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Marion Maréchal (ISSEP) : « En refusant de réformer de fond en comble son système éducatif, la France se condamne à passer de sujet à objet de l’Histoire » [Interview]

À la suite de la sortie du classement PISA, et de la mauvaise position de la France en son sein (ce qui n’est pas vraiment une surprise), nous poursuivons notre tour d’horizon de personnalités, de collectivités, d’organismes, qui œuvrent d’une façon ou d’une autre à une réforme de l’Éducation nationale, du système scolaire et éducatif en France. L’Institut des sciences sociales, économiques et politiques (ISSEP) est une école d’enseignement supérieur fondée en 2018. L’établissement, dirigé par Marion Maréchal, dispense à la fois un enseignement de type-école de commerce, des sciences politiques et de la culture générale.

Une école privée donc, pour des études supérieures post-licence, une école qui se veut libre intellectuellement, loin du quasi-stalinisme et des atteintes à la liberté de pensée qui règnent dans beaucoup d’universités françaises aux mains de minorités d’extrême gauche.

Nous avons interrogé, pour un premier bilan, mais aussi pour un autre regard sur le système éducatif français, Marion Maréchal, qui s’est lancée depuis quelques années maintenant, loin des tourments de la vie politique française, dans cette aventure éducative et entrepreneuriale.

Breizh-info.com : Tout d’abord, quel bilan tirez-vous de l’ISSEP, des débuts de cette école que vous avez lancée ?

Marion Maréchal : L’ISSEP est une jeune école qui tient ses promesses. Après seulement un an et demi d’existence, nous avons déjà délivré plus de 900 heures de cours, accueilli près de 130 étudiants formés ou en cours de formation, organisé une quinzaine de conférences, associé une cinquantaine d’intervenants issus de la fonction publique, de l’université, de l’état-major militaire, du journalisme, de l’entreprise, etc. Nous avons ouvert deux classes de magistère en sélectionnant des étudiants motivés et de bon niveau qui sortiront encore meilleurs. Faut-il rappeler que Sciences-po débuta avec 70 étudiants ? Notre prochain et premier objectif maintenant est que nos étudiants réussissent leur insertion professionnelle à la fin de cette année scolaire. Je suis très optimiste de ce point de vue, car la plupart ont d’ores et déjà trouvé des stages de qualité dans le secteur privé ou politique.

Breizh-info.com : Que vous inspire le classement PISA, qui vient d’être révélé, et qui montre que la France est à peine dans la moyenne, loin derrière les pays asiatiques, ce qui fait tache lorsqu’on se targue d’être une puissance mondiale ?

Marion Maréchal : La France poursuit sa chute depuis des années dans ce classement sans que cela n’éveille manifestement les consciences politiques. Les décideurs publics continuent de se rassurer en expliquant que « si les élèves ont baissé dans telle ou telle matière, ils ont acquis d’autres compétences ». Tout le monde sait aujourd’hui que baccalauréat ne vaut plus rien, que des consignes sont données pour rehausser artificiellement les notes des élèves qui n’ont pas le niveau requis, mais personne n’a le courage de renoncer à l’artifice des « plus 80 % d’une classe d’âge diplômée » et qu’importe que la première année d’université serve de tri massif a posteriori.
Même les enseignants aujourd’hui sont recrutés à 5 ou 6 de moyenne au concours dans certaines matières tant le nombre de candidats est faible… Comment imaginer former correctement les élèves quand les professeurs eux-mêmes n’ont pour la plupart pas le niveau ?

Ce déni est payé et sera payé très cher par les Français, car l’éducation est un investissement d’avenir. Dans un monde globalisé où les puissances émergentes rattrapent leur retard à vitesse grand v, l’excellence éducative est un enjeu de compétitivité. Même avec des moyens financiers réduits, cette supériorité éducative a longtemps fait de la France un acteur majeur dans de nombreux domaines, qu’il s’agisse par exemple de la médecine ou des mathématiques. Aujourd’hui non seulement la Chine, les États-Unis, l’Inde, pour ne citer qu’eux, mettent des moyens bien supérieurs aux nôtres dans la recherche, mais leurs nationaux sont souvent aussi bien formés que les nôtres voire mieux dans certains domaines.
En renonçant à réformer de fond en comble son système éducatif, la France se condamne à passer de sujet à objet de l’Histoire, à la merci des autres Nations.

