Nous terminons aujourd’hui notre tour des candidatures aux élections européennes avec le Parti animaliste, tant pis pour ceux qui n’ont pas pris le temps, ou pas voulu nous répondre malgré les sollicitations des 34 listes. C’est la vice-présidente, Isabelle Dudouet-Bercegeay, qui nous a répondu.
Breizh-info.com : Qu’est ce le parti animaliste ?
Isabelle Dudouet-Bercegeay : Le Parti animaliste est né en 2016 comme réponse au déni de démocratie qui pèse sur la question animale. En effet, la multiplication des scandales révélés par les associations, et relayés par les médias, a induit une prise de conscience accrue des citoyens sur le sort que notre société réserve aux animaux. Pour autant, les décideurs politiques n’ont pas pris la mesure des attentes de la population, ni de l’urgence d’y répondre.
En 2019, 73 % des Français estiment que la classe politique défend mal les animaux, soit 6 points de plus qu’en 2018. Le Parti animaliste a donc vocation à porter la question animale dans le champ politique. Animé par un désir de justice et de progrès, il promeut l’évolution d’une société repensant la relation entre les animaux et les humains.
Il a fait le choix d’être monothématique afin de visibiliser un électorat pour lequel la question animale est une priorité, et inciter les partis traditionnels à s’en emparer. Transpartisan et indépendant, il rassemble des personnes de différentes sensibilités politiques. La question animale étant une question transversale et universelle, elle réunit des personnes de tous âges, de toutes origines, de toutes catégories socio-professionnelles, des ruraux comme des urbains.
Dix mois après son lancement, le Parti animaliste a obtenu une moyenne de 1,10 % aux élections législatives sur les 142 circonscriptions du territoire métropolitain où il présentait des candidats, malgré des moyens financiers très limités. Ce score a été très remarqué, illustrant la profonde volonté des citoyens de faire entrer la question animale en politique.
Breizh-info.com : Vous vous présentez aux élections européennes, pour quelles raisons ?
Isabelle Dudouet-Bercegeay : L’Europe est un terrain propice pour faire avancer la question animale : limitation des temps de transport, encadrement des règles d’abattage, encadrement des conditions d’élevage des poules pondeuses ou des cochons, encadrement de l’expérimentation animale, la plupart des avancées concernant la protection animale en France proviennent de normes édictées par l’Union européenne. Loin d’être suffisantes, ces règles n’auraient pour autant jamais été adoptées en France sans la contrainte européenne
Face au rôle joué par l’UE dans l’édiction de normes protectrices des animaux, le Parti animaliste présente donc logiquement une liste aux élections européennes de mai 2019. Avec ses partenaires européens, dont un compte d’ores et déjà une députée siégeant à Bruxelles, le Parti animaliste entend s’investir au sein de l’Union européenne pour améliorer sensiblement le sort des animaux.
Breizh-info.com : Comment exister dans une campagne politique réservée aux gros partis ?
Isabelle Dudouet-Bercegeay : Les règles de temps de parole font la part belle aux « gros » partis, et il est donc difficile de se faire connaître, ainsi que de faire connaître notre programme, via les médias traditionnels. Pour autant nous bénéficions d’un réseau de correspondants locaux motivés menant campagne, par des tractages, du collage d’affiches, des réunions publiques, etc.
Nous sommes également soutenus par beaucoup de personnalités : Anouk Aimée, Laurent Baffie, Brigitte Bardot, Christine Berrou, Sophie Darel, Mylène Demongeot, Anny Duperey, Sophie Forte, Robert Hossein, Pascal Légitimus, Claude Lelouch, Virginie Lemoine, Nolwenn Leroy, Raphaël Mezrahi, Laurent Petitguillaume, Firmine Richard, Laura Smet, Stone, Corinne Touzet, Arnaud Tsamere…Nous comptons d’ailleurs trois personnalités parmi les 79 candidats de notre liste : Valérie Perrin-Lelouch, écrivaine, scénariste avec son époux Claude Lelouch, Sylvie Rocard (candidate) docteure en histoire, épouse de Michel Rocard, et Henry-Jean Servat, écrivain, journaliste et chroniqueur TV.
Par ailleurs nous nous appuyons sur nos réseaux sociaux en forte progression (Twitter, Instagram, et Facebook), il est à noter que notre page Facebook est classée 8e page en nombre d’abonnés parmi tous les partis politiques français, et elle connaît la plus forte progression, et de loin, parmi tous les partis politiques.
http://www.politologue.com/
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Breizh-info.com : Quelles sont vos principales propositions ? Si vous avez des personnes élues députés européens, quelles mesures voterez vous ?
