Le duel Le Drian/Ferrand démarre sur des chapeaux de roues

Jean-Yves Le Drian veut-il barrer la route de la région Bretagne à Richard Ferrand ? C’est bien ce que semble vouloir le ministre des Affaires étrangères en créant son mouvement dénommé « Les Progressistes bretons »

On sentait bien que Jean-Yves Le Drian mijotait quelque chose lorsqu’à propos des Gilets jaunes, il évoquait « la souffrance qu’il faut entendre, comprendre et respecter (…), ce sentiment selon lequel la transition écologique est payée davantage par certaines catégories sociales ».

Et d’ajouter : « Il peut y avoir des distorsions dans les conséquences de la transition écologique pour certaines personnes, qui le vivent très mal car elles ont toutes les conséquences et pas les avantages » (Europe 1, lundi 19 novembre 2018). En effet, le ministre n’a pas pour habitude de sortir de sa case « affaires étrangères ».

Vendredi 23 novembre. Il annonce la création d’un mouvement dénommé « Les Progressistes bretons ». «  Il veut en faire un large rassemblement de sensibilités politiques allant de la social-démocratie à la démocratie chrétienne, un centre élargi mais pas exclusif. La porte sera ouverte, comme elle le sera aux associations et aux acteurs de la vie économique » (Ouest-France, Bretagne, 24-25 novembre 2018). Il s’agirait d’un laboratoire d’idées au service de la Bretagne.

En politique, rien n’est gratuit et le hasard n’existe pas

En politique, rien n’est gratuit et le hasard n’existe pas. C’est bien ce qu’a compris le journaliste Philippe Créhange : « Même s’il a bien précisé que son mouvement n’était pas voué à former des listes, Le Drian prépare déjà la campagne pour les européennes » (Le Télégramme, lundi 26 novembre 2018).

Effectivement, si Le Drian réussit son opération, à savoir regrouper derrière lui de gros bataillons, il pourra peser sur la constitution de la liste LREM-MoDem pour les européennes. S’il peut affirmer « Je représente la Bretagne », il se trouvera en position de force pour imposer la présence de quelques Bretons tendance « Le Drian » en position éligible sur la liste que concoctera Macron à l’Élysée. L’important étant de pouvoir défendre les intérêts bretons au Parlement européen.

Mais il parait qu’il faut voir plus loin. En direction des futures élections régionales. « Les progressistes bretons ? C’est l’opération de Jean-Yves pour protéger Loïg Chesnais-Girard, qui est sur un équilibre précaire, de l’offensive Richard Ferrand », analyse un « ancien camarade du PS ».

Un bon moyen pour Le Drian de « montrer que c’est toujours lui le patron en Bretagne et pas Ferrand ». Car beaucoup de socialistes bretons sont persuadés que « le président de l’Assemblée nationale, dont les relations avec Jean-Yves Le Drian sont exécrables, ne se contentera pas du perchoir et qu’il se prépare, dans l’ombre, aux régionales de 2021 » (Le Télégramme, lundi 26 novembre 2018).

Difficile pour Le Drian d’admettre que Ferrand devienne le patron de la Bretagne

Même si Le Drian affirme que le « temps des élections est révolu pour lui » (Ouest-France, Bretagne 24-25 novembre 2018), il lui serait difficile d’admettre que Richard Ferrand – un parachuté qui n’a pas la tripe bretonne – puisse devenir le président de la région. D’où une opération officiellement chargée de promouvoir l’« innovation territoriale » (sic), mais qui permet d’avancer à couvert et, à terme, de barrer la route à Ferrand.

N’oublions pas que Le Drian dispose de cartes maîtresses dans son jeu : notoriété et popularité, tandis que Ferrand n’existe pas en dehors de sa circonscription de Carhaix. Autre point fort de Le Drian : il est apprécié aussi bien par les patrons que par la « Bretagne d’en bas ». Autre point faible de Ferrand : ses activités d’agent immobilier aux Mutuelles de Bretagne pourraient l’envoyer faire un tour devant un tribunal.

Pour l’instant, Le Drian et son équipe n’ont pas trouvé le temps d’expliquer ce qu’il fallait entendre par « progressiste ». On peut leur proposer une définition : «  L’idéologie du progrès, par principe, dévalue le passé par rapport au présent (et le présent par rapport à l’avenir). Le passé n’aurait à nous transmettre que des traditions paralysantes et des croyances dépassées. Il serait par nature imparfait, immature et c’est à lui qu’il faudrait s’attacher pour grandir » (Alain de Benoist, Éléments, décembre – janvier 2019).

Bernard Morvan

Illustration : DR
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