Dans une tribune au Figaro, Gianluca di Feo, rédacteur en chef adjoint du quotidien italien La Repubblica, pointe du doigt les limites de l’Union européenne. Alors que l’un de ses pays membre attend une solidarité effective, en termes d’équipements médicaux, il ne reçoit qu’une campagne de communication : « Nous sommes tous Italiens »… Visiblement, pas tant que ça.
L’abandon de l’Europe
« Des masques, des gants en caoutchouc, des lunettes en plastique, voilà les premières choses que l’Italie a réclamées à l’Europe : le pays a demandé de l’aide pour construire la barrière la plus simple qui soit contre le coronavirus. Mais son appel est resté sans réponse. La France et l’Allemagne ont fermé leurs frontières à ces produits, en interdisant ainsi l’exportation, et nous ont envoyé un signal inquiétant : aucun soutien concret, même pas minime, ne serait arrivé de Bruxelles. »
Et Gianluca di Feo de poursuivre : « Pourquoi l’Europe, avec son colossal appareil administratif et technique, n’a-t-elle rien fait pour prévenir l’épidémie et coordonner le confinement ? Chaque pays a agi à sa guise, avec un seul résultat : ce qui se passe en Italie risque de bientôt se produire en France, en Allemagne et en Espagne. Il aurait fallu prendre des décisions communes, mais il n’y en a pas eu.
Pourquoi l’Europe ne s’est-elle pas chargée de mettre en place un plan de production commun des équipements élémentaires, tels que les masques et les gants, et du matériel qui s’est révélé déterminant en Chine ? Maintenant, tous les pays membres sont désespérément à la recherche d’appareils respiratoires et de vêtements de protection, alors que la puissance industrielle de l’Union européenne aurait pu permettre de produire tous ces stocks vitaux en un mois. Pour l’Italie, pour tout le monde. Mais elle n’a rien fait. »
La conclusion est implacable : « Même dans cette situation, la plus dramatique depuis la naissance de l’Union européenne, l’Europe est apparue étrangère aux problèmes des citoyens : une entité bureaucratique incapable d’interventions concrètes. Il n’y a eu ni solidarité ni supervision. Une triste leçon que l’on n’oubliera pas : une fois l’épidémie terminée, plus rien ne sera comme avant. »
La solidarité de la Chine
En revanche, la Chine a envoyé en Italie une équipe médicale de 9 médecins spécialisés dans le traitement du coronavirus, ainsi que 31 tonnes de matériel sanitaire… Le tout est arrivé le 13 mars dernier à l’aéroport de Fiumicino à Rome. Luigi di Maio, ministre des Affaires étrangères, commentait : « Ceci est ce que nous appelons de la solidarité, et je suis certain qu’il en arrivera d’autre. Nous ne sommes pas seuls, il y a des personnes dans le monde qui veulent aider l’Italie. » (La Repubblica, 13 mars 2020).
Ainsi donc, l’Union européenne révèlerait-elle au grand jour son vrai visage : une union purement économique, construite pour que chacun puisse défendre au mieux ses propres intérêts ? Tant que tout le monde y trouve son compte, l’édifice tient à peu près, à grands coups de lobbying et de déréglementation. Mais quand il s’agit d’adopter une véritable posture politique, qui seule est capable de protéger les hommes et les femmes qui lui sont soumis, il n’y a plus personne… Ironie de l’Histoire, c’est un pays communiste qui répond au besoin de solidarité d’un pays abandonné par l’Europe libérale. À méditer.
Isabelle Lainé
Photo : Pixabay
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