En Irlande se déroulaient les élections législatives, samedi 8 février. Des élections importantes, durant lesquelles les nationalistes et républicains du Sinn Féin se sont imposés, ce qui constitue un résultat historique pour cette formation politique traditionnellement considérée, jusqu’aux accords du Vendredi saint, comme étant la branche politique de l’IRA (lors de la soirée électorale, on a d’ailleurs vu les principaux dirigeants du SF reprendre la chanson des Wolfe Tones, « Come out Ye Black and Tans »).
Le parti est arrivé en tête (premier choix) des électeurs avec 24,5 % – les électeurs irlandais étant invités lors de ces élections à classer les candidats par ordre de préférence sur leur bulletin de vote. Derrière suivent le Fianna Fail et le Fine Gael (centristes) avec 22,2 et 20,9 %, ce qui constitue un revers sans précédent pour ces deux formations qui étaient habituées jusqu’ici à diriger le pays.
Victorieux mais pas majoritaire
Mais le succès du Sinn Féin ne fera pas de lui le parti majoritaire à l’Assemblée d’Irlande (le Dail) qui compte 160 sièges. En effet, le parti dirigé par Mary Lou Mcdonald n’avait présenté que 42 candidats (et 37 devraient être élus), ce qui lui donnera une minorité à l’Assemblée. La quatrième force politique du pays est constituée des Indépendants, qui totalisent 12 % des préférences principales des électeurs, devant les Verts (7 %) (voir ici les résultats qui évoluent encore). Pour disposer d’une majorité absolue au Dail, 80 sièges sont nécessaires et aucun des principaux partis n’atteindra ce score, il faudra donc une alliance. Le Fianna Fail, parti de centre-droit, détient un siège de plus (38). Quant au Fine Gael, l’autre grand parti de centre-droit, il n’en compte que 35, ce qui pourrait fragiliser le Premier ministre sortant Leo Varadkar, qui en est membre.
On peut donc très bien se retrouver avec une alliance entre le Fine Gael et le Fianna Fail puisque ces deux partis devraient terminer largement majoritaires en nombre de voix et de sièges, sachant qu’ils ont annoncé durant la campagne ne pas vouloir s’allier avec le SF, qui lui veut mettre en place une grande alliance de gauche et d’extrême gauche (avec les Verts et les communistes). Les dernières déclarations de leaders du Fianna Fail laissent toutefois entendre qu’un gouvernement d’union avec le SF serait envisageable…
Une politique sociale désastreuse
Ce qui a amené à la gifle reçue par les deux principaux partis – qui seront tout de même majoritaires en nombre de sièges à l’Assemblée, paradoxe de ces élections – ce sont avant tout la politique sociale désastreuse menée depuis plusieurs années en Irlande. Les services de santé sont de plus en plus défaillants. Le nombre de SDF n’a jamais été aussi important en raison de loyers prohibitifs, de manque de logements sociaux. Les prix des logements sont dingues. Le tout dans un pays dont les dirigeants, Leo Varadkar en tête, ne cessent de vanter la croissance et le dynamisme économique, créant ainsi le sentiment d’une société qui avance à deux ou trois vitesses…
la question de la réunification de l’Irlande
Parmi les propositions du Sinn Féin, on retrouvait d’ailleurs parmi les principales mesures la construction de 100 000 logements sociaux d’ici à 2025 et le gel du prix des loyers. Mais aussi, celle, moins débattue à l’occasion de ces élections, de la réunification de l’Irlande. On la retrouve souvent dans les revendications chez les Républicains en Irlande du Nord, moins en Irlande, où les nationalistes ont souvent été accusés d’abandonner le nord.
Avec des sondages indiquant que 57 % des Irlandais sont favorables à la tenue rapide d’un référendum sur la question dans les 5 ans, gageons que cela sera très rapidement un débat qui se tiendra au Parlement irlandais… En attendant, le dépouillement continue, et les tractations entre les partis politiques vont bon train…
YV
Illustration : DR
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