La réunification de la Bretagne demeure plus que jamais d’actualité. Les dirigeants de l’association « Bretagne réunie s’y emploient en ce moment en faisant valoir le droit de pétition prévu par l’article L. 111-2-16 du Code général des collectivités territoriales. Dans une collectivité territoriale, autre qu’une commune, « un dixième des électeurs peuvent demander à ce que soit inscrite à l’ordre du jour de l’assemblée délibérante de la collectivité l’organisation d’une consultation sur toute affaire relevant de la décision de cette assemblée ».
La Loire-Atlantique, département le plus sensibilisé à la question de la Réunification
Bretagne réunie a choisi la Loire-Atlantique – département le plus sensibilisé à cette question et clé de voûte des Pays de la Loire – pour développer cette opération. Puisqu’à l’élection présidentielle de 2017, le département comptait 993 537 électeurs inscrits, il convient donc aujourd’hui de trouver 100 000 signatures – de dixième – afin de « demander » à Philippe Grosvalet (PS) de bien vouloir inscrire à l’ordre du jour de son assemblée le dossier en question. Or on le sait hostile à la réunification. Autre difficulté : « La décision d’organiser la consultation appartient à l’assemblée délibérante de la collectivité territoriale » (4ème alinéa de l’article L 1112-16). D’où la nécessité de trouver une majorité ; c’est-à-dire 32 conseillers départementaux sur 62. Or ils sont 14 – tous PS et associés – à représenter Nantes ; il sera facile de leur expliquer que la réunification signifie la perte du statut de capitale régionale pour leur ville et qu’ils ne peuvent consentir à ce renoncement. Par conséquent, ils n’ont pas intérêt à soutenir « l’organisation d’une consultation » portant sur la réunification.
Si tout va bien, « l’assemblée délibérante de la collectivité territoriale arrête le principe et les modalités d’organisation de la consultation. Sa délibération indique expressément que cette consultation n’est qu’une demande d’avis » (Article L. 1112-17 du Code général des collectivités territoriales). Ensuite « les électeurs font connaître par oui ou par non s’ils approuvent le projet de délibération ou d’acte qui leur est présenté. Après avoir pris connaissance du résultat de la consultation, l’autorité compétente de la collectivité territoriale arrête sa décision sur l’affaire qui en fait l’objet » (Article L. 1112-20 du C.G.C.T).
« Tout est scanné, enregistré, numéroté. C’est mis en lieu sûr et on ne dira pas où car on craint les barbouzes »
Bretagne réunie travaille donc à la réussite de ce droit de pétition. « On a 82 111 signatures, et elles sont vérifiées », assure Paul Loret, coprésident de l’association. « Tout est scanné, enregistré, numéroté. C’est mis en lieu sûr et on ne dira pas où car on craint les barbouzes » (Le Télégramme, mercredi 10octobre 2018). L’objectif semble presque atteint puisque « jeudi, le compteur affichait 92 077 signatures » (Le Figaro, vendredi 9 novembre 2018).
Le droit de pétition permet aux militants bretons de maintenir vivante la question de la réunification
Mettre en branle le droit de pétition permet aux militants bretons de maintenir vivante la question de la réunification et de montrer qu’ils ne renoncent pas. Mais croire que l’opération actuelle peut déboucher sur de grands résultats relève du rêve. En effet, un résultat positif ne saurait en aucun cas contraindre Philippe Grosvalet à s’engager sur la voie de la réunification. On peut également lui faire confiance pour traîner les pieds afin que la phase préliminaire visant à décider l’organisation de la « consultation » ne soit pas achevée avant le 1er mars 2019. Or le droit d’option prévu par la loi relative à la délimitation des régions (16 janvier 2015) disparaîtra à cette date. L’article L 4122-1-14 du Code général des collectivités territoriales qui fixe les conditions dans lesquelles « un département et deux régions contiguës peuvent demander, par délibération concordantes de leurs assemblées délibérantes, adoptées à la majorité des trois cinquièmes des suffrages exprimés, une modification des limites régionales visant à inclure le département dans le territoire d’une région qui lui est limitrophe » sera enterré. Dans ces conditions, le président Grosvalet aura beau jeu d’expliquer qu’il n’y a pas leu de perdre son temps et son argent à défendre un projet qui ne peut pas déboucher. Et comme « les dépenses liées à l’organisation de la consultation des électeurs constituent une dépense obligatoire de la collectivité qui l’a décidée » (article L 1112-19 du C.G.C.T), les conseillers départementaux de Loire-Atlantique estimeront qu’ils peuvent se passer de cet « avis » devenu sans intérêt. Ils pourront également souligner que les membres du conseil régional des Pays de la Loire n’ont nulle envie de voter la disparition de la collectivité qui les nourrit.
Bernard Morvan
Crédit photo : Breizh-info
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