Breizh-info.com : N’est-il pas finalement assez triste que dans un pays comme la France, les seules possibilités d’échapper à la médiocrité imposée par l’Éducation nationale soient de s’offrir des écoles privées (et pourquoi pas la vôtre), qui ne sont pas accessibles à tous les budgets ? N’est-ce pas finalement générateur de nouvelles inégalités ?

Marion Maréchal : J’en suis d’autant plus malheureuse que je suis moi-même un produit de l’école publique. J’ai suivi la grande majorité de ma scolarité à l’école publique jusqu’à l’université pour trois ans seulement en école privée. Malheureusement aujourd’hui, l’école ne répond plus à un fonctionnement méritocratique et ne permet plus l’égalité des chances dont elle fait pourtant son leitmotiv. Au contraire, l’école publique entraine la plupart du temps une assignation à résidence sociale. Il est absolument insupportable de constater que le nombre de fils d’ouvriers n’ait jamais été aussi faible dans nos grandes écoles. Et le destin des enfants est le plus souvent fixé dès leurs plus jeunes années. Aujourd’hui, 20 % des élèves arrivent en 6e sans savoir lire et écrire correctement, ces derniers ne rattraperont vraisemblablement jamais leur retard.

Il en est de même en mathématique où le niveau a chuté de manière vertigineuse depuis 1987 selon l’agence statistique du ministère de l’Éducation. Le phénomène migratoire aggrave encore la situation avec la multiplication de classes accueillant des élèves de nationalité étrangère aux cultures parfois très éloignées et maitrisant peu ou mal le français. Pire encore, l’école publique est devenue, depuis des décennies, le bras armée du progressisme. L’idéologie y joue à plein régime et abreuve les petits Français de repentance et de haine de soi entre colonisation, esclavage et collaboration étudiés sans nuance. Elle organise leur amnésie historique en rognant des pans entiers de l’histoire française et en renonçant à un apprentissage chronologique indispensable à sa bonne assimilation. La géographie n’est plus l’étude des territoires, des climats, des fleuves, mais un programme tourné autour du développement durable et du commerce équitable. Le duo histoire-géographie est ainsi mis à mal, car il n’y a pas de bonne compréhension historique sans maitrise de la dimension géographique.

L’« ouverture » est devenue l’obsession centrale de l’éducation des enfants au détriment de l’acquisition des savoirs.

Les heures consacrées aux français ont été réduites d’années en années, notamment en primaire, pour intégrer des matières connexes au détriment de la bonne maitrise de la langue.
SI il est bien sûr essentiel de préserver l’école publique et d’en faire un outil d’excellence, je crois qu’il est aussi indispensable de laisser se développer le système privé au maximum afin que chaque enfant puisse trouver une voie qui lui soit pédagogiquement adaptée. Il est utopique d’imaginer qu’un seul système puisse répondre aux besoins de chaque enfant.
Quitte à mettre en place un système fiscal ou d’aide plus adéquat pour ne pas creuser les inégalités scolaires du fait de la situation économique et que chaque parent puisse choisir le meilleur pour son enfant.

Breizh-info.com :  En matière de scolarité justement, et avec votre petite expérience désormais, que préconiseriez vous (principales propositions) si vous deviez appliquer les méthodes d’enseignement de l’ISSEP à toute l’Éducation nationale, dès les 6 ans de nos enfants ?

Marion Maréchal : L’’ISSEP est une école supérieure qui intervient seulement en fin de cursus quand tout le cadre scolaire mériterait d’être revu depuis le CP. À notre niveau, nous recherchons principalement à doter nos étudiants de compétences professionnelles et à les armer intellectuellement en leur transmettant une solide culture générale et historique, à développer leur esprit critique et leur capacité de raisonnement, à les ouvrir véritablement à tous les points de vue. D’autant plus qu’aujourd’hui les réseaux sociaux nous enferment dans un couloir idéologique par des publications sélectionnées en fonction de nos « like » et de nos centres d’intérêt.
Ce n’est pas une mince affaire quand on sait qu’aujourd’hui le temps moyen d’attention des milleniums (génération née autour des années 2000) est de 9 secondes soit une seconde de plus que le poisson rouge… (cf l’ouvrage « La civilisation du poisson rouge » de Robert Patino) du fait de l’omniprésence des écrans ! Une donnée terrifiante qui manifestement ne freine pas la volonté politique de multiplier les écrans dans les salles de classe alors que les effets néfastes des écrans sur les jeunes enfants et la population sont avérés : baisse des capacités cognitives (les générations nées après 2000 sont les premières dont le QI sera inférieur aux précédentes), augmentation de l’anxiété, troubles relationnels, troubles du sommeil, myopie jusqu’au développement de véritables pathologies addictives.

