Dans un essai choc intitulé « L’Afrique à désintoxiquer », Kakou Ernest Tigori veut liquider quatre-vingts ans de mensonge et, ainsi, libérer l’Afrique et l’Europe occidentale… de l’Union soviétique qui est morte depuis bientôt trente ans. Pour que l’attelage Europe-Afrique retrouve de la vigueur, il importe que les Africains sortent de l’irresponsabilité et de l’infantilisme… et les Européens de la repentance !
Kakou Ernest Tigori a été récompensé du Prix Mandela de littérature 2017 pour son roman Le Souverain noir qui invite ses lecteurs à une réflexion fondamentale sur l’Afrique post-coloniale décadente, productrice de désordre et de misère. A travers ses essais et œuvres romanesques, il invite l’élite africaine à retrouver le sens de la responsabilité.
Fabrice Dutilleul l’a interrogé sur son dernier ouvrage, et ça décoiffe !
Vous traitez dans votre livre de sujets polémiques sur les relations entre l’Afrique et l’Europe : traite négrière, colonisation, néocolonialisme, racisme, immigration massive… Rien de très original ; ce qui l’est davantage, c’est ce que vous en dites pour un Africain : exactement le contraire de ce que le politiquement correct voudrait nous faire croire. Pourquoi ?
Kakou Ernest Tigori : C’est justement parce que je suis africain que je sais que ce politiquement correct concernant l’Afrique est fait de mensonges qui, à bien analyser, dégradent les Africains. Avec un peu de bon sens et d’honnêteté, il est facile de comprendre ce que je dis dans ce livre : dans le conflit est-ouest qui suit la IIe Guerre mondiale, les stratèges communistes falsifient l’histoire de l’Afrique, dans le but, d’une part de manipuler les opinions européennes en vue du rejet du phénomène colonial, et d’autre part de révolter les indigènes des empires coloniaux des États de l’Europe occidentale. L’objectif était d’obtenir « tout de suite » les indépendances dans l’espoir de pouvoir installer en Afrique des « démocraties populaires » à la solde de l’URSS. Le Parti communiste français (PCF) et ses compagnons de route ont beaucoup combattu la France, vous savez ! Ce sont des choses qu’il faut dire avec des preuves pour aider les opinions africaine et européenne d’aujourd’hui à comprendre et à se libérer. Ce livre est ma modeste contribution à cette utile tâche de rétablissement de la vérité.
Vous accusez clairement la gauche et l’extrême gauche – autrefois feu l’URSS – de manipuler les opinions publiques et, finalement, d’être complices des graves problèmes qui font le malheur du continent africain… Expliquez-vous.
Kakou Ernest Tigori : Malheureusement, ce sont les intellectuels de gauche qui donnent le la du politiquement correct en Europe. Les soi-disant intellectuels du monde noir ne sont que des suiveurs… Si on peut s’efforcer pour trouver des circonstances atténuantes aux élites du monde noir des décennies 1940-1950, il est difficile de tolérer l’attitude irréfléchie des prétendus intellectuels africains d’aujourd’hui qui ne se rendent même pas compte qu’ils sont nuisibles par leur souscription à des thèses qui font des Africains de gros enfants irresponsables.
Vous écrivez qu’il y a du racisme en France, comme dans tous les pays du monde, mais certainement moins qu’en Afrique noire ou au Maghreb, et que la France n’est pas raciste… Est-ce qu’une majorité silencieuse d’Africains pense de même ? Ou vos compatriotes sont-ils majoritairement abusés par la propagande mondialiste ?
Kakou Ernest Tigori : Il faut être aveugle ou de mauvaise foi pour ne pas reconnaître que la France et la plupart des États européens sont plus accueillants que les autres parties du monde. En tout état de cause, les Africains sont vraiment mal placés pour se plaindre de racisme en France quand dans leur pays d’origine ils se déchirent par tribalisme. Le tribalisme et le racisme procèdent du même phénomène de la méfiance et du rejet de l’autre. La crise que traverse toujours la Côte d’Ivoire a de forts relents de lutte tribale et ethnique. Au Cameroun, ce sont les Anglophones qui veulent faire sécession. Les exactions perpétrées contre des communautés étrangères ou les expulsions massives d’étrangers sont régulières en Afrique, avec dernier cas en date les misères des étrangers en Afrique du Sud en 2017.
Vous insistez – c’est le sous-titre de votre livre – sur la nécessité de « sortir l’Europe de la repentance et l’Afrique de l’infantilisme »… C’est-à-dire ?
Kakou Ernest Tigori : Comprenez que toutes les absurdités n’ont libre cours que parce que l’Européen n’est plus en mesure de réagir. Depuis 70 ans, on lui a mis dans la tête que son peuple a fait subir à l’Afrique la traite négrière, la colonisation, la spoliation des ressources naturelles et toutes les misères du monde, et qu’à ce titre il doit des réparations à l’Africain. L’Européen, honteux, doit battre sa coulpe !
Mon livre est un livre de combat politique, destiné à libérer l’Européen de ces fausses accusations qui l’emprisonnent dans cette repentance inhibante. Il s’agit aussi pour moi de ramener l’Africain à la raison, au lieu de l’abandon dans le confort de l’irresponsabilité qui lui a été instillée.
En fait, le monde manque cruellement de gouvernance. Avec les évolutions technologiques et les progrès des moyens de communication, on a réussi à faire du globe un village… mais malheureusement sans chef. L’attelage Europe-Afrique a besoin de vrais hommes d’État qui portent des visions adaptées aux circonstances d’aujourd’hui. Mais, tant que les hommes politiques occidentaux, bardés de poncifs erronés, ne se contenteront dans la politique africaine que de rapports personnels avec des potentats locaux, rapports faits de circulation de mallettes d’argent contre protection de régime, l’attelage Europe-Afrique continuera de sombrer.
L’Afrique à désintoxiquer de Kakou Ernest Tigori, Éditions Dualpha, collection « Vérités pour l’Histoire », dirigée par Philippe Randa, 438 pages, 33 euros.
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