Alain Madelin reprend du service. Après avoir quitté ses électeurs bretons avant que ceux-ci ne le quittent, après avoir fait du fric, il entend retrouver « le débat politique et intellectuel ».
Grande mobilisation chez les libéraux : Alain Madelin, 73 ans, quitte le fonds d’investissement (Latour Capital) qu’il avait créé après avoir arrêté la politique en 2007. Il va « retrouver, non sans une certaine gourmandise, le débat politique et intellectuel à un moment où la démocratie libérale elle-même est menacée et contestée » (Le Figaro, mardi 12 novembre 2019). Les choses sont claires : « Moi, je suis un libéral complet : économique, c’est vrai, mais aussi philosophique et sociétal » (Journal du dimanche, 20 octobre 2019). Pas d’inquiétude pour Madelin : pour financer son laboratoire d’idées – think tank pour les élites –, il pourra compter sur ses copains du Grand Capital ; l’argent ne fera pas défaut.
Peu présent dans sa circonscription
Ses anciens électeurs de Redon seront heureux (?) de le voir réapparaître dans les médias. Madelin fut leur député de 1978 à 2007 – parachuté par les giscardiens, il hérite d’une circonscription en or où, à l’époque, on votait à 80 % à droite. En réalité, ce n’est pas certain qu’ils aient conservé un bon souvenir du personnage : méprisant avec le populo, imbuvable avec ses partisans, rarement présent dans la circonscription, indisponible pour ses électeurs. À tel point que, s’il s’était représenté en 2007, il aurait été battu. Mais Madelin est un « pro », il sait lire les sondages ; il est donc parti à temps. « De toute façon, la Bretagne ne l’intéressait plus, comme beaucoup d’autres choses : « Le plaisir que j’ai à figurer sur une photo pour l’inauguration d’une piscine n’est rien au regard de ma liberté, des voyages… » Le voilà donc libre et « heureux « , dit-il de sa nouvelle activité dans les fonds de placement et les investissements financiers. Libre de gagner de l’argent. » (Le Monde, 24 novembre 2006).
Réélu à l’arraché en 2002
Si le journaliste du quotidien dit « de référence » avait creusé la question, il aurait examiné les résultats des législatives de 2002 – la dernière fois que Madelin fut candidat et réélu. « Redon, Alain Madelin à l’arraché », titrait Ouest-France ; le journaliste, Philippe Boissonnat, expliquait ensuite : « Scrutin en forme d’avertissement dimanche soir pour Alain Madelin (UMP) réélu pour la 8ème fois dans la 4ème circonscription, mais avec seulement 725 voix d’avance sur sa concurrente, Monique Pussat-Marsac (PS) » (Ouest-France, Ille-et-Vilaine, lundi 17 juin 2002). « Alain » avait eu chaud, sauvé par les électeurs des petites communes – minoritaires dans la ville de Redon – et par la mauvaise image de la candidate socialiste. Mais il démontra à nouveau qu’il demeurait un champion en matière de communication politique ; son journal électoral faisait figure de modèle du genre (talent et savoir-faire). Mais le bonhomme était devenu impopulaire à force de se moquer de ses électeurs, des ruraux à qui il devait sa carrière.
Avec sa nouvelle activité, Alain Madelin va devoir « ferrailler ». Car « le problème de fond reste le même. Nous vivons une transition, celle de la civilisation industrielle liée aux États-nations vers la civilisation mondiale de la connaissance numérisée. C’est une transition longue et difficile, pleine de bouleversements » (Le Figaro, mardi 12 novembre 2019). Rien à voir avec la ruralité, encore moins avec les préoccupations des habitants de La Chapelle-de-Brain (au nord de Redon), la commune où il possède un manoir.
Bernard Morvan
Crédit photo : Wikipedia (cc)
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