Les éducateurs et enseignants ont un rôle majeur pour armer mentalement les générations à venir et préserver leur intelligence. Les élèves et étudiants doivent apprendre à trier et à comprendre les informations, à lire des textes longs et exigeants, à exercer leur mémoire, y compris par cœur, à pratiquer l’écriture manuscrite (les élèves ne réalisent quasiment plus la dictée de nos jours), à réguler la place du numérique.
Il en va de la survie même de notre démocratie, car il ne peut y avoir de citoyens avisés sans une bonne capacité de compréhension et de mémorisation.

Évidemment il faut également revoir les méthodes pédagogiques, renoncer par exemple à la méthode globale ou semi-globale pour l’apprentissage de la lecture et revenir à la méthode syllabique qui a fait ses preuves et bien sûr revoir le contenu des programmes. Il serait temps également d’accepter que l’apprentissage ne peut pas être que « ludique » et nécessite de l’effort, de l’exercice et de la répétition. Tout ce qu’empêchent aujourd’hui des programmes trop denses dans certaines matières.

Breizh-info.com : Il semblerait que la presse mainstream se délecte à associer l’ISSEP à tout et n’importe quoi, y compris le fait divers glauque impliquant potentiellement un de vos professeurs. Pouvez-vous conclure là dessus une bonne fois pour toutes ? Que vous reproche finalement la presse mainstream ?

Marion Maréchal : Ils ont peur de notre succès. Le développement de notre projet pédagogique serait la porte ouverte à d’autres initiatives éducatives. Ce serait également la démonstration que notre école répond à un besoin, que les modèles dominants sont devenus insatisfaisants, que l’uniformité idéologique, en particulier dans les sciences sociales, n’est plus tolérée. Or le système supérieur aujourd’hui, en particulier dans les filières sociales, est devenu trop souvent sectaire et militant. L’actualité nous en donne régulièrement la preuve.
Au mois de septembre, un étudiant en licence à l’université Lyon II a eu le courage de dénoncer publiquement l’idéologie et le militantisme décomplexés qui gangrènent ses cours de sciences politiques et sociales. Rien ne manquait à l’appel du politiquement correct : obsession de la race et du genre, indigénisme, théories décoloniales, néo-féminisme, immigrationnisme, LGBTQIAA+, prosélytisme islamique. Toutes les matières, de la sociologie à l’histoire des idées en passant par la politique européenne, sont concernées. Sans parler de tous ces professeurs licenciés, mis de côté, dénoncés pour cause de « pensée déviante ».

Pour n’en citer que quelques-uns : Stéphane Dorin, professeur à Limoges, a été exclu de son laboratoire pour avoir dénoncé les théories décoloniales ; Alain Finkielkraut a été copieusement insulté à l’occasion de son invitation à Science Po Paris ; Philippe Soual, docteur en philosophie, s’est vu retirer définitivement son cours à la fac de Toulouse Jean-Jaurès suite à sa participation à l’université d’été de la Manif pour tous, cours qui portait sur le thème : « Qu’est-ce que l’homme ? », Laurent Bouvet, professeur de sciences politiques à l’université de Versailles-Saint-Quentin-en-Yvelines et qui avait dénoncé le port du voile islamique par une dirigeante syndicale de l’UNEF, a été victime d’une virulente campagne d’appel à la haine.

L’ISSEP a un rôle fondamental à jouer de ce point de vue : être un établissement exemplaire qui pratique un véritable pluralisme intellectuel.

Propos recueillis par Yann Vallerie

Crédit photo : DR (photo d’illustration)
[cc] Breiz-info.com, 2019, 
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