La condamnation des dirigeants nationalistes à presque 100 années de prison cumulées a mis le feu aux poudres en Catalogne. Les nombreuses manifestations, parfois violentes, se poursuivent tandis que les nationalistes catalans sont isolés sur la scène européenne. À moins d’un mois des élections législatives en Espagne.
Catalogne : 51 arrestations mardi soir
La tension est toujours aussi vive en Catalogne depuis l’annonce des peines infligées aux leaders nationalistes lundi 14 octobre. Parmi les neuf condamnés, c’est le dirigeant du parti ERC Oriol Junqueras, avec 13 ans de prison et d’inéligibilité, qui a été le plus lourdement sanctionné.
Depuis, les actions de protestation s’enchaînent à travers la Catalogne et de nombreuses vidéos faisant état de scènes de violences ont circulé, notamment les images du blocage de l’aéroport de Barcelone par près de 10 000 manifestants. Avec 75 blessés à la clé…
Dans la nuit du mardi 15 au mercredi 16 octobre, ce sont cette fois 51 personnes qui ont été arrêtées en Catalogne après des violences lors des manifestations contre la condamnation des dirigeants indépendantistes. Des chiffres rapportés par le gouvernement espagnol. En outre, 125 personnes ont été blessées entre forces de l’ordre et manifestants selon les services d’urgence.
Dans le détail, le ministère de l’Intérieur a indiqué que 29 personnes avaient été arrêtées dans la province de Barcelone, 14 dans celle de Tarragone et 8 dans celle de Lérida.
Dans le centre-ville de Barcelone, où les associations indépendantistes avaient appelé à manifester devant les bâtiments gouvernementaux, de nouveaux heurts ont eu lieu mardi soir sur fond de conteneurs en feu et de charges policières. Mais la capitale catalane n’a pas été la seule à voir déferler la colère des nationalistes catalans : des scènes similaires ont eu lieu à Gérone, Tarragone et Lérida.
Passeig de Gràcia 21:50. Fogueres enceses, manifestants movent tanques, furgonetes de policia. Auxò va per llarg pic.twitter.com/93B1al1d7X
— Oriol Freixenet (@Ofreixenet) October 15, 2019
Manifestation de masse à Barcelone vendredi
Preuve de la colère populaire occasionnée par ces condamnations très dures, ils étaient environ 40 000 manifestants dans les rues de Barcelone pour afficher leur soutien aux dirigeants catalans. Parmi eux, des centaines de militants ont alors affronté les forces de l’ordre. À Gérone, il était question de 9 000 personnes.
Par ailleurs, la ligne à grande vitesse entre Barcelone et la France a été coupée à la suite d’un sabotage. Mercredi 16 octobre, des marches étaient prévues au départ de cinq villes catalanes pour converger vers Barcelone. Les manifestants comptent gagner cette dernière vendredi pour participer à la manifestation de masse qui y est prévue. Ce même jour, une « grève générale » est annoncée dans toute la Catalogne pour protester contre ces peines de prison. Des routes et des voies ferrées sont toujours coupées à l’heure où nous rédigeons ces lignes.
Des dizaines de milliers de manifestants marchent vers Barcelone pour la grande manif de vendredi ! #Catalonia #tsunamidemocractic #Barcelona pic.twitter.com/kbhWM52ZuP
— Cerveaux non disponibles (@CerveauxNon) October 16, 2019
Catalogne : la leçon pour les souverainistes
Compte tenu de la gravité de la situation, le chef du gouvernement espagnol a convoqué d’urgence mercredi les patrons des principaux partis après ces scènes de guérilla urbaine. Mais, face au refus de dialogue de la part de Madrid avec un mouvement catalan qui a, jusqu’à présent, insisté sur son caractère non-violent, ce regain de tension était inévitable au regard de l’acharnement de la justice espagnole sur les organisateurs du référendum.
Privés de tout soutien (hormis des Flamands) sur la scène européenne, les Catalans ne vont devoir compter que sur eux-mêmes. Par ailleurs, l’absence de réaction des dirigeants européens face à la répression ayant frappé les nationalistes catalans permet de constater que l’UE ne se sert pas des euro-régions pour déstabiliser les États et tourne le dos aux revendications des minorités nationales sur le sol européen. Comme en a une nouvelle fois attesté le ministre de l’Europe et des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian, « europhile » revendiqué mais « profondément attaché à l’intégrité de l’Espagne, à son unité ainsi qu’au strict respect de sa légalité constitutionnelle ».
Catalogne : « Nous sommes profondément attachés à l’intégrité de l’Espagne, à son unité ainsi qu’au strict respect de sa légalité constitutionnelle », explique @JY_LeDrian. #DirectAN #QAG pic.twitter.com/wJ7CYKlpdA
— LCP (@LCP) October 15, 2019
De même, hormis le Vlaams Belang, les droites européennes se revendiquant du « courant identitaire » sont restées bien silencieuses sur le cas de la Catalogne depuis les troubles causés par le référendum sur l’indépendance en octobre 2017. Des nationalistes catalans luttant… pour la défense de leur identité justement !
Une prise de position dont d’autres voix ne font pas l’économie :
Catalogne : au XXIe siècle des opposants politiques, dont nombre d’élus, qui n’ont jamais pris les armes ni commis de coup d’État militaire, peuvent être condamnés à des peines de prison ferme, jusqu’à 13 ans. Le silence de l’Europe la condamne. @Mediapart https://t.co/R4qPPrs16n
— Edwy Plenel (@edwyplenel) October 14, 2019
Le verdict qui vient de tomber en Catalogne vient d’apporter la preuve que la démocratie européenne est gravement mise en mal dans l’Espagne d’aujourd’hui.
Communiqué signé par @julienbayou, @sandraregol, @euroecolos, @josebove et @OnestaGerard.https://t.co/q1QXFucfWy— EÉLV (@EELV) October 14, 2019
En définitive, avec des élections législatives espagnoles devant se tenir le 10 novembre prochain, la question catalane revient au centre du jeu. Reste à savoir si les indépendantistes sauront en tirer profit.