A peine ouvert, et déjà cassé. C’est la mésaventure qui s’est produite au Croquebedaine, le commerce qui a pris la suite du 21, à l’angle de la ligne 3 du tramway et de la rue Jean Jaurès. Dans le courant de la nuit après la soirée du 22 février, une grosse pierre a traversé l’une des vitres, et le fond de caisse – plus de 1000 euros – a été volé. Désormais, l’établissement laissera le minimum en caisse et s’équipera de caméras et d’une alarme.
Dans la même nuit, trois autres commerces ont été visés dont un vendeur de coques de téléphone. Si l’omerta règne sur l’ampleur des commerces qui ont été cassés – majoritairement des cafés et restaurants – l’activisme des commerciaux des sociétés de sécurisation dans le centre-ville et le planning plus que chargé des installateurs d’alarmes ne laisse aucun doute. « On en est à plus de 120 commerces cassés depuis fin octobre », se risque un commerçant du centre-ville. « Il peut y en avoir jusqu’à cinq voire dix par nuit, le week-end, surtout par temps pluvieux », explique un autre.
Certains établissements le sont de façon récurrente – rue Marceau, l’un d’eux a été visité deux fois, place Talensac, un autre, trois fois en un mois. « Désormais, je ne laisse vraiment plus rien, même pas de titres restaurants ou de monnaie, même pas un paquet de clopes, rien », précise le patron.
Visé à deux reprises – le voleur a réussi à rentrer une fois, fin décembre, puis est revenu, sans succès – le Bon Pasteur sur la place du même nom s’est équipé. Caméras braquées sur l’entrée et les fenêtres, caméra avec détecteur de présence, une autre dans la réserve, une alarme, des autocollants bien visibles… en tout 2000 € d’installation. « J’ai mis les autocollants bien visibles près des endroits où le voleur a forcé sur mes portes, où il reste des traces », explique le patron.
« Même un autocollant de l’alarme, ça les dissuade », explique un cafetier dont l’établissement frappé à plusieurs reprises. « Même si le mieux, c’est de mettre des rideaux de fer, ou au moins des caméras bien visibles, une alarme sonore, renforcer les vitres. Quoique s’ils veulent entrer, comme pour les tabacs, ils rentreront quand même », résume un autre cafetier.
« On peut se demander pourquoi quand on en chope, ils n’ont généralement plus rien sur eux, ni alcool s’ils en piquent, ni billets en grande quantité », s’étonne un policier. « Il y a certainement des réseaux derrière qui récupèrent le butin, comme pour les voleurs à la roulotte qui n’ont presque jamais rien sur eux ». Un restaurateur fustige, lui, l’inaction de la police : « ils sont venus deux fois, je les ai sur mes caméras, cagoulés gantés, ils n’en ont rien à faire ».
Réponse du berger à la bergère : « cagoulés et gantés, qu’est-ce que ça nous avance ? De toute façon il y a plusieurs bandes, les juges s’en foutent, les avocats sont en grève, si on les chope ils sont relâchés direct, surtout s’ils sont mineurs ou ils se disent mineurs ! Puisque le laxisme judiciaire c’est une institution ici, mieux que l’Eléphant et les machines de l’ile, que la mairesse s’en fiche, nous on fait la grève du zèle ».
Un cafetier nantais résume : « si vous avez connu la ville jeune, ou même avant 2014 et l’arrivée de Johanna, quand ça a commencé à partir en vrille, et que vous revenez ouvrir une affaire ici ou travailler, surtout si vous êtes une femme, sachez le : la ville que vous avez connu, calme, sécuritaire, ouverte, c’est fini. Nantes aujourd’hui n’a plus rien à voir avec la ville que nous avions en 2014 encore, et quand on a une affaire, c’est franchement l’enfer, on ne se sent pas soutenus par les pouvoirs publics ; tout ce qui les intéresse, c’est de nous taxer ».
Louis Moulin
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