Charles Maurras, Légendes de Flandres, L’impasse libérale, Et ils mirent Dieu à la retraite, mais aussi Face au discours intimidant, L’immobilier pour les nuls, ou encore Les entretiens oubliés d’Hitler : voici la sélection littéraire de la semaine.
Mes idées politiques, de Charles Maurras
Charles Maurras (1868-1952) est un homme politique français, journaliste, essayiste et poète. Né en Provence, il s’installe à Paris avec sa famille pour ses études, écrit dans différentes revues littéraires et s’intéresse à la philosophie, puis à la politique. En 1908, il fonde L’Action française, organe du nationalisme intégral, défenseur d’une monarchie traditionnelle, héréditaire, antiparlementaire et décentralisée. En 1938 il est élu à l’Académie française, avant d’en être exclu à la suite de sa condamnation, le 28 janvier 1945, pour haute trahison et intelligence avec l’ennemi, malgré son antigermanisme notoire. Ses idées ont influencé de nombreux penseurs, aussi bien français qu’étrangers, et continuent d’irriguer les différents courants nationalistes et contre-révolutionnaires.
Charles Maurras part du constat que, dès la naissance, nous sommes inégaux et tributaires des autres. L’enfant naît fragile et impuissant, et sa mère prend soin de lui ; voici donc la première société, la première communauté naturelle née d’une inégalité : la famille. Il en est bien d’autres : les corps de métier, mais aussi « des associations religieuses, des confréries de secours mutuel, des sectes philosophiques et littéraires ».
Ainsi, les hommes instinctivement se regroupent : « L’inégalité des valeurs, la diversité des talents sont les complémentaires qui permirent et favorisèrent l’exercice de fonctions de plus en plus riches, de plus en plus puissantes. Cet ordre né de la différence des êtres engendra le succès et le progrès communs. »
Tout en haut de la pyramide sociale, se tient l’État, mais un État qui doit être restreint et contraint par ces communautés, car il faut que l’homme ne soit pas seul face à cette « araignée » qui a « tissé parmi nous une toile immense », et qui fait du pauvre un être soumis, conscient des « protecteurs qu’il faut ménager » et mendiant les « subventions, faveurs, exonérations qu’il faut obtenir et sans lesquelles on ne vit plus ». Adversaire résolu de la démocratie qui « tend à assurer à l’individu des ressources viagères, mais en le rendant tributaire d’organisations capitalistes, extérieures et supérieures à lui et dont l’État est tantôt le gérant, tantôt le président, tantôt le maître absolu », Maurras réclame plus de liberté pour les bonnes volontés et fustige ce « démocratisme » qui mène à l’oligarchie réelle puisque, « de quelque façon qu’on s’y prenne, c’est l’Argent qui fait le pouvoir en démocratie ».
Mes idées politiques – Charles Maurras – Kontre Kulture (à commander ici) – 20 €
Une réédition bien venue, d’un penseur finalement particulièrement méconnu, car pas assez étudié et pas assez lu, et surtout, maudit toute la seconde moitié du XXe siècle.
Face au discours intimidant
Laurent Fidès
« C’est un fait qu’aujourd’hui des donneurs de leçons nous disent ce que nous devons penser, ce en quoi nous devons croire, et surtout ce que nous devons espérer : un monde sans frontières, sans peuples, enfin libéré des vieilles traditions et débarrassé des “identités”, peuplé de “citoyens du monde”. L’idéologie contemporaine, “migratoire”, mondialiste, antiraciste, multiculturaliste, présente comme des “vérités” ce qu’on imaginait être des “positions”, empêche le débat d’idées et fausse la compétition démocratique. Elle stigmatise tout individu qui oserait mettre en doute ce qui apparaît désormais comme un dogme incontestable. Ce discours intimidant n’a pas d’adversaire, ce qui supposerait un combat à armes égales. C’est un discours culpabilisant, qui diabolise voire criminalise toute pensée non conforme, dans le but d’échapper à une argumentation construite et rationnelle. Cette idéologie a son lexique, qui agit sur nos représentations et oriente notre perception du réel. La standardisation du langage façonne nos esprits et perturbe nos manières de voir, de comprendre le monde, de nous comprendre nous-mêmes comme êtres permanents, animés par la sourde volonté de durer, de continuer ce qui a été commencé. La philosophie abstraite, exclusivement axée sur la citoyenneté et les conditions formelles de la démocratie, ne peut s’exonérer de sa responsabilité dans ce processus de désintégration identitaire qui conduit non pas à une culture universelle, mais à l’universelle similitude. »
Laurent Fidès est agrégé de philosophie, ancien élève de l’École Normale Supérieure.
