Suite au drame des Sables-d’Olonne avec le chavirage du canot de la SNSM (Société nationale de sauvetage en mer) le mois dernier, l’unique bateau de sauvetage de l’Île de Sein va être prêté à la station vendéenne. Colère au bout du monde.
SNSM : les Sables-d’Olonne sans canot
La Vendée n’oubliera jamais ce 7 juin 2019. Ayant pris la mer au matin pour porter secours à un pêcheur beaucoup trop téméraire compte tenu des conditions météorologiques (en pleine tempête Miguel), la vedette de la SNSM des Sables-d’Olonne s’est alors retournée au large du port. La suite, tragique, tout le monde la connait : sur les sept sauveteurs bénévoles que comptaient l’embarcation, trois perdront la vie durant le naufrage. Sans oublier le patron-pêcheur du Carerra, qui n’avait donc pas pu être secouru et dont le corps avait été retrouvé la plage des Sables-d’Olonne quelques jours plus tard.
La tragédie avait fait la une de l’actualité pendant plusieurs jours. Une cérémonie en la mémoire des trois sauveteurs et présidée par Emmanuel Macron avait d’ailleurs eu lieu aux Sables-d’Olonne le 13 juin.
Mais depuis ce 7 juin, la station SNSM du port vendéen manquait cruellement de moyens pour partir en mer en cas d’urgence. Car l’autre canot, le Jacques Joly, construit il y a presque trois ans, est confronté à un problème technique qui nécessite une expertise et ne lui permet toujours pas de prendre le large pour intervenir. Dans le même temps, le Patron Jack Morisseau, ancien bateau de la station qui a donc chaviré à la fin du printemps, a été démantelé depuis.
L’Île de Sein en renfort
Pour pallier à ce manque, la SNSM a indiqué, par le biais d’un communiqué, que le canot tout temps de la station de l’île de Sein allait être mis à la disposition des Sables-d’Olonne. Ainsi, le Jacques Joly « devrait pouvoir être remis en service avant le 15 septembre » selon la SNSM. Laquelle, au niveau national, salue un « bel exemple de solidarité maritime ».
Mais ce départ vers la Vendée laisse l’Île de Sein orpheline : les opérations de sauvetage « dans le raz de Sein seront assurées par les stations SNSM d’Audierne et de Molène et les moyens aériens habituels » en attendant le retour de l’unique canot sénan.
Du côté vendéen, on rend hommage à l’esprit de sacrifice de l’île bretonne. À l’instar du sénateur de Vendée Bruno Retailleau : « C’est une excellente nouvelle. La solidarité dont font preuve les Bretons et particulièrement les Senans mérite d’être saluée. Cette mise à disposition permettra d’assurer la sécurité des marins qui croisent au large des Sables. Les autres stations étaient trop éloignées pour assurer une sécurité optimum. Elle permettra aussi aux marins sablais de la SNSM profondément touché par le drame de reprendre la mer. »
Sauf que du côté sénan, les réactions sont beaucoup plus nuancées…
« On n’enlève pas un bateau de sauvetage sur une île ! »
Une solidarité bretonne qui s’est surtout faite sans consultation des principaux intéressés. Pour le maire de Sein Dominque Salvert, la décision d’envoyer le canot aux Sables est « inadmissible ». Et il interroge : « Comment on va faire pour les évacuations sanitaires ? », ajoutant que « les hélicoptères ne peuvent pas toujours venir ».
Prévenant par avance qu’il comptait faire « tout » son possible « pour que le bateau reste là », il fait aussi un rappel de bon sens : « On n’enlève pas un canot de sauvetage sur une île ! ». Même colère de la part de Jacques Fouquet, président de la station SNSM de l’île de sein : « Je vais fermer boutique, je n’ai pas le choix ».
L’homme confie par ailleurs ne pas croire au retour du canot le 15 septembre. Un prêt réellement temporaire ? « C’est un rêve ça. Le bateau ne reviendra pas ». Sans oublier de préciser que c’est en cette période estivale que les besoins sénans en matière de sauvetage sont les plus importants : « Il y a des bateaux dans tous les sens en ce moment. L’été est la saison la plus difficile pour nous ».
Sein : une décision du siège parisien de la SNSM
Précision importante, la colère des Sénans n’est pas destinée à leurs confrères vendéens mais bien au siège parisien de la SNSM. Comme le résume Ambroise Menou, premier adjoint de l’île de Sein et ancien président de la station SNSM : « Nous sommes en plein cauchemar : ils ferment sans hésiter et sans prévenir notre station de sauvetage née en 1865, qui a vu passer tant de membres de nos familles ! Cette décision du siège est honteuse, hallucinante ».
Il ajoute : « Nous sommes bien sûr solidaires de nos collègues des Sables, les victimes faisaient partie du groupe venu sur l’île pour se former au canot de nouvelle génération, mais nous sacrifier ainsi est inacceptable ».
En Bretagne comme en Vendée, les problèmes viennent souvent de Paris…
Crédit photo : Wikimedia Commons (CC/Havang(nl))
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