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Affaire Vincent Lambert. Réponse à M. Julien Dir, promoteur de l’euthanasie, par Jean-Michel Carré [L’Agora]

Jean-Michel Carré souhaitait réagir à la tribune de Julien Dir à propos de l’affaire Vincent Lambert et de l’euthanasie, ou du suicide médical assisté. Une tribune avec laquelle, comme d’autres internautes qui nous ont contactés, il n’est pas du tout d’accord. Nous reproduisons son texte ci-dessous.

Tribune libre en réponse à M. Julien Dir, promoteur de l’euthanasie

Vous publiez délibérément une tribune que vous dites vous-même provocatrice pour intervenir « à chaud » sur un évènement qui comporte une lourde signification.

Je vous suggère de prendre en compte dans votre réflexion les observations suivantes.

Vous dites de Vincent Lambert « on ne peut pas dire qu’il soit complètement vivant non plus ». Vous instituez par-là, de votre propre chef, une notion intermédiaire de la vie. Jusqu’ici il était reçu que la seule alternative était d’être mort ou vivant. Le médecin est chargé de dire si une personne est morte ou vivante pour délivrer un permis d’inhumer. Il n’a pas le droit de répondre autre chose que, oui la personne est morte, ou non la personne n’est pas morte. Tout votre propos est donc biaisé par votre axiome de départ qu’il y a une vie qui ne mérite pas d’être vécue. Il n’est donc pas étonnant que votre conclusion soit qu’il faut de l’euthanasie, et même plus fort, du suicide assisté.

À propos de personnes qui ne sont pas complètement vivantes, je vous incite à aller visionner le film Lourdesqui passe actuellement dans les salles. On y voit ribambelle d’infirmes de toutes catégories. À votre avis, que faut-il faire de ces personnes qui ne sont plus, selon vous, complètement vivantes ? Et, d’un autre côté, que faut-il faire des vieux, très vieux, totalement dépendants, dans les maisons de retraites ?

Je m’arrête un instant sur le suicide assisté. Vous paraissez un homme fort, fort en affirmations péremptoires. Auriez-vous besoin, si d’aventure vous en aviez assez de la vie, que la société vienne maternellement vous faire mourir sans douleur et sans que vous vous en aperceviez au lieu de vous jeter sous un train ou du pont de Bénodet par exemple ? Pourquoi recourir à la société ? Manqueriez-vous de courage ?

Mais vous pouvez me dire : je suis fort moi, mais je suis une bonne âme et je pense à tous ceux qui sont faibles et qui veulent mourir mais qui ne le peuvent pas car ils n’osent pas. Alors voudriez-vous vous faire l’auxiliaire des psychiatres et psychanalystes qui entendent à longueur de journée des gens leur dire qu’ils sont las de la vie, ceci pour leur susurrer que vous avez la solution à leur problème, le suicide assisté, la mort douce, en toute quiétude, comme dans le film Soleil Vert?

Vous dites « … soigner coûte que coûte des malades lourds et des blessés irrécupérables ».

Ici monsieur je vous parlerai de mon cas personnel. Fin 2008 je me suis retrouvé en réanimation. Au bout de 4 mois de coma les médecins ont arrêté tout traitement. Ils se sont réunis collectivement, conformément à la loi, et ont indiqué qu’il n’y avait plus rien à faire pour moi sinon attendre que je meure. Ils n’ont pas eu à proposer à mon épouse d’aider par la piqûre qui va bien pour me faire mourir dans la dignité (comme vous dites) car elle a obtenu pour moi un transfert au Val-de-Grâce. Il est à noter que les médecins de l’hôpital breton où j’étais ont refusé le transfert d’hôpital à hôpital au motif que la sécurité sociale n’avait pas à payer un transport de corps et que mon épouse a du affréter un avion d’Europe Assistance. Je suis arrivé chez les militaires avec électroencéphalogramme plat. Eh bien monsieur, 10 ans après ces évènements, je suis là à vous écrire et je ne suis pas dans un fauteuil roulant mais bien vivant et en possession de toutes mes facultés. Avec votre doctrine il est certain que je ne serais pas là pour vous apporter la contradiction. Une vieille mère, une femme, des enfants et petits-enfants auraient été dans le deuil. Mais êtes-vous sensibles au deuil ? Êtes-vous sensible au fait que des personnes aient envie de garder les leurs en vie, tout simplement parce qu’ils les aiment, quel que soit leur état ?

Il serait opportun que vous réfléchissiez sur la notion de dignité que vous mettez en avant pour organiser la mort. Consultez un dictionnaire, lisez, recueillez des témoignages. La vraie dignité ne se réduit pas à pousser dans la veine le produit qui va tuer en douceur.

Vous mettez en avant la législation de la Belgique. Savez-vous monsieur qu’avec cette législation une jeune fille s’est donné la mort pour une peine amoureuse ? Comme je l’ai évoqué plus haut, en viendriez-vous à souhaiter que votre propre compagne, votre propre enfant ou vos propres parents – si vous en avez – soient assistés par la société pour mourir s’il leur arrive d’être déçus de leur vie ?

Votre tribune appellerait bien d’autres remarques. Je m’en abstiendrai pour être le plus court possible. Je veux simplement attirer votre attention sur la profondeur qu’il convient de prendre en compte lorsque l’on traite de sujet de vie et de mort. Je prendrai l’exemple de l’avortement. Il était interdit, il a été autorisé en 1975 comme une exception dans des cas limites. Il est désormais, 45 ans plus tard, un mode de contraception comme un autre et on dénombre quelque 220 000 avortements par an en France. Que je sache c’est bien un être humain que l’on met à la poubelle et nous nous y sommes habitués.

Dans un autre domaine il y a eu le PACS pour satisfaire une revendication des homosexuels. Cela devait fermer la porte au mariage. Et le mariage a eu lieu, et il est question de légaliser la PMA. Puis ensuite la GPA au nom de l’égalité. Nous aurons donc de plus en plus d’enfants sans père ou sans mère.

Si donc nous allons dans le sens que vous proposez, il faut absolument regarder toutes les conséquences que cela comporte. Il ne suffit pas de considérer les avantages que fournit telle solution à nos problèmes. Il faut aussi en étudier les inconvénients et les conséquences.

Il me paraît que dans le type de société que vous promouvez, l’amour est une notion qui paraît devoir être contenue au seul niveau de la sexualité… animale, ou de la convenance momentanée, et non plus au niveau spirituel.

Il est effectivement des personnes qui, comme moi, reçoivent la vie comme un don sacré. Il y en a d’autres comme vous qui ne la considèrent que comme une utilité dans certaines limites. Selon que l’une ou l’autre de ces conceptions opposées triomphera il est clair que le monde de l’humain sera fort différent. Et quant à moi je suis persuadé que le type de monde dont vous faites la promotion sera d’une particulière violence.

Jean-Michel Carré

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Crédit photos : DR
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