Isabelle Dudouet-Bercegeay : Le programme du Parti animaliste des européennes complet est disponible sur son site internet : parti-animaliste.fr/programme, il comporte notamment les mesures suivantes :
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Instaurer un commissaire européen à la protection animale.
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Faire de la protection des animaux une compétence partagée de l’Union européenne.
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Créer un statut juridique européen pour les animaux terrestres et aquatiques avec des règles propres à chaque catégorie (de compagnie, dits de rente, sauvages).
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Réorienter les subventions de l’UE (actuellement en moyenne 50 milliards d’euros par an) du secteur de l’élevage et de la pêche vers l’agriculture végétale et la reconversion des professionnels du secteur.
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Interdire les méthodes d’élevage et d’abattage les plus génératrices de souffrance : mutilations (épointage du bec, castration à vif, amputation de la queue, écornage…), broyage des poussins et des canetons, sélections génétiques causant des souffrances (poulets souche à croissance rapide, etc.), mise à mort sans insensibilisation préalable.
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Limiter à 8 heures maximum le transport des animaux d’élevage et interdire l’exportation d’animaux vivants vers les pays tiers.
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Interdire définitivement les pratiques de pêche les plus destructrices et génératrices de souffrance et veiller à l’interdiction effective de la pêche électrique dès 2021 ; créer également de nouvelles réserves marines dans les eaux territoriales européennes.
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Fixer un objectif de réduction de la consommation de produits animaux (viande, poisson, œufs, lait) de 40% d’ici 2030 par des politiques publiques de santé incitant à modérer la consommation de produits d’origine animale, au regard notamment de ses effets sur les animaux, le climat, l’environnement et la santé.
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Renforcer les normes environnementales afin de réduire les impacts négatifs de l’agriculture sur les animaux sauvages et l’environnement.
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Mettre fin à la protection des traditions culturelles qui impliquent la cruauté envers les animaux, telles que la tauromachie et la production de foie gras.
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Renforcer la lutte contre le trafic international des animaux.
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Soutenir une interdiction européenne de la détention d’animaux dans les cirques et dans les delphinariums.
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Supprimer l’expérimentation animale dans la recherche, les tests et l’enseignement en mettant en place un échéancier avec des objectifs chiffrés.
Breizh-info.com : Quelles mesure vous ne voterez pas ?
Isabelle Dudouet-Bercegeay : Notre programme est monothématique, c’est-à-dire qu’il ne concerne que la question animale. La plupart des sujets de société comme l’emploi, l’environnement, l’économie, la santé, l’éducation, la culture, la sécurité sont susceptibles de concerner la question animale. Par exemple il existe un lien entre les violences aux animaux et celles faites aux humains, l’élevage, quant à lui, a un impact significatif sur l’environnement, le climat et la santé…Toutefois, si aucun lien ne peut être fait avec la question animale, nos députés européens ne pourraient alors se positionner sans excéder le mandat qu’ils ont reçu des électeurs.
Breizh-info.com : Quelle est votre position sur la question du halal et plus globalement de l’abattage rituel ?
Isabelle Dudouet-Bercegeay : Il faut tout d’abord noter que les animaux actuellement tués sans étourdissement préalable (pratique moins coûteuse et rendue légale par l’exception des rituels religieux) peuvent être vendus dans le circuit standard sans que cela ne soit connu du consommateur. Cela a pour conséquence que beaucoup plus d’animaux sont tués de cette façon par rapport à la demande réelle de viande cachère ou halal. De plus, quand bien même il s’agit d’abattage standard, la réglementation obligeant à étourdir les animaux avant l’égorgement souffre de nombreuses exceptions d’application, dénoncées par les associations et également constatées par les contrôles vétérinaires.
Le Parti animaliste souhaite interdire les pratiques les plus génératrices de souffrance parmi lesquelles la mise à mort sans étourdissement préalable, que celle-ci soit pour raison économique ou religieuse. De plus, opposer par principe « abattage religieux » et « étourdissement » en ignorant que l’étourdissement est accepté dans certains pays majoritairement musulmans (comme l’Indonésie ou la Jordanie), ne favorise pas le dialogue et l’évolution vers des règles d’abattage qui rendraient l’étourdissement systématique.
Enfin, les animaux aquatiques, les poussins broyés dans la filière poules pondeuses et les canetons de la filière foie gras sont également abattus sans « insensibilisation » préalable (sans que cela n’ait aucun rapport avec un rituel religieux). Aussi, le Parti animaliste soutient le développement des méthodes d’insensibilisation et de mise à mort des poissons et un élargissement de la réglementation à tous les animaux abattus.
