Après avoir refusé assez nettement l’initiative contre le mitage par 63,70 %, le peuple suisse est cette fois appelé à se prononcer sur la fiscalité, la retraite, et les armes. Des sujets importants et sérieux dont le sort se décidera donc dans les urnes. Bien plus démocratique qu’un « Grand Débat » qui aboutit à des mesures allant dans le sens de la politique menée par un gouvernement… Oui Monsieur Macron, vous qui êtes totalement opposé au RIC réclamé par les Gilets jaunes et plus largement par le peuple français, vous devriez venir faire un stage chez votre voisin suisse afin de combler vos lacunes flagrantes en démocratie.
Focus sur les deux objets sur lesquels les Suisses devront trancher ce week-end :
Loi fédérale relative à la réforme fiscale et au financement de l’AVS (RFFA)
Sur ce premier objet, deux thèmes sont donc liés : la fiscalité et la retraite. Ce qui est d’ailleurs vivement critiqué par les opposants qui estiment que le fait d’associer impôts et AVS (Assurance-vieillesse et survivants) empêche les citoyens d’exprimer leur volonté de manière fidèle et sûre.
Le parlement et le Conseil fédéral sont favorables au texte. Il est à noter que le camp du non se compose des jeunes UDC, des jeunes socialistes, des Verts, ou encore des petits patrons bernois, soit des gens ayant une vision bien différente du rôle de l’État.
Cette initiative vient du fait que des réformes sont urgentes dans les deux domaines. La fiscalité des entreprises doit être adaptée afin que la Suisse respecte les nouvelles exigences internationales et reste concurrentielle. Par ailleurs, après plus de vingt ans sans réforme majeure, l’AVS doit faire face à une situation financière de plus en plus précaire. Après le rejet de plusieurs projets dans les urnes, un nouveau projet a été élaboré en prenant en considération les arguments qui avaient joué un rôle majeur dans ces décisions négatives du peuple.
En cas de « oui » ce dimanche, voici les principaux changements qui s’appliqueront :
- les entreprises seront toutes fondamentalement aux mêmes règles fiscales, puisque le projet supprime les privilèges fiscaux accordés aux entreprises actives surtout à l’échelle internationale ;
- les cantons et les communes pourront désormais promouvoir et soutenir les entreprises innovatrices, par le biais d’une imposition réduite des bénéfices provenant des brevets et de déductions supplémentaires pouvant être accordées par la recherche et le développement ;
- l’imposition des dividendes sera plus élevée ;
- le taux de cotisation des employeurs et des employés augmenteront chacun de 0,15 point.
Selon les derniers sondages, on se dirige vers un score d’environ 60-40 en faveur du oui.
Mise en œuvre d’une modification de la directive de l’UE sur les armes (Développement de l’acquis de Schengen)
Sujet sensible que celui-ci, qui concerne les armes et le fait de suivre ou non une directive de l’Union européenne. Entre les citoyens qui paniquent dés qu’ils entendent le mot « terrorisme » prononcé, et qui pensent naïvement que l’acceptation des mesures proposées augmentera leur sécurité (bah oui, tout le monde sait que les terroristes achètent leurs kalachnikov chez l’armurier du coin et sont inscrits dans un club de tir…), et ceux qui votent systématiquement « contre » les lois imposées par l’UE (jugeant qu’il s’agit là d’atteintes à leur souveraineté), le fossé est grand.
Voici plusieurs des mesures contre l’utilisation abusive des armes :
- imposer le marquage de tous les éléments essentiels d’armes ;
- exiger des personnes qui en font le commerce qu’elles déclarent à l’office cantonal compétent, par voie électronique, tous les achats et ventes d’armes ou d’éléments d’arme ;
- améliorer l’échange d’informations avec les autres États Schengen ;
- classement des armes semi-automatiques munies d’un chargeur de grande capacité dans la catégorie des armes interdites. Il restera toutefois possible d’acquérir ces armes et de les utiliser pour le tir sportif. Le permis d’acquisition d’armes sera remplacé par une autorisation exceptionnelle. Le droit actuel prévoit déjà un régime d’autorisation exceptionnelle pour les armes entrant dans la catégorie des armes interdites. Ce point est vivement critiqué et mis en doute par les sociétés suisses de tir ;
- les collectionneurs et les musées devront dorénavant indiquer comment ils comptent assurer la conservation des armes semi-automatiques.
Les sondages semblent ne laisser aucune place au suspens pour cette votation, avec deux-tiers pour le oui contre un-tiers pour le non. L’UDC et un grand nombre de tireurs (plus de 130 000 licenciés) semblent bien esseulés. Le choix du PLR d’appeler à voter en faveur de cette directive laissera un goût amer dans la bouche des opposants. Toutefois on se rend de plus en plus compte que ce parti n’a parfois de libéral que le nom.
On constate en tout cas que la Suisse s’aligne de plus en plus sur l’Union européenne, avec la bénédiction des parlementaires, même lorsqu’il s’agit de durcir des lois alors que la situation ne s’y prête pas (le but d’une loi devrait être de corriger un dysfonctionnement… or sur la question des armes, la Suisse fonctionne pourtant bien et les tireurs ou collectionneurs vivent paisiblement leur passion).
Erwan Pennarun
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