On se souvient du rôle néfaste joué par les black blocs à Notre-Dame-des-Landes : ils étaient haïs par les autres groupes de la ZAD. On les retrouve parfois ici ou là ; ils créent un effet d’entraînement, ils se « défoulent » et s’évanouissent dans la nature une fois le « boulot » terminé. Ils ont pu faire une nouvelle démonstration de leur savoir-faire à Nantes samedi dernier.
Ceux que les journalistes appellent les « black blocs » intriguent. Ils savent se greffer sur une manifestation dont ils ne sont pas les organisateurs et lui donner rapidement un caractère « baston », voire émeutier ; car l’affrontement avec la police constitue leur distraction préférée. Ils arrivent brusquement et disparaissent tout aussi rapidement, une fois leur « combat » terminé. Avec eux, destructions et pillages sont au programme, ce qui a le don de rendre la manifestation impopulaire.
Choquer et apeurer le bon peuple
Bizarrement, comme ils sont « connus des services de police », et nettement identifiés, il serait possible aux forces de l’ordre de les « neutraliser » avant que le cortège ne s’ébranle ; mais on n’en fait rien comme si on voulait laisser le champ libre aux casseurs afin qu’ils puissent discréditer l’objet de la manifestation par leurs excès. En effet, dans la guerre des images qui est la règle en ce XXIe siècle, ce qui compte pour le gouvernement – quel qu’il soit -, c’est de fournir de « belles images » à la télévision – tout particulièrement au JT de 20 heures. Des images qui vont choquer et apeurer le bon peuple ; avec les black blocs en action, on oublie les manifestants pacifiques. Et, comme il y a toujours des élections en perspective, cela peut contribuer à resserrer les rangs d’un électorat âgé autour du parti présidentiel. Aux dernières élections européennes, qu’une fraction notable de l’électorat de droite ait pu voter pour la liste LREM – MoDem (Nathalie Loiseau) ne relève pas du hasard. Effrayés par les Gilets jaunes, ces électeurs, qui avaient du bien à défendre, ont choisi de se rallier à Emmanuel Macron parce que ce dernier avait su mater sèchement ces contestataires appartenant aux classes populaires. Si bien qu’aujourd’hui, LREM fait figure de parti de l’ordre.
Samedi dernier (3 août), à Nantes, on a eu droit à une petite démonstration des activistes en question. L’après-midi, dans un cortège virulent de 1 700 personnes, on compte « environ 350 militants du black bloc » (Journal du Dimanche, 4 août 2019). Rendez-vous en centre-ville à 13 heures. Cortège avec black blocs en tête. Dégradation et vandalisme suivent. À 16h 30, le rassemblement se disperse. Mission accomplie pour les black blocs. Et les cameramen ont ce qu’il faut pour alimenter les chaînes de télé. Ainsi on peut influencer une opinion qui demande de la protection.
Une stratégie de la tension de basse intensité ?
L’essayiste Michel Drac (Voir Macron. 8 scénarios pour un quinquennat, Le Retour aux sources) a sa petite idée sur la question. « Ce qui est très inquiétant, c’est que manifestement, une stratégie de la tension de basse intensité a été déployée depuis six mois. Ritournelle macroniste : le RN est le parti de la peur. (…) On va me traiter de complotiste, mais tant pis : je ne croie pas que les black blocs soit un phénomène entièrement spontané. Attention : je ne dis pas qu’ils sont intégralement contrôlés. Ce que je veux dire, c’est qu’on les laisse faire et que, dans la mesure du possible, on les noyaute pour les influencer.
Qui est ce « on » manipulateur ? Difficile de répondre, car « on » peut être plusieurs acteurs à la fois. Si on prend l’exemple le mieux documenté, l’Italie des années de plomb, « on » était une fraction de l’appareil d’État fonctionnant en réseau initiatique, fraction d’ailleurs composite et liée à plusieurs centrales de renseignement étrangères. Rien ne nous garantit qu’une telle structure de contrôle clandestin n’est pas à la manœuvre en France. » (Éléments, août – septembre 2019).
Question : à qui profite le « crime » lorsque les black blocs sont en opération quelque part ? Réponse : au Système en général et au gouvernement en particulier, tout simplement parce que la « majorité silencieuse » prend peur…
Bernard Morvan
Crédit photo : Wikimedia (cc)
[cc] Breizh-info.com, 2019, dépêches libres de copie et de diffusion sous réserve de mention et de lien vers la source d’origine