Cette semaine, nous poursuivons la découverte de notre patrimoine religieux, et nous vous proposons de découvrir l’abbaye de Bricquebec, près de Cherbourg.
Les 12 frères trappistes y suivent la règle de saint Benoît, « prière et travail ». Ils débutent donc leur journée avec le premier office à 4h15, et s’occupent des tâches quotidiennes (cuisine, ménage, entretien des bâtiments…). Les frères ont aussi la charge de sept abbayes à travers le monde (notamment au Japon), qu’ils soutiennent financièrement et spirituellement. L’abbaye de Bricquebec est aussi réputée pour la production de ses terrines, rillettes, et pâtés. Mais tout d’abord, on vous raconte son histoire…
L’abbaye de Bricquebec : son histoire
Tout commence en 1823, en Normandie. Le père Augustin Onfroy, un ancien moine trappiste devenu curé, souhaite retrouver ses racines et fonder une nouvelle communauté monastique. Ce sera à Bricquebec. Rapidement, 12 frères se présentent à lui. Certes, les moines sont là, mais il reste à construire les bâtiments. Et les moines n’ont aucuns moyens financiers, ni aucune construction sur laquelle se baser. Sans compter le peu de main-d’œuvre, et les nombreuses épidémies de l’époque…
Heureusement, les frères peuvent compter sur la charité monastique : trois moines de l’abbaye du Port-du-Salut (en Mayenne) viennent à la rescousse ! Les habitants aussi se joignent aux travaux ! Tous ensemble, ils défrichent le terrain, assèchent les marécages et posent les fondations de la future abbaye. Ils construisent également deux moulins supplémentaires (pour le pain), ainsi qu’une belle ferme.
Grâce à leurs vaches laitières, les moines produisent du fromage (la « Trappe de Bricquebec », ainsi que de la charcuterie. En octobre 1834, la plupart des bâtiments sont terminés, l’abbaye de Bricquebec est officiellement là.
Des guerres et des difficultés financières…
Mais les vingt années suivantes sont plus compliquées. Tout le beau monde qui a aidé pour la construction de l’abbaye rentre chez lui, et les postulants sont de moins en moins nombreux. La typhoïde emporte également plusieurs moines. Pour couronner le tout, un incendie détruit en 1839 une bonne partie des bâtiments…
Mais les moines tiennent bon, et leurs efforts payent : ils finissent même par atteindre le nombre de 80 moines. Durant les années 1870, ils soignent les blessés de guerres, et fondent deux monastères au Japon. À la fin du XIXe siècle, l’abbaye fait vivre plus de deux cents familles dans la région.
À la Première Guerre mondiale, les moines accueillent plus de 700 soldats pour les soigner, au détriment de leur activité agricole. Au sortir de la guerre, les difficultés financières sont donc importantes. À partir de cette période, le nombre de moines à Bricquebec ne cessera d’ailleurs de diminuer.
Lors de la Seconde Guerre mondiale, les Allemands ne se privent pas de l’abbaye et de ses ressources. En 1943, ils sont jusqu’à 300 soldats sur place, laissant les moines vivre de manière exécrable dans un coin des bâtiments. Cependant, la générosité des moines ne faillit pas. Ils distribuent leurs maigres récoltes aux habitants dans le besoin. Après la guerre, en 1961, les moines sont contraints de vendre leur fromagerie et de céder la marque de leur célèbre fromage, la « Trappe de Bricquebec ».
Une charcuterie artisanale
Heureusement, une bonne nouvelle arrive quelques années plus tard : en 1969, le père Marc, entré dans la communauté dix ans plus tôt, réussit à relancer l’activité agricole de l’abbaye. À l’époque, ce secteur était pourtant délaissé par la plupart des abbayes.
L’idée de produire de la charcuterie et d’élever des porcs lui est « venue comme ça » ! L’abbaye reprend ainsi ses premières activités agricoles du début du XIXe siècle. Mais à part la truie que ses parents avaient eu jadis, le père Marc n’y connaissait pas grand-chose en élevage de porcs. Les frères réussissent à obtenir une quarantaine de truies pour démarrer. L’activité se développe et prospère jusqu’en 1997. Mais cette année-là, ils décident d’arrêter cet élevage qui prenait le pas sur leur vie de prière. Leur porcherie contenait en effet 2 500 porcs.
Depuis cette date, « Les Charcuteries de la Trappe » comme on les appelle, font encore la renommée de l’abbaye de Bricquebec. Mais les moines n’interviennent plus physiquement dans la production. C’est en revanche toujours le père Marc qui, malgré son âge, est encore responsable de la charcuterie. Il veille ainsi à la qualité des produits et à la pérennité économique de l’abbaye.
Plus de 70 000 pâtés sont ainsi produits par an, par une vingtaine d’employés. La spécialité de la maison s’appelle « Le pâté du père Marc », lancé en 1998. Contrairement aux pâtés que l’on trouve habituellement dans le commerce, faits uniquement à base de poitrine de porc, celui-ci possède la particularité d’être fait avec le porc entier.
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