Prélévement à la source, suppressions de postes : le Trésor public de Nantes appelé à la grève

Pour l’intersyndicale Solidaires finances publiques 44, CGT finances publiques 44, CFDT finances publiques 44 et FO DGFIP, trop c’est trop pour les agents de la Direction Générale des FInances Publiques. Entre les suppressions de postes prévues d’ici 2022 dans les services – déjà amoindris d’un quart depuis 2010 -et la mise en œuvre très difficile du prélévement à la source, rien ne va plus.

Les agents sont appelés à se mettre en grève le 24 janvier et à se rassembler à 8h30 devant l’accueil du site Cambronne à Nantes, et De Gaulle à Saint-Nazaire.

Trésoreries locales : vers un abandon du service public ?

Suite à l’audience auprès du directeur général le 9 janvier, la FO-DGFIP annonce la couleur dans un tract : « il s’agit de répartir autrement les effectifs et de revenir sous une forme nouvelle dans les territoires où nous ne sommes plus […] Pour ceux qui auront cru à la reconquête des territoires abandonnés par la DGFIP ils seront déçus ». En Bretagne, pas moins de 17 trésoreries ont mis la clé sous la porte en 2017.

Cependant, il ne s’agit pas de rouvrir des « immeubles avec des agents en permanence à l’intérieur et le drapeau DGFIP sur le toit », mais d’être présents dans des maisons de service au public, de permanences ponctuelles dans les locaux des collectivités territoriales ou encore d’antennes mobiles.

Un document à destination des directeurs locaux suite à la réunion du 13 décembre a été récupéré par les syndicats et est un peu plus précis : « dans l’esprit du Directeur général, la DGFIP est condamnée aux suppressions d’emploi puisque l’organisation du réseau est ancienne, fruit d’usages qui ne correspondent plus aux besoins, et coûteuse ». Il est surtout question d’une organisation « front office, back office », à raison de 1 à 3 back offices par département dans des villes moyennes.

Résultat, « les visas de dépenses et de recettes, les paiements et les encaissements, seront concentrés sur un nombre réduit de back offices tandis qu’un cadre par EPCI [communauté de communes] se consacrerait à l’expertise et au conseil des élus », les trésoreries hospitalières seraient regroupées dans la limite de 50 équivalents temps pleins à l’échelle du groupement hospitalier de territoire, idem pour les services des impôts aux particuliers (SIP) et aux entreprises (SIE) dans la même limite de 50 ETP et « l’accueil sur rendez-vous deviendrait la règle ». Tant pis pour l’accessibilité du service public.

« A l’horizon 2022 il pourrait ne plus exister de Trésorerie secteur public local que sous la forme que nous connaissons : front/back office en zone rurale / péri-urbaine et agences comptables dans les grandes villes ». Parallèlement évidemment les suppressions d’emplois et de postes continueront.

Dans le Nord, 32 trésoreries et 420 postes sur le carreau d’ici 2022

D’après la CGT-Finances Publiques du Nord, qui a pu mettre la main sur le projet de restructuration d’ici 2022 sur son département, l’attrition serait foudroyante : la DGFIP ne serait plus présente que dans 26 communes au lieu de 62 actuellement, 42 trésoreries, 9 services des impôts des entreprises – qui seraient regroupés dans un seul établissement – 4 services des impôts des particuliers, et 6 services de publicité foncière fermeraient.

Le département compte actuellement 79 trésoreries dont 32 de cinq employés ou moins. Sept back offices seraient créés (Valenciennes, Maubeuge, Dunkerque, Roubaix, Tourcoing, Douai et Cambrai), « 360 agents DGFIP quitteraient Lille, soit le quart des effectifs […] ce schéma permettrait de libérer à Lille des emprises qui pourraient être cédées […] Simultanément les effectifs du département (aujourd’hui de 2900) baisseraient de 420 environ ». Le projet a été adressé au ministre.

S’ajoutent à cela des revendications salariales : 1000 € de « prime Macron » par agent pour la CGT, or la DGFIP n’a abandonné que 200 € pour les 40.000 agents – sur près de 100.000 en tout – en lien avec le prélèvement à la source.

Un prélèvement à la source pas préparé et toujours pas acquis

Sur fond de ces inquiétudes sur les effectifs, le passage au prélèvement à la source, « pas du tout acquis. Quand on voit qu’on a commencé à être formé mi-décembre alors que le prélèvement à la source devait entrer en vigueur le 1er janvier, et que tous les agents ne seront formés que fin mars, il y a de quoi être inquiet », explique un agent.

D’autant que « les applications ne sont pas prêtes, on ne sait pas comment répondre aux questions des usagers, ni avec quels effectifs, il n’y a que les chefs et sous-chefs qui sont au courant, et il y a déjà des tas d’erreurs, mais on nous dit que 90% va bien et si 10% merde ce n’est pas grave. Cependant d’ici mi-février cela va être chaud ».

Un tract de la CGT-Finances publiques 44 revient sur « la mauvaise préparation de la campagne PAS [prélèvement à la source], avec des formateurs formés seulement en novembre, le trop faible nombre de collègues formés à GesPAS (l’appli permettant de gérer le PAS) au jour J […] les multiples dysfonctionnements des applications comme e-contact […] la note de la « campagne PAS » qui organise notamment l’accueil téléphonique n’est sortie que le 28 décembre pour une application au 2 janvier ». Il ne manque pas un bouton de guêtres…

Une plateforme téléphonique a été mise en place dans l’urgence – à Saint-Nazaire après le 4 janvier – pour répondre aux usagers, surchargeant des agents déjà sollicités. Dès le 8 janvier, les agents ont demandé de suspendre leur participation à cette plateforme : « depuis la direction multiplie les formes d’intimidation à l’encontre des collègues du SIP [service impôts particuliers] nantais et brandit des menaces de sanctions pour ceux qui n’assureraient pas leur vacation à la plateforme téléphonique […] Par ailleurs [elle] n’a jusqu’au 11 janvier pas démontré son utilité : peu d’appels et pas que sur le PAS. […] A Colmar dans une situation équivalente la direction locale a suspendu la plateforme téléphonique pour dix jours ».

Cela promet. D’autant que les contribuables ont préféré, plutôt que d’appeler, venir et faire la queue devant des services débordés. « On arrive aujourd’hui à 98% du recouvrement des impôts. On n’y arrivera pas avec le prélèvement à la source », préfère prévenir un agent.

Louis Moulin

Crédit photos : DR
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