Il s’agit d’un livre, d’une réflexion essentielle, que nous vous recommandons vivement.
Laurent Fidès – Face au discours intimidant – L’Artilleur – 12 €
Légendes de Flandres
Éric Vanneufville
C’est, au fil des siècles, dans la longue et prestigieuse Histoire de Flandre que ces « Légendes » enfoncent leurs racines ; dans ces terres fécondes, dont les habitants ont toujours su tirer le meilleur. C’est là qu’elles puisent leur sève savoureuse. Les plus grands de ce monde, rois, empereurs, saints, nobles, y côtoient les plus humbles, pauvres en biens, riches en malice… ou en naïveté.
À travers un voyage dans le temps du Moyen-Âge le plus mythique jusqu’à nos jours, le lecteur étonné rencontrera saint Éloi convertissant un chef viking, les redoutables géants des Flandres, un Flamand devenu empereur de Constantinople, Charles Quint en buveur de bière et Louis XVI en planteur de pommier, des ivrognes impénitents et des Croisés, un âne « pondeur » de richesses, une tulipe noire, d’improbables saints, un baron cruel, des femmes infidèles ou héroïques.
Des histoires d’amour et de guerre, des mystères et des miracles, des farces et des tragédies, le piment d’un humour plein de verve et de bonhomie ; toute une humanité disparate et complexe, dans un univers où l’on ne sait pas vraiment quand commence le merveilleux et quand s’arrête la réalité, car ceux qui content ces histoires savent bien que, comme dans les célèbres draps que tissaient les drapiers du plat pays, les fils s’entremêlent inextricablement.
Éric Vanneufville est né à Lille en 1950. Enraciné en Flandre, ce docteur en Histoire consacre l’essentiel de son œuvre à son pays qu’il parcourt en tous sens. Il est l’auteur, notamment, d’une Histoire de Flandre chez le même éditeur.
Légendes de Flandres – Éric Vanneufville – Yoran Embanner – 15 €
Au même titre que la Bretagne regorge d’histoires et de légendes, en voici venu des Flandres, par un amoureux de son pays flamand. Un livre à posséder, pour pouvoir raconter et transmettre (et varier), auprès de ses enfants, pour entretenir la solidité de nos racines.
Et ils mirent Dieu à la retraite
Didier Le Fur
Entre le XVIe siècle et le début du XXIe, la place, l’écriture, le statut et la réception de l’histoire n’ont cessé d’évoluer, pour aboutir aux formes que nous lui connaissons aujourd’hui. Didier Le Fur montre ainsi que, après la Renaissance, l’explication du passé et de l’histoire du monde par les églises chrétiennes décline, en même temps que naît l’idéologie du « progrès », qui donnera ensuite naissance à la « science » de l’histoire actuelle. Particulièrement original, porté par un historien capable d’interroger sa pratique comme sa matière, ce formidable texte permet de sortir du débat sclérosant opposant « roman national » et « histoire mondiale », débat dont on peut questionner l’intérêt, puisque les deux notions portent un discours militant et sont francocentrés (malgré l’apparent paradoxe pour la seconde école). Et l’auteur de conclure qu’en réalité l’écriture de l’histoire en France, à l’image de ces deux courants, est toujours largement influencée par l’imaginaire chrétien, ce qu’il serait peut-être intéressant de questionner.
Historien, Didier Le Fur est l’un des meilleurs spécialistes des XVe et XVIe siècles français, sur lesquels il a publié Marignan 1515 et une Nouvelle Histoire de la Renaissance. Auteur de biographies remarquées – Louis XII, Charles VIII, Henri II – son François Ier a été acclamé par la critique, tandis que son livre sur Diane de Poitiers a reçu le Grand Prix de la biographie politique 2017.
