Les pêcheurs français doivent d’ores et déjà faire face aux conséquences du Brexit. Ils se sont ainsi vu interdire l’accès des eaux de Guernesey. La situation devrait toutefois connaître une issue positive aux dires du gouvernement.
Brexit, à Guernesey aussi !
L’entrée en vigueur du Brexit le 1er février dernier a également eu des conséquences loin des caméras et des frasques des députés britanniques au Parlement européen. Et les pêcheurs des côtes de la Manche n’auront pas mis bien longtemps à en goûter l’amère réalité. Depuis cette date, ils n’ont plus le droit d’accéder aux zones de pêche autour des îles anglo-normandes de Guernesey, Sercq et Aurigny. Une bande nautique des « 6-12 milles » prisée des unités de pêche bretonnes et normandes. Au total, ce sont une cinquantaine de chalutiers et de caseyeurs normands ainsi qu’une centaine de bretons qui se retrouvent privés d’accès à ces zones britanniques. Et le manque à gagner est conséquent puisque pas moins de 500 tonnes de poissons et crustacés sont pêchées chaque année par les Normands autour de Guernesey selon les estimations du Comité régional des pêches de Normandie.
Pour certains chalutiers du Cotentin, les volumes pêchés dans les eaux du Royaume-uni représentent jusqu’à 80 % de l’activité en hiver et 40 % en moyenne sur l’année. À savoir par ailleurs que les eaux de Guernesey sont régies par un baillage relevant de la couronne britannique et non du gouvernement britannique. De quoi complexifier encore davantage l’équation…
Quelle réaction du gouvernement français ?
Face à l’inquiétude dans les ports de pêche, la secrétaire d’État chargée des affaires étrangères, Amélie de Montchalin, a annoncé que « nous ne négocierons pas d’accord de libre-échange avec les Britanniques sans en trouver un pour la pêche permettant l’accès aux eaux britanniques pour nos pêcheurs ».
Tandis qu’elle a effectué une visite d’une entreprise de mareyage près de Caen le 4 février, Amélie de Montchalin s’est voulue rassurante pour les patrons-pêcheurs locaux : « Je pense que d’ici à la fin de la semaine, si on travaille comme on se l’est dit, les choses vont rentrer dans l’ordre ». Et de poursuivre : « On a un accord diplomatique. On a reçu une lettre formelle de sa Majesté la couronne (…) On a un accord politique (…) Maintenant, on est dans la mise en œuvre. On va par exemple demander des immatriculations internationales à des pêcheurs qui parfois n’en ont pas. Il y a des petites démarches administratives ».
Guernesey, symbole d’un paradoxe
Mêmes échos chez le ministre de l’Agriculture et de la Pêche, Didier Guillaume, qui indiquait à l’Assemblée nationale le 4 février qu’une solution « devrait être trouvée dans les heures qui viennent ». De son côté, la Commission européenne a prévalidé une liste de navires désirant poursuivre leurs activités dans les eaux de Guernesey. Et ce, sans que l’île ne prélève d’argent et sans frais, aux dires de la secrétaire d’État chargée des affaires étrangères.
Si la colère était bien présente chez les pêcheurs normands et bretons ces derniers jours, certains menaçant notamment d’interdire l’accès aux pêcheurs de Guernesey aux ports du Cotentin, la situation met par ailleurs en exergue un paradoxe notable : tandis que la profession a souvent tendance à fustiger l’Union européenne pour ses diverses réglementations souvent jugées inégales (et donc injustes) entre les États, force est de constater qu’un souverainisme exacerbé en matière de gestion des eaux territoriales n’a pas grand intérêt. Et risque de dégrader considérablement les relations entre des marins britanniques et français qui cohabitaient (plus ou moins) paisiblement jusqu’à présent.
AK
Crédit photos : Wikimedia Commons (CC BY-SA 3.0/Myrabella)
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