Breizh-info.com : Quel est votre lien, s’il y en a un, avec l’association L214 ?
Isabelle Dudouet-Bercegeay : Le Parti animaliste est indépendant des associations, dont L214. Il reconnaît le travail extraordinaire de celles-ci, qui a permis, et qui continue d’imposer, la question animale dans le débat public. Leur rôle est toutefois différent puisque, en tant que parti politique, le Parti animaliste entend participer au processus législatif et exécutif par l’édiction de normes en ayant au sein des différentes institutions des représentants. Le Parti animaliste est toutefois très attentif aux propositions des associations, dont L214, tendant à améliorer le sort des animaux et peut en être le relais. Par ailleurs, nombre d’adhérents et de sympathisants du Parti animaliste militent également activement au sein d’associations de défense animale.
Breizh-info.com : Quelle est votre position sur la question de l’immigration, centrale dans cette élection ?
Isabelle Dudouet-Bercegeay : Parmi les mesures que nous proposons, nous fixons un objectif de réduction de la consommation de produits animaux (viande, poisson, œufs, lait) de 40% d’ici 2030 par des politiques publiques, ce qui aura obligatoirement un impact très important sur les émissions de gaz à effet anthropiques, puisque l’élevage est responsable de 51% des émissions de gaz à effet de serre (selon le WorldWatchInstitute). Les rejets du méthane par les animaux, la libération du gaz carbonique que stockaient les forêts détruites pour nourrir le bétail et les transports induits par l’élevage contribuent à cette hausse des gaz à effet de serre.
En réduisant ainsi de façon rapide et efficace nos émissions de gaz à effet de serre, nous limiterons le dérèglement climatique, or celui-ci joue un rôle important dans les migrations. Pour que les humains ne soient plus dans la nécessité de migrer, il est donc nécessaire que les pays riches se tournent vers une alimentation moins carnée et plus végétale.
Par ailleurs, le dérèglement climatique pourrait avoir pour conséquence dans l’avenir de faire des Français de futurs migrants, en recherche de terres plus hospitalières. Rendements agricoles en baisse, inondations, incendies, pics de température annoncés à 50 °C en France, sont des perspectives peu réjouissantes, autrement dit, ce n’est plus une question qui se pose, c’est une urgence qui est chaque jour un peu plus posée par l’ensemble des scientifiques. Dans la revue Nature d’octobre 2018, il était proposé une réduction de 90 % de la consommation de viande dans les pays développés. Nous sommes donc pleinement dans les recommandations scientifiques.
Breizh-info.com : Et sur le référendum d’initiative citoyenne ?
Isabelle Dudouet-Bercegeay : Notre programme pour les législatives portait une mesure en ce sens, et notre programme pour les européennes porte également cette mesure, adaptée au contexte européen : Contraindre la Commission européenne à retranscrire dans des textes législatifs les Initiatives Citoyennes Européennes (ICE).
Breizh-info.com : Estimez vous que les Gilets jaunes, canal historique, ont été entendus ?
Isabelle Dudouet-Bercegeay : Cette question sort du champ politique du Parti animaliste, aussi il ne nous est pas possible d’y répondre.
Breizh-info.com : Le mot de la fin pour nos lecteurs ?
Isabelle Dudouet-Bercegeay : Le vote pour le Parti animaliste a pour objet de signaler fermement l’importance que l’électorat accorde à la cause animale, et son souhait qu’elle avance significativement au point de ne pas avoir donné son vote pour d’autres thématiques pourtant importantes également.
Obtenir des députés européens est bien sûr un objectif pour nous. Toutefois, si le seuil des 5 % minimum pour accéder au Parlement européen n’était pas franchi, au regard des faibles moyens financiers dont nous disposons (nous ne pouvons pas financer les professions de foi distribuées dans les boîtes aux lettres par exemple) chaque voix donnée au Parti animaliste comptera, car ce sera une voix de moins pour les autres partis qui se désintéressent de cette cause ou qui ne lui accordent pas la place qu’elle mérite, ce qui constituera un signal fort à leur encontre. Ainsi, en dédaignant la cause animale, alors qu’il y a de fortes attentes, ils perdent des voix, sachant que parfois quelques centièmes peuvent être décisifs (exemple de l’absence de qualification de Lionel Jospin en 2002 au 1er tour des présidentielles qui s’est jouée à 0,6 point).
Propos recueillis par YV
Crédit photos : DR
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