Et ils mirent Dieu à la retraite – Didier le Fur – Passés composés – 19 €
L’impasse libérale
Philippe Arondel
Plus que jamais peut-être, on constate au quotidien les effets nocifs d’un libéralisme économique qui, dans ses versions les plus radicales, veut en finir avec la notion de bien commun. Alors que partout est proclamé le droit de l’individu au bonheur, à son plein épanouissement, ce dernier se voit surtout réduit au rang d’« homme-marché », tout à la fois consommateur à conquérir et travailleur exploitable à merci. À ceux qui pourraient penser que catholicisme et capitalisme peuvent faire bon ménage, Philippe Arondel rappelle avec vigueur combien la doctrine sociale de l’Église se livre à une critique sans concession du libéralisme et propose une autre vision de l’économie et du sens de l’homme. Développée notamment par les papes depuis plus d’un siècle, cette pensée sociale s’enracine dans l’idée d’un État indépendant des féodalités économiques, et garant tant du bien commun que de la justice sociale. Face à la crise actuelle du libéralisme liée à la domination de la finance, à une mondialisation mal régulée et à une ubérisation rampante, il est urgent de proposer des analyses critiques nouvelles. Pour que notre économie de liberté ne se transforme pas en société de marché sans finalité humaine.
Philippe Arondel, économiste et philosophe, a travaillé au bureau d’études de la CFTC. Il est actuellement l’une des voix de Fréquence protestante dans l’émission culturelle quotidienne « Midi Magazine ». Il a publié plusieurs ouvrages, dont L’homme-marché (Desclée de Brouwer).
L’impasse libérale – Philippe Arondel – Salvator – 18 €
L’immobilier pour les nuls
Laurence Boccara et Catherine Sabbah
S’il y a bien un sujet sur lequel tout le monde a son mot à dire, c’est l’immobilier ! Pourtant, la question est loin d’être simple : les notions juridiques, fiscales et financières liées à une opération immobilière sont nombreuses et de plus en plus complexes. Des démarches bâclées, un métrage erroné ou un financement mal ficelé suffisent à faire capoter une vente, regretter un achat ou, pire, ruiner un propriétaire. Résultat, le rêve de toute une vie peut virer au cauchemar pour de longues années !
Achat, construction, location, entretien, investissement, fiscalité, logement « vert »… : entièrement mis à jour et augmenté de plusieurs chapitres, ce livre dresse un panorama complet des nombreuses façons de mener une opération immobilière à son terme en franchissant les obstacles qui jalonnent le parcours d’un acheteur, d’un vendeur, d’un bailleur ou d’un locataire. Grâce à des informations claires et précises, il répond à toutes les questions que se posent ceux qui veulent changer de toit… sans se taper la tête contre les murs !
Laurence Boccara, journaliste spécialisée dans l’immobilier et les placements, collabore à différents journaux, comme Les Échos, Le Monde, L’Express et Le Particulier.
Catherine Sabbah, journaliste indépendante, experte en immobilier, en urbanisme et en architecture, a commencé sa carrière à la revue Urbanisme. Ancienne présidente de l’Association des journalistes de l’habitat et de la ville (AJIBAT), collaboratrice de nombreuses publications généralistes ou spécialisées, elle est l’auteur de plusieurs ouvrages.
L’immobilier pour les nuls – Pour les nuls – Boccara, Sabbah – 22,95 €
Les entretiens oubliés d’Hitler
Éric Branca
Depuis son émergence politique, en 1923, jusqu’à la défaite de la France, en 1940, Hitler a utilisé la presse démocratique comme nul autre dictateur ne l’avait fait avant lui. Complétant et souvent corrigeant ses innombrables discours, il accorda des entretiens à des journalistes triés sur le volet afin d’endormir les opinions publiques occidentales sur la réalité de ses desseins et le caractère impitoyable de leur mise en œuvre. Malgré les centaines de milliers de pages consacrées au Führer depuis plus de soixante-dix ans, ces interviews, accordées aux plus grands correspondants américains, britanniques et français de l’époque, n’ont pourtant jamais fait l’objet de la moindre publication, si ce n’est par le biais d’une poignée de citations. Elles sont pourtant essentielles, à la fois par ce qu’elles disent et par ce qu’elles dissimulent.
Les voici publiées pour la première fois. Éric Branca a choisi les seize plus significatives, il les a fidèlement traduites, soigneusement présentées et annotées. Enfin, il a rédigé un important chapitre introductif intitulé « Hitler et la presse étrangère. Histoire d’une fascination » qui en dit long sur l’emprise exercée par le Führer sur les démocraties à partir de son avènement. Une édifiante « pré-histoire » de la Collaboration.
Historien et journaliste, Éric Branca a publié plusieurs ouvrages à succès, dont le très remarqué L’Ami américain. Washington contre de Gaulle (1940-1969) chez Perrin.
Un nouveau témoignage apporté à une période qui fascine toujours autant les Français.
Les entretiens oubliés d’Hitler – Éric Branca – Perrin – 22 €
Crédit photo : DR
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