En mars, le peuple Suisse s’est prononcé sur le nouveau régime financier (accepté) et la fin de la redevance (refusé); en juin les thèmes portaient sur la monnaie pleine (refusé) et les jeux d’argent (accepté); en septembre les initiatives pour des aliments équitables et la souveraineté alimentaire ont été rejeté tandis que celle sur les voies cyclables a passé largement la rampe.
Pour cette quatrième session de l’année 2018, il est question des vaches, des juges étrangers, et de la surveillance des assurés.
Focus sur ces trois objets sur lesquels les Suisses devront trancher ce week-end :
Initiative populaire « Pour la dignité des animaux de rente agricoles (Initiative pour les vaches à cornes) »
Ll’initiative vise à encourager les agriculteurs à élever des vaches et des chèvres à cornes. Aujourd’hui, 3 vaches sur 4 en sont dépourvues. Cela facilite la stabulation libre, car cela réduit les risques pour les animaux de se blesser. L’écornage est toutefois une pratique controversée (contre-nature et souffrance animale). Comme l’élevage d’animaux à cornes entraîne des coûts plus élevés, les auteurs de l’initiative aimeraient que la Confédération soutienne les agriculteurs concernés afin que le bien-être des animaux soit mieux pris en compte.
Le Conseil fédéral et le Parlement recommandent de voter « non ». Selon eux, l’initiative serait plus nuisible que bénéfique au bien-être des animaux. Une contribution pour l’élevage d’animaux à cornes pourrait aboutir à multiplier la construction d’étables à stabulation entravée. Il est plus facile de détenir ainsi les animaux pourvus de cornes. En plus, les cornes augmentent les risques de blessures.
Les sondages donnent un résultat très serré. L’électorat UDC, Vert, PS et indépendant est plus sensible aux arguments des initiants; tandis que les partisans du PDC et PLR (centre-droite / droite) sont majoritairement contre le texte.
Initiative populaire « Le droit suisse au lieu de juges étrangers (initiative pour l’autodétermination) »
L’initiative pour l’autodétermination propose une nouvelle approche pour les cas de conflits entre la Constitution fédérale et les traités internationaux conclus par la Suisse.L’idée est la suivante : si une initiative populaire acceptée par le peuple est en conflit avec un traité international déjà conclu, la Constitution devra primer (sous réserve des règles impératives du droit international, comme l’interdiction de la torture). Le traité devra quant à lui être renégocié avec les États concernés, voire dénoncé en cas d’échec des négociations. Actuellement, en cas de conflits entre la Constitution et un traité international, une solution, par le biais de procédures démocratiques, est favorisée. Dans la plupart des cas, une modification de loi par le biais d’un référendum facultatif est favorisée.
Le Conseil fédéral et le Parlement recommandent de voter « non ». Selon eux, En menaçant certains traités internationaux, l’initiative fragilise la stabilité et la sécurité du droit et, de ce fait, affaiblit la place économique Suisse et la protection des droits de l’homme.
Le camp du « oui », lancé et porté par l’UDC, souligne quant à lui que la capacité qu’a la Suisse de s’autodéterminer est unique au monde et a apporté prospérité, liberté et sécurité. L’initiative pour l’autodétermination renforce la sécurité du droit, garantit le droit de participation des citoyens et protège la démocratie directe et le succès du modèle suisse.
Le rejet paraît le scénario le plus probable selon les instituts de sondage, avec un « non » qui risque de dépasser les 60%.
Référendum facultatif portant sur la loi fédérale du 16 mars 2018 sur la partie générale du droit des assurances sociales (LPGA) (base légale pour la surveillance des assurés)
Les assurances sociales ont comme objectifs de protéger les citoyens en cas de besoin. Aujourd’hui, leurs prestations sont accordées uniquement sur la base de consultations, de documents et de rapports médicaux. La modification de la loi sur laquelle les Suisses voterons vise à définir de nouvelles règles pour vérifier si une personne a réellement droit à des prestations. La nouveauté de cette loi est l’introduction d’« observations secrètes » pour les cas où il existe des indices concrets de perceptions indues. Au terme de la période d’observation, la personne sera informée et aura la possibilité d’agir en justice. En cas de rejet de la modification, aucune observation ne sera possible.
Le Conseil fédéral et le Parlement recommandent de voter « oui ». Selon eux, les assurances sociales soutiennent de manière ciblée les personnes qui dépendent de leurs prestations. Il peut arriver qu’elles doivent observer secrètement l’assuré pour établir de manière certaine s’il a droit à des prestations. Les articles sur l’observation des assurés fixent les limites nécessaires et protègent les droits des personnes concernées.
Le comité référendaire, opposé à cette loi, insiste sur le fait que les articles sur l’observation des assurés vont trop loin : les assurances reçoivent un chèque en blanc pour la mise en place de surveillances arbitraires, elles sont autorisées à violer massivement la vie privée des assurés et échappent à tout contrôle. Les moyens techniques nécessaires pourront être utilisés quasiment sans restriction.
Tous les sondages donnent le « oui » largement vainqueur. Ce qui n’est pas vraiment surprenant, dans un pays ou la délation est parfois un peu trop présente. Par contre si le même objet avait été soumis en votation, pour surveiller les cadres/chefs d’entreprise de grandes entreprises/multinationales par exemple, il est très probable que le résultat n’aurait pas été aussi tranché… Mais c’est une habitude de préférer se concentrer sur les gens moins aisés, que sur ceux qui monopolisent la grande majorité de la richesse d’un pays.
Erwan Pennarun
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