Suite à la disparition de Steve Maia Caniçao au cours de la fête de la Musique le 21 juin dernier à Nantes, à l’intervention policière quai Wilson lors d’une free party autorisée par les pouvoirs publics, aux noyades accidentelles – en lien ou non avec cette free party – puis à la découverte du corps de Steve en juillet dernier, en amont et à l’opposé de l’endroit où il est censé avoir disparu, le gouvernement a demandé un rapport à l’IGA (inspection générale de l’administration). Révélations sur les conclusions de ce rapport, qui devrait paraître d’ici le 15 septembre.
La Ville de Nantes mise en cause
Selon le rapport, l’organisation mise en place par la Ville de Nantes – la free party quai Wilson était tolérée, mais pas sécurisée – sera chargée. Ce qui met en cause la responsabilité – personnelle – de Johanna Rolland (PS), maire de Nantes. En effet, comme nous l’avons décrit peu après la fête, le quai Wilson n’était pas du tout sécurisé, mis à part quelques demi-barrières pas adaptées – elles ont rompu sous la pression de la foule – et l’appel à des secouristes nautiques de Saint-Herblain.
L’argument de la Ville était le suivant : ce quai sert encore – rarement – au port Autonome et des opérations de déchargement peuvent y être menées. Néanmoins l’installation de barrières était évoquée dès 2008 et rien n’empêchait le port autonome ou la Ville de mettre en place des barrières démontables avec une clé carrée ou triangulaire, comme cela se fait pour des barrières ou des plots anti-stationnement aux abords des marchés ou de certaines places.
De fait, que cela soit pour les événements festifs au Hangar à Bananes – dans le périmètre de la fête de la Musique – ou pour le quai Wilson, placé avec hypocrisie en dehors, l’organisation et la sécurisation étaient insuffisantes, comme l’ont reconnu nombre de fêtards et d’employés des établissements du Hangar à Bananes voisins. Drogue et alcool circulaient notamment en toute liberté sur le périmètre de la free party, mal éclairé et non clôturé.
Johanna Rolland est bien consciente de ce qu’elle risque en tant que maire. Le 5 août, elle a fait monter en ligne son adjoint à la sécurité, Gilles Nicolas, longuement interviewé par Presse Océan. Un paravent fragile, qui a maladroitement admis que la Ville avait participé à une réunion de préparation avec la préfecture, et même qu’elle avait dépêché sur le site « deux agents d’accompagnement. Je dis bien deux agents d’accompagnement, et non deux agents de sécurité ». Cette distinction n’aura probablement pas égaré l’IGA ! Les deux agents étaient d’ailleurs des employés de la société Lynx Assistance, prestataire habituel de la ville pour les questions de sécurité. L’activité officielle de Lynx Assistance est spécifiée par son code APE, le 8010Z, réservé aux « activités de sécurité privée ».
Le préfet sur la sellette
Par ailleurs, le rapport devrait mettre en cause le préfet pour l’organisation de l’intervention policière sur le quai Wilson.
La free party devait en effet finir à quatre heures du matin – une heure qui obligeait la police à intervenir pour faire cesser le trouble à l’ordre public – et au silence pour les riverains de Rezé, Chantenay et de l’Ile de Nantes –, trouble provoqué par le dernier DJ qui refusait de couper la musique, puis qui l’a remise devant les policiers. Les conditions de l’intervention – où moins d’une vingtaine de policiers, non équipés, se sont trouvés face à une foule de plusieurs centaines de personnes hostiles, ce qui a conduit à ce que plusieurs policiers soient blessés – posent aussi question.
Dans ces conditions, il se peut que le maintien en place de l’actuel préfet soit fragilisé. D’autant que ses relations avec les maires de Nantes et de Saint-Herblain sont fragilisées, et pas seulement à cause des déclarations véhémentes contre la police que Johanna Rolland aurait proférées dernièrement. La question du squat des migrants près de Beauséjour, sur Saint-Herblain, tend aussi les relations entre le préfet et les deux élus. Le maire de Saint-Herblain, clairement mis en difficulté, l’a accusé dernièrement de laisser pourrir la situation – le squat devrait être expulsable depuis début juin, mais la préfecture a refusé le concours de la force publique – histoire peut-être de compliquer la situation à deux mairies PS.
A noter enfin que l’éventuelle mise en cause des organisateurs du concert, directement responsables de la sécurisation du site, du placement des sound system perpendiculairement au fleuve – plutôt que parallèlement d’habitude – ne concerne pas directement l’IGA. Comme son nom l’indique, celle-ci s’intéresse principalement aux administrations et aux pouvoirs publics.
Louis Moulin
Crédit photo : Breizh-info.com
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