Le collectif Lieux Communs qui se présente comme un « site indépendant et ordinaire pour une auto-transformation radicale de la société » vient de réaliser un énorme travail aboutissant à la publication d’une cartographie de la galaxie des Frères Musulmans en France.
Une carte, du concret donc, divulguée alors que le président de la République, Emmanuel Macron, tenait un discours sur le « séparatisme islamisme », que beaucoup d’opposants ont jugé stérile, et vide de toute proposition concrète pour réellement combattre l’islamisme en France.
Cette cartographie vise deux objectifs explique Lieux Communs :
- Rendre visible l’ensemble des personnalités, des structures et des secteurs d’activités liés à différents degrés à la confrérie des Frères Musulmans sur notre territoire, et donner des informations précises sur chacun d’eux.
Au centre, les responsables institutionnels, les « Musulmans de France » (ex-UOIF, en blanc) et théologiques, le Conseil Théologique (CTMF en gris). De part et d’autres du grand cercle, les structures et personnalités liées à l’UOIF puis les alliés (partenaires directs ou indirects) et les soutiens (les fréristes non directement affiliés à l’UOIF y forment des sous-groupes spécifiques).
Les domaines d’activités sont désignés en secteurs de couleur ; « Éducation et Formation » (en vert), « Théologie, culte et prédication » (en jaune) et « Société » (en rouge et bleu).
Lors de l’activation de la cartographie, un simple clic sur une personnalité ou une structure ouvre une fenêtre descriptive justifiant sa présence sur la cartographie, apportant des précisions sur son profil et son activité.
- Mettre en évidence l’imbrication de toute cette galaxie avec l’Association des Musulmans pour un Islam de France (AMIF) qui tend à favoriser le communautarisme et le séparatisme.
C’est cette association créée en avril 2019 que le gouvernement risque de charger officiellement de représenter les musulmans en France. Les personnalités marquées en rouge en sont membres et ont pour président Hakim El Karoui et Tareq Oubrou.
Qui sont les frères musulmans ?
La confrérie des Frères Musulmans
La confrérie des Frères musulmans, créée en 1928 en Égypte, constitue l’un des deux grands courants de l’islamisme mondial, avec le salafisme. L’objectif de cette mouvance est l’hégémonie islamique par l’infiltration des sociétés (entrisme dans les partis politiques, les syndicats et les associations, propagande dans les universités, etc.), la construction de mosquées et la formation des jeunes dans des écoles confessionnelles. Il ne s’agit pas d’une organisation centralisée, mais d’un réseau de groupes et de personnes qui partagent les mêmes objectifs et les mêmes références. Son idéologie s’appuie sur la notion d’« islam du juste milieu », elle se donne une image pacifiste, voire pacificatrice. Dans le cadre des sociétés occidentales, la stratégie frériste repose sur l’adaptabilité, l’intégration et la multiplicité des positions (de l’obligation du port du voile à la non-visibilité des marqueurs religieux).
Cependant, les Frères musulmans n’excluent pas l’usage de la violence suivant le contexte (exemple du Hamas en Palestine).
En France l’UOIF (renommée « Musulmans de France »)
En France, la mouvance frériste est principalement représentée par l’Union des Organisations Islamiques de France (UOIF). Elle décide en 2017 de se renommer « Musulmans de France » (MF) par pur calcul politique : nous conservons donc l’appellation originelle. Elle est également active à travers d’autres mouvements, comme le réseau tissé autour de Tariq Ramadan, ou l’association Participation et Spiritualité Musulmane, antenne du mouvement marocain Al Adl wal-Ihssane. Le réseau associatif lié à l’islam turc (Milli Görüs, DITIB), fortement influencé par la doctrine des Frères musulmans, ne figure pas dans cette cartographie.
L’UOIF (MF) est fondée en 1983 par des étudiants tunisiens militants du MTI (futur parti politique islamiste Ennahda), quelques réfugiés du Proche-Orient (Syrie, Liban, Irak) et des associations islamiques locales. Elle s’impose dans le paysage musulman français à partir de l’affaire du voile à Creil en 1989. Sa notoriété conduit les gouvernements successifs à l’intégrer dans les instances représentatives de l’islam en France.
En 1990, l’UOIF (MF) contribue à la fondation d’une instance européenne : la Fédération des Organisations Islamiques Européennes (FOIE), qui dispose de filiales spécialisées, comme le Conseil Européen de la Fatwa et de la Recherche (CEFR) ou le Forum Européen des Organisations de Jeunes et Etudiants Musulmans (FEMYSO). Plusieurs cadres de l’UOIF sont membres de l’Union Internationale des Savants Musulmans (UISM), basée au Qatar et longtemps dirigée, comme le CEFR, par le principal théologien des Frères musulmans, Youssef Al-Qaradawi.
En 2015, l’UOIF (MF) annonce la création du Conseil Théologique Musulman de France (CTMF), chargé de donner des avis théologiques (fatwas) adaptés aux musulmans vivant dans le contexte républicain français.
L’UOIF ((MF)) regroupe aujourd’hui environ 250 associations gérant des lieux de culte, mosquées ou salles de prières, parfois rassemblées en fédérations locales ou régionales.
Cette organisation frériste dispose d’associations satellites spécialisées dans des domaines diversifiés : santé, consommation, finance, jeunesse, femmes, éducation et université, justice, humanitaire, etc. Elle investit le champ socio-politique (dialogue interreligieux, défense des droits de l’homme, prévention de la radicalisation, etc.) en s’alliant avec des structures de la société civile, voire des instances gouvernementales ou locales.
Le concept d’Islam DE France est porté par l’UOIF depuis la fin des années 1980.
Création de l’AMIF en 2019
En avril 2019, l’Association Musulmane pour l’Islam de France (AMIF) est créée par Hakim El Karoui, ancien banquier d’affaires et auteur de plusieurs rapports sur l’islam en France. L’association est constituée de deux structures : l’une relève de la loi de 1901 (présidée par Hakim El Karoui), l’autre de la loi de 1905, dirigée par Tareq Oubrou et Mohamed Bajrafil, particulièrement engagés dans l’islam frériste.
Le but de l’AMIF est d’assurer, par un prélèvement sur l’économie islamique (halal, pèlerinage, services funéraires), un financement indépendant destiné à « la formation des imams, la construction des mosquées, la prévention de la radicalisation, et la lutte contre le racisme, en particulier antimusulman ».
La plupart des cadres de l’AMIF sont des membres, des anciens membres ou des proches de l’UOIF. Leur objectif est d’obtenir, pas ce biais, la mainmise sur la représentation des citoyens musulmans en France. L’association prévoit la création d’un Conseil théologique national, autorité idéologique et juridique. Cette instance, déclinée au niveau départemental, enfermerait les musulmans de France dans un statut séparé du reste de la Nation.
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