Nantes Métropole réunit son conseil demain. Pour L’Arbre aux Hérons, cela aurait dû être le grand jour. L’Arbre aux Hérons ? Une structure métallique géante à vocation touristique dans l’esprit des Machines de l’île et conçue comme celles-ci par François Delarozière et Pierre Orefice. Johanna Rolland, présidente de Nantes Métropole, en attendait beaucoup : « L’Arbre aux hérons sera un projet emblématique qui résonnera avec l’imaginaire nantais. Ce sera aussi un levier pour le rayonnement international et l’attractivité de la métropole, avec des retombées touristiques importantes et ce sera bon pour l’emploi. »
Une dépêche de l’AFP reprise par une partie de la presse avait annoncé sa mise en chantier l’an dernier. C’était faux : avant de décider sa construction, Nantes Métropole avait lancé de grandes études de faisabilité – pour partie confiées à François Delarozière et Pierre Orefice eux-mêmes, ce qui en a étonné plus d’un. Leur coût : 4 millions d’euros ! Les études devaient se dérouler en 2017 et 2018, la décision de réaliser le projet devant être prise par le conseil métropolitain au premier semestre 2019.
Un budget très difficile à boucler
Pierre Orefice l’avait lui-même confirmé sur le site web de Nantes Métropole en février dernier : « Nantes Métropole arbitrera en juin pour savoir si l’on ouvre à Pâques 2022 ou en début d’année 2023. » Cette déclaration vient d’être discrètement effacée du site officiel. Seul son fantôme demeure sur le compte Facebook de l’Arbre aux Hérons :
Nantes Métropole vient de publier l’ordre du jour de son conseil du 28 juin. Aucune décision concernant l’Arbre aux Hérons n’y est prévue. Il pourrait cependant en être question marginalement à travers une modification de la délégation de service public des Machines de l’île. Selon Ouest France (26 juin), elle tendrait à affecter au Fonds de dotation de l’Arbre aux Hérons la moitié des recettes de la boutique des Machines de l’île.
Il n’est pas certain qu’une telle disposition soit licite puisque les fonds de dotation ne peuvent recevoir de subvention publique. Et elle ne suffira pas à réunir les financements manquants. En effet, un tiers du budget de la construction doit être apporté par le secteur public, soit près de 12 millions d’euros sur un total de 35 millions. Les 370.000 euros apportés par un financement participatif sur Kickstarter l’an dernier sont loin de faire le compte. La boutique des Machines de l’île réalise près d’un million d’euros de recettes par an. Sur les quatre ans prévus pour la construction, son versement ne s’élèverait encore qu’à 2 millions d’euros au total. Il manquerait donc au moins 9,5 millions d’euros. Nantes Métropole espère les trouver auprès d’entreprises mécènes, mais la collecte stagne à quelques millions d’euros. La perspective d’un changement de majorité aux élections municipales de 2020 refroidit les ardeurs.
De plus, 12 autres millions d’euros doivent venir du secteur public hors Nantes Métropole (Europe, État, région ou département). À cette date, seule la région des Pays de la Loire, pourtant dirigée par la droite, a décidé d’accorder 4 millions d’euros de subvention.
Un site touristique non desservi par le tram ?
Le projet est populaire. Mais Johanna Rolland a pris un engagement formel : pas plus d’un tiers du budget financé par Nantes Métropole. Revenir sur une promesse aussi explicite fragiliserait sa campagne. En revanche, l’absence de financeurs et les faiblesses du projet lui-même (des dizaines d’étais sont désormais prévus pour soutenir des branches pas assez solides) pourraient lui apporter un prétexte pour jeter l’éponge.
Que fera Johanna Rolland ? Un indice : elle a présenté le 7 mai les grandes orientations futures des transports publics nantais. Deux nouvelles lignes de tramway sont prévues pour desservir le futur CHU, qui ouvrira en 2026. Mais rien pour desservir l’Arbre aux Hérons, situé à 1 km de la plus proche station de tramway actuelle, alors que 500.000 visiteurs payants (et au moins autant de spectateurs) sont espérés sur le papier.
Actualisation à 22h00 : Ouest France annonce ce soir que Les Machines de l’île sont visées par une enquête de la police judiciaire. Elle ferait suite aux nombreuses irrégularités constatées par la Chambre régionale des comptes. De quoi pimenter les débats du conseil métropolitain ce vendredi 28 juin.
EF
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