En politique, il se trouve toujours des personnalités qui souhaitent laisser une empreinte, aussi minime ou symbolique (mais coûteuse) soit-elle. Il en fût ainsi il y a 30 ans, le 27 février 1990, lorsque sous la direction de Charles Josselin, patron du conseil général des Côtes du Nord à l’époque, le département se transforma en Côtes d’Armor. Retour sur un projet plus ancien.
Le voeu du conseil municipal de Saint-Brieuc
Dans sa séance du 10 juillet 1959, le Conseil municipal de Saint-Brieuc a émis un vœu tendant à substituer le nom du département de « Côtes-d’Armor » au nom de « Côtes-du-Nord ».
Ce vœu est le suivant :
Considérant que le nom du département des Côtes-du-Nord est manifestement impropre du point de vue géographique, ce département étant situé à l’ouest de la France, Considérant que cette appellation est incorrecte, le mot « Nord » évoquant le froid, alors que le climat de la Bretagne, essentiellement doux et maritime, n’a rien de commun avec ce qu’il est convenu d’appeler un « climat nordique », Considérant que le nom « Côtes-du-Nord » constitue ainsi pour le département un élément nettement défavorable du point de vue touristique qui contrarie injustement les efforts de propagande des Syndicats d’Initiative, Considérant que le Tourisme représente immédiatement après l’Agriculture, la principale ressource du département, et que le préjudice qui lui est causé, spécialement auprès des étrangers, est considérable, Considérant que plusieurs autres départements qui estimaient souvent avec moins de raisons que nous que le nom de leur département leur causait un certain préjudice, en ont obtenu ces dernières années la modification (Charente-Maritime, Seine-Maritime, Loire-Atlantique),
DEMANDE avec insistance :
– Que le nom du département des Côtes-du-Nord soit modifié ;
– Que le nom adopté soit département des « Côtes-d’Armor ».
Cette dénomination ne paraît pas devoir soulever d’objections dans les autres départements bretons dont les noms répondent à des appellations logiques. Par ailleurs, « Côtes-d’Armor » serait parfaitement justifié du point de vue historique et géographique, le mot « Armor » y conservant la double signification de pays de la Mer et d’Armorique, nom ancien de la péninsule bretonne.
Enfin, le nom de « Côtes-d’Armor » ne modifierait pas le numéro minéralogique du département et ne comporterait de ce fait aucune difficulté administrative.
Le conseil général patiente entre 1962 et 1990
Au début des années 1950, le nom Côtes-du-Nord étant jugé dévalorisant et incorrect géographiquement, le délégué hôtelier du département propose un premier référendum demandant aux personnalités des Côtes-du-Nord de donner un avis sur un changement de nom et sur les différentes propositions alors émises, parmi lesquelles Penthièvre, Côtes-d’Armor, Haute-Bretagne (ce nom sera également souhaité par le département d’Ille-et-Vilaine 50 ans plus tard) ou encore Rance et Trégor. En 1962 le Conseil Général émet un avis favorable pour Côtes-d’Armor, signifiant « côtes du pays de la mer » en français-breton.
En février 1990 donc, le département change officiellement de nom, projet appuyé par 251 communes, après de trente ans après l’avis favorable du conseil général.
Ce changement d’appellation (mais aussi de logo, de communication) fût un processus complexe d’action publique porté par les élus et les professionnels du tourisme. L’objectif ? La relance de l’attractivité du Département, de son développement touristique, mais aussi la volonté affichée par les élus de « rendre aux Costarmoricains » leur identité qui aurait été « usurpée » (Lire ici un article à ce sujet qui explique parfaitement l’enjeu de l’époque).
Depuis 30 ans, le département se prénomme donc Côtes d’Armor, avec des évolutions graphiques successives en matière de logo et de communication. Difficile toutefois de chiffrer l’impact financier de ces changements, comparés aux coûts …
Un coût dont les Bretons, comme les Français, se passeraient possiblement bien ; plusieurs sondages ont en effet montré ces dernières années que les Français ne verraient pas d’inconvénient à une suppression pure et simple des Départements, fusionnés par le haut au niveau de la Région, par le bas au niveau des communes, ou des communautés de communes…des économies à faire, mais également un héritage jacobin à liquider !
YV
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