Les voyageurs bretons en mal d’exotisme ont une destination toute trouvée : la Pologne. Pour un week-end prolongé, on conseillera Varsovie. Dépaysement total assuré. Notre chroniqueur Yves Lemay s’y est rendu avec une équipe de Breizh-info à l’occasion du centenaire de l’indépendance du pays (11 novembre 1918 – 11 novembre 2018). Chronique partielle et partiale d’un bref séjour dans la capitale polonaise.
Billets d’Air France en poche, départ de Nantes-Atlantique. Cinq heures plus tard, après une courte escale à Roissy Charles de Gaulle, on se retrouve à l’aéroport Frédéric Chopin de Varsovie où nous attend la navette qui nous conduira à notre hôtel, le Polonia Palace, situé au cœur de la capitale. Un conseil au passage : éviter d’acheter des zloty, la monnaie locale, à l’aéroport. Les taux sont prohibitifs…
Une belle ville, entièrement reconstruite après la Seconde Guerre mondiale
Première impression ressentie : contrairement à sa réputation, la capitale polonaise est une belle ville, entièrement reconstruite après la Seconde Guerre mondiale – la ville a en effet été détruite à 95% – à l’atmosphère inimitable.
Une atmosphère inimitable
L’atmosphère, c’est en effet ce qui surprend de prime abord le voyageur venant de France en général, et de Nantes en particulier. Les rues sont propres – des corbeilles sont disposées partout pour recueillir déchets et mégots. La population ? Jeune, souriante, et… polonaise. Dans les rues on croise nombre de jolies filles se promenant bras dessus, bras dessous, sans craindre apparemment d’être importunées. Pas d’ivrognes dans les rues (en Pologne !). Quelques très rares policiers distribuant des contraventions aux véhicules garés sur des emplacements réservés aux handicapés. Pas de patrouilles de militaires en arme. Les seules femmes voilées rencontrées sont des bonnes sœurs – qui portent le « voile catholique », comme dirait l’ineffable Castaner… Dire qu’on se sent en sécurité à Varsovie relève de l’euphémisme. Voilà pour l’atmosphère ressentie de cette capitale européenne.
Des quartiers staliniens à la Voie royale et à la Vieille ville : une architecture disparate…
Que voir à Varsovie ? On l’a dit, détruite presque entièrement pendant la Seconde Guerre mondiale, la ville a été reconstruite, avec ce que cela sous-entend de quartiers à l’architecture disparate : rien de commun, en effet, entre la Vieille Ville et la Voie royale, superbement refaites à l’identique en s’appuyant sur des archives, en particulier les tableaux de Canaletto le Jeune, et les quartiers staliniens dominés par le palais de la Culture et des Sciences haut de 230 mètres, sorte de gratte-ciel new-yorkais des années 1900. Aujourd’hui ce sont de nouveaux gratte-ciel qui s’élèvent un peu partout dans ce quartier, symbole d’une économie en plein essor.
Le Musée national
Une visite s’impose au Musée national, en particulier pour sa galerie de peinture polonaise. L’immense tableau de Jan Matejko, La Bataille de Grunwald (1878), célébrant la victoire de l’armée polonaise sur les chevaliers Teutoniques vaut à lui seul le déplacement. A signaler un tableau de Władysław Ślewiński, Deux Bretonnes avec un panier de pommes (1897), directement inspiré de l’École de Pont-Aven. Actuellement se tient une exposition temporaire consacrée aux œuvres d’art de la période de l’indépendance (1918-1920) qu’il ne faut surtout pas manquer. Superbe.
Deux autres musées retracent l’histoire tragique de Varsovie
Deux autres musées à ne pas manquer retracent l’histoire tragique de Varsovie durant de dernier conflit mondial : le Musée d’histoire des Juifs polonais, ouvert en 2014, est là pour rappeler le massacre systématique de l’importante communauté juive qui résidait à Varsovie avant-guerre. Le Musée de l’Insurrection de Varsovie évoque quant à lui le soulèvement héroïque des résistants polonais contre l’occupant nazi (1er août – 2 octobre 1944). Les troupes soviétiques qui se trouvaient aux portes de la ville dès le 10 septembre ne tentèrent rien pour soutenir le mouvement des insurgés, Staline laissant ses troupes attendre l’écrasement complet du soulèvement et la destruction de la ville avant d’y pénétrer.
Juste à côté du Musée national, le Musée de l’Armée mérite aussi une visite, notamment pour son exceptionnelle collection d’armures. Le souvenir tragique de Katyn, où furent assassinés en 1940 par la police soviétique des milliers de Polonais appartenant à l’élite, est rappelé au visiteur par l’émouvante exposition d’objets découverts sur les lieux. A la veille du 11 novembre, fête de l’indépendance, l’armée avait déployé ses stands dans le parc entourant le musée, pour le plus grand bonheur des enfants qui pouvaient approcher de près armes, véhicules blindés, avions de chasse, etc.
