étaient hauts, ces pays pensèrent que la manne était éternelle et ils dépensèrent alors sans compter. Résultat, aujourd’hui, comme ils se trouvent face à des échéances qui ne sont plus couvertes, les voilà donc contraints de s’endetter pour continuer à financer des projets non soldés ou tout simplement pour acheter la paix sociale et éviter la révolution. À peine sortis de la mortelle spirale de l’endettement des années 1980-1990, ils y ont donc replongé.
3) Répudier la religion démocratique et le credo des « droits de l’homme »
Dans les Afriques où la criante nécessité d’États forts est une évidence, l’impératif démocratique décrété à La Baule par le président François Mitterrand le 20 juin 1990 a eu des conséquences désastreuses. Le multipartisme y a en effet affaibli des États en gestation et réveillé les luttes de pouvoir à travers des partis qui ne sont, dans leur immense majorité, que des habillages ethniques. C’est pourquoi il importe :
– De permettre à l’Afrique de reprendre au plus vite ce « raccourci autoritaire » qui traumatise tant les démocrates européens, mais qui, seul, est susceptible de provoquer une coagulation nationale.
– De répudier le système électoral fondé sur le destructeur principe de « un homme, une voix ». Donnant automatiquement le pouvoir aux peuples les plus nombreux selon la loi de l’ethno-mathématique électorale, il fait donc des membres des ethnies minoritaires des citoyens de seconde zone ; d’où d’incessantes guerres civiles.
– D’encourager les Africains à réfléchir à des modes électoraux communautaires et non plus individuels.
En un mot, les Africains doivent se décoloniser mentalement pour revenir à la culture du chef en laissant celle du consensus mou aux donneurs de leçons européens. Le salut de l’Afrique en dépend. Tout le reste n’est que balivernes européocentrées.
L’Afrique qui va être délaissée par les pays dits « riches » doit donc profiter de l’ « opportunité » du Covid-19 pour lancer cette révolution salvatrice[1].
Bernard Lugan
[1] Voir à ce sujet mes livres Osons dire la vérité à l’Afrique et Mythes et manipulations de l’Histoire africaine.
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