Affaire Zemmour montée par des journalistes devenus des procureurs, manifestation contre la GPA et la PMA plusieurs années après l’échec des mobilisations contre le mariage et l’adoption par les couples homosexuels, l’actualité est particulièrement chargée ces dernières semaines. Et parmi les penseurs qui – au même titre qu’un Michel Onfray ou qu’un Alain Finkielkraut – manient le verbe et l’idée avec intelligence, il y a Alain de Benoist, à qui nous avons posé quelques questions sur les dernières grandes questions d’actualité.
Breizh-info.com : Tout d’abord, que pensez-vous de cette nouvelle mobilisation contre la GPA et la PMA ? Est-ce réellement un combat d’avant-garde ? La GPA ne va-t-elle pas paradoxalement prendre les mondialistes à leur propre piège (sélection génétique, préférence raciale…) ?
Alain de Benoist : Je pense malheureusement qu’il s’agit plutôt d’un combat d’arrière-garde. Les pouvoirs publics n’ont pas cédé sur le mariage gay, qui avait mobilisé des foules beaucoup plus considérables, il n’y a aucune raison de penser qu’ils céderont sur la « PMA pour toutes » (d’autant que la majorité des Français y sont plutôt favorables). Je n’ai d’ailleurs toujours pas très bien compris si les opposants sont hostiles à la PMA pour les femmes seules et les couples de lesbiennes, ou s’ils sont hostiles à la PMA tout court.
Le problème de la filiation et de la marchandisation des corps n’en sont pas moins des problèmes bien réels. Mais ce n’est pas la polémique actuelle qui permettra de l’éclairer, tant on y mélange la science, la politique et la religion. Le « piège » que vous évoquez suffit à lui seul à montrer la complexité du sujet. On peut bien tonner contre l’« eugénisme ». Quand des parents pourront choisir entre un embryon de bonne qualité et un embryon porteur de caractéristiques indésirables, il n’y a pas besoin d’être devin pour savoir qu’ils choisiront plutôt le premier.
Breizh-info.com : Avez-vous suivi ce qui s’est passé autour de la « Convention de la droite » ? Là encore, estimez-vous que c’est une droite porteuse d’avenir qui se dessine là ? Il semblerait tout de même qu’elle soit encore assez frileuse notamment sur la question de l’immigration, non ?
Alain de Benoist : Je n’ai pas assisté à la Convention de la droite, mais après avoir lu le texte de Zemmour j’aurais quand même du mal à parler, la concernant, de « frilosité » sur l’immigration ! Sur la Convention elle-même, tout dépend de ce que l’on attend. Elle répond à un besoin réel si l’on est attaché à la culture du débat. Si l’on croit que ce genre d’initiatives va dégager ou révéler un espace politique électoral, on se met en revanche le doigt dans l’œil jusqu’au coude. L’union des droites est une chimère et, dans les conditions présentes, il ne fait pas de doute qu’Emmanuel Macron a toutes chances d’être réélu en 2022. Pour que ce ne soit pas le cas, il faudrait soit une conjoncture exceptionnelle, qu’on ne peut évidemment exclure, soit que surgisse un homme (ou une femme) capable de réunir une majorité sur son nom. Pour l’instant, je n’en vois aucun.
Breizh-info.com : Que vous inspire la figure d’Éric Zemmour ? Et les réactions du système à son encontre ?
Alain de Benoist : Allons tout de suite à l’essentiel. Quel que soit le jugement que l’on peut porter sur les thèses de Zemmour, on ne peut à l’heure actuelle que se solidariser avec lui à un moment où il fait l’objet d’une campagne de diffamation et de diabolisation puissamment organisée par tout ce que l’idéologie dominante compte de chiens de garde désireux de lui couper le micro. Ce qu’on n’a pas assez souligné, c’est que cette campagne se développe avant tout dans les médias. La presse était autrefois censurée, aujourd’hui ce sont les journalistes qui censurent. Il s’agit toujours de museler l’opposition, mais en adoptant le mot d’ordre : « Mort aux confrères ! » La censure s’est elle aussi privatisée. Grande nouveauté, qui devrait donner à réfléchir.
Breizh-info.com : Et la figure de Greta Thunberg, érigée en divinité de l’écologie par les dominants à l’heure actuelle, alors même qu’elle n’évoque jamais la démographie ?
Alain de Benoist : Je trouve sainte Greta-la-Science absolument terrifiante. Michel Onfray a parlé de « cyborg ». On dirait en effet une image de synthèse, une poupée gonflable dépourvue de sexe mais avec des nattes. Voir une handicapée mentale de 16 ans faire la leçon à la tribune de l’ONU à des dizaines de chefs d’État ou de gouvernements pressés de l’applaudir avant d’aller brûler le kérosène de leur avion de retour est proprement terrifiant. Apprendre que l’Université de Mons a décerné le titre de docteur honoris causa à une gamine qui appelle les écoliers à sécher leurs cours (pour « sauver la planète ») donne la mesure du désastre. Une nouvelle version du joueur de flûte de Hameln avec une mongolienne dans le rôle principal !
Greta Thunberg fait en effet l’impasse sur la démographie, mais elle fait aussi et surtout l’impasse sur le capitalisme, ce à quoi elle trahit directement la cause qu’elle prétend défendre. Elle ne fait qu’appeler à la repentance et annoncer la fin du monde, ce qui n’est pas vraiment une nouveauté. Lisez les évangiles : repentez-vous car la fin des temps est proche (Mc 1, 15 ; Mt 4, 17) – ou plus simplement L’étoile mystérieuse, où Philippulus tient le même discours : « Faites pénitence ! La fin des temps est venue ! »
Breizh-info.com : Y a-t-il matière à optimisme dans une société comme la nôtre où il semblerait que l’histoire s’accélère, et pas forcément à l’avantage des Européens ?
Alain de Benoist : Bernanos disait que les optimistes sont des imbéciles heureux, les pessimistes des imbéciles malheureux. La question de savoir si l’on peut (ou s’il faut) être optimiste n’a donc pas à se poser. On fait avec ce qu’on a, avec ce que sont les circonstances. Il faut seulement ne pas analyser les situations en regardant dans le rétroviseur. Si le train de l’histoire s’accélère, raison de plus pour ne pas manquer les aiguillages.
Propos recueillis par YV.
Crédit photo : DR
[cc] Breizh-info.com, 2019, dépêches libres de copie et de diffusion sous réserve de mention et de lien vers la source d’origine – V