La Voie royale
En empruntant la Voie royale à partir du rond-point Charles de Gaulle, dont la statue rappelle que le jeune capitaine fit partie de la mission militaire chargée de conseiller et de soutenir l’état-major de l’armée polonaise en 1920 lors de la guerre contre les Bolcheviques, on se dirige vers la vieille ville. Proche de l’Université, on remarque l’église Sainte-Croix, très bel édifice baroque devant lequel s’affrontèrent régulièrement les étudiants avec la police communiste.
Situé à côté, on verra le Palais présidentiel – L’Élysée polonais – où veillent derrière les grilles, devant les portes, quatre (!) militaires… No comment. Juste à côté, se tient l’hôtel Bristol, un des palaces de la ville. Vient ensuite l’église des Carmélites, construite au XVIIe siècle, un des rares monuments de Varsovie à avoir échappé à la destruction.
Après le Château royal, construit au XIVe siècle par les ducs de Mazovie et reconstruit à partir de 1971 par les autorités communistes – sa reconstruction s’est achevée dans les années 2000 – on accède dans la Vieille Ville. Reconstruite à l’identique, elle séduira le visiteur par l’harmonie de ses bâtiments colorés, en particulier ceux situés sur la place du Marché, très fréquentée par les Varsoviens et les touristes. Boutiques, galeries d’art et restaurants abondent dans le quartier.
Et la gastronomie dans tout ça ?
Pause déjeuner dans le restaurant U Fukiera, sur la place du marché (Rynek Starego Miasta 27). Installé dans une jolie maison où jadis les Fugger, célèbres banquiers bavarois, vendaient du vin, le resto, créé par Magda Gessler, « papesse de la cuisine polonaise » (dixit le guide Michelin), a accueilli, si l’on en croit les photos, Jacques Chirac, Georges Bush père etc. Beau décor, accueil très pro. Quant à la cuisine, bof… On dira qu’elle n’est pas mauvaise, mais qu’on trouve mieux et moins cher sans la moindre difficulté sur les bords de la Loire. Par contre très belle carte des vins. Un riesling 2017 de Slovaquie élaboré par le grand Egon Muller accompagna sans difficulté le plat de saumon commandé.
Pour en finir avec la question « gastronomie » – question, vous l’aurez compris, ô combien importante pour la rédaction nantaise de Breizh-info – notre bref séjour commença par une belle déception. Munis du précieux Michelin Week-end à Varsovie – nous avons définitivement écarté les guides du Routard dont les pleurnicheries bien-pensantes ont le don de nous irriter – nous avons cherché pendant une heure le restaurant Zgoda dont le guide disait le plus grand bien. Et proposant de la vraie cuisine polonaise en plus ! Sauf que l’établissement a disparu… dans ce quartier en pleine restructuration. Nous nous sommes donc rabattus sur le Borpince, un excellent restaurant hongrois : foie gras frais, fromages et excellent vin du pays : parfait. Nous y retournerons le dernier soir.
Autre expérience gastronomique, très appréciée par les lichous de la bande, le chocolatier Wedel, une institution qui propose, outre des chocolats sous toutes formes, des desserts à se damner dans un cadre magnifique. A ne manque sous aucun prétexte. Comme il ne faut pas rater non plus Lukullus, un pâtissier exceptionnel qui en remontre à bien des pâtissiers français…
Se loger à Varsovie
Pour se loger, les hôtels de qualité ne manquent pas à Varsovie, pour des prix bien inférieurs à ceux pratiqués en France. On l’a dit, nous sommes descendus au Polonia Palace Hotel, qui a l’avantage d’avoir survécu à la guerre, d’être très bien placé dans le centre de la ville, au pied du Palais de la Culture. Chambres vastes, calmes et propres, service impeccable. Notons un petit déjeuner buffet exceptionnel servi dans la salle à manger. Pour les amateurs, une bouteille de mousseux et une de vodka (!) est même à leur disposition. Parfait, on vous dit. Et pour le prix d’un médiocre 2 étoiles parisien…
La Grande marche pour l’indépendance : une foule fière de célébrer son pays, son histoire et ses traditions
Point d’orgue du voyage, la Grande marche pour célébrer l’indépendance de la Pologne, avait d’abord été interdite, avant d’être finalement autorisée. Elle aura rassemblé, le dimanche 11 novembre 2018, 200 000 personnes, qui ont emprunté, dans une atmosphère bon enfant, l’avenue de Jérusalem, la principale artère de Varsovie.
Dès le matin, une forêt de drapeaux rouges et blancs avait envahi les rues du centre de la capitale. Drapeaux, brassards, cocardes : une foule joyeuse et innombrable, de tous âges et de tous milieux, des familles avec des enfants, arborait fièrement les couleurs nationales. Une foule fière de célébrer son pays, son histoire et ses traditions, dans le calme et la bonne humeur. Pas d’incidents, pas de vitrines cassées, pas de voitures brûlées… Un autre monde…
Yves Lemay
Crédit photos : Breizh-info.com
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