Qui voulait la peau de François de Rugy ?

En politique, il faut se méfier de ses amis d’hier et d’aujourd’hui… Les vacheries proviennent toujours de ce côté-là.

Une certitude pour François de Rugy : des « amis » lui en veulent. Au point de tout faire pour avoir sa peau. Et ils ont fini par l’avoir. L’ancien ministre de la Transition écologique et solidaire a de bonnes raisons de s’interroger sur leur identité : une ou plusieurs personnes ? A coup  sûr, si on s’en tient à l’affaire du paiement d’une partie de ses cotisations à EE-LV avec son IRFM (indemnité représentative de frais de mandat), puis la déduction de ces versements de son impôt sur le revenu, bénéficiant ainsi d’une double défiscalisation puisque l’IRFM est déjà exonérée d’impôt sur le revenu, la « gorge profonde » se trouve au cœur du réacteur : cadre d’EELV, ancien suppléant, ancien assistant parlementaire, ancienne secrétaire, « copain » du PS… Bref, quelqu’un qui a des comptes à régler avec le ministre. Son ralliement opportuniste à Macron a forcément déplu à certains.

«  Il a lassé et lâché beaucoup de monde. »

L’analyse de Jérôme Alemany (PS) , conseiller départemental (Nantes 4) est sans appel : «  François de Rugy a toujours eu un parcours très individualiste. Il a lassé et lâché beaucoup de monde. Il a d’ailleurs lâché Nicole Klein [sa directrice de cabinet] comme il avait lâché Éric Fallourd [ancien directeur de cabinet à la présidence de l’Assemblée nationale] : avec rapidité, violence et ingratitude » (Presse Océan, mercredi 17 juillet 2019).

Les malheurs de François de Rugy réjouissent évidemment les socialistes nantais. Titre de Presse Océan : «  Les socialistes nantais rient sous cape ». Et sous-titre : « A moins d’un an des municipales, la tourmente qui a emporté le ministre de l’écologie ravit les élus PS, que les ambitions nantaises de François de Rugy inquiétaient » (mercredi 17 juillet 2019).

Il faut reconnaître que M. de Rugy ne manifestait pas un amour particulier pour l’impôt sur le revenu. «  Rugy n’en a pas payé en 2015, tout simplement. Et ce parce qu’en tant que membre d’EE-LV, il a versé à son parti 1 200 euros par mois pendant tout 2014. Des sommes déductibles à hauteur des deux tiers de l’impôt sur le revenu, ce qui a permis de l’effacer. Le système est discutable peut-être, mais légal assurément » (Libération, mercredi 17 juillet 2019).

 « Pas de tentation d’Ouessant »

Dans un premier temps, de Rugy compte bien rester ministre. Quoi qu’il arrive. A ceux qui pensaient le renvoyer sur son île bretonne où il passe ses vacances, il répond : « Pas de tentation d’Ouessant » (Ouest-France, mardi 16 juillet 2019). Il persiste et signe : « Les tempêtes de la pointe de Bretagne, même en hiver, sont plus faciles à affronter que ça. Il peut y avoir la tentation de dire : « on arrête tout », mais je ne veux pas donner satisfaction à ceux qui veulent faire rouler les têtes dans le caniveau. » (Journal du dimanche, 14 juillet 2019)

Dans un second, une dépêche AFP ( mercredi 17 juillet, 14h35) annonce le départ de François de Rugy du ministère de la Transition écologique. « Accusant Médiapart de s’acharner contre lui en le bombardant de questions, Rugy a craqué nerveusement : il a remis sa démission au Premier ministre, se jugeant « trop affaibli » pour assumer sa mission au service de l’écologie » (Le Canard enchaîné, 17 juillet 2019). Démissionner est, selon M. de Rugy, « un double soulagement ». « Politique d’abord », mais aussi « personnel » ( Presse Océan, jeudi 18 juillet 2019).

Retour à la case départ

Sale coup pour de Rugy puisqu’il va redevenir député de base, avec un salaire moindre (un salaire brut mensuel de 7 183 euros au lieu de 9 940 euros), la disparition d’avantages matériels (logement de fonction, personnel mis à disposition…) et un retour à la case départ en ce qui concerne sa carrière politique. Il avait perdu de vue les permanences, la réception des électeurs qui viennent demander au député un coup de main pour régler un dossier, l’inauguration de la nouvelle maison de retraite, les réunions avec les maires, etc. Pour son plus grand « bonheur », il devra remettre les mains dans le cambouis !

Mauvaise affaire pour « Mounir »

A coup sûr, il n’en avait pas envie. Mais comme il faut bien vivre, avec deux familles à entretenir (Emmanuelle Bouchaud et Séverine Servat)… Autre malheureux dans l’histoire, son suppléant, Mounir Belhamiti, qui n’aura goûté aux joies du Palais-Bourbon que pendant dix mois. Sans oublier la petite entreprise de ce dernier (cinq collaborateurs salariés) qui seront licenciés. Mauvaise affaire pour « Mounir » qui comptait bien terminer peinardement le mandat (mai 2022) avec un salaire auquel ses activités antérieures de militant écolo ne l’avaient pas habitué. Ce sera l’occasion pour lui de faire la connaissance de Pôle emploi, à moins qu’une combine politique ne lui permette de se recaser dans un « machin » quelconque.

« Un jour viendra »…

Les « dénonciateurs » auront donc fait plusieurs victimes. Ces individus sont sans pitié et insensibles à la cause de l’emploi. Peut-être aurons – nous droit à un second round car de Rugy l’a promis par SMS : « un jour viendra » où il s’expliquera et, sans doute, règlera quelques comptes (Presse Océan, jeudi 18 juillet 2019).

Bernard Morvan

Crédit photo : Rémi Jouan/Wikimedia (cc)
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