En 2006 et 2007, le mois de novembre fut marqué par la mort de deux supporters de football sous les balles de policiers. Julien Quemener, 25 ans, tué à Paris par Antoine Granomort, et Gabriele Sandri, 26 ans, assassiné sur une aire d’autoroute italienne par Luigi Spaccarotella. Les deux victimes étaient non armées, mais les décisions de justice furent bien différentes des deux côtés des Alpes.
La mort d’un autre fan du PSG, Yann Lorence, en 2010, a eu d’autres conséquences…
23 novembre 2006 : rappel des faits
Le 23 novembre 2006, des milliers de supporters de l’Hapoël Tel-Aviv avaient gagné les tribunes du Parc des Princes pour un match de Coupe UEFA face au Paris-Saint Germain. Cette ferveur, aussi rare qu’impressionnante, a rapidement débouché sur des provocations et des insultes entre les deux camps, rien de bien inhabituel dans le cadre du football.
Les échauffourées en fin de rencontre, à la sortie du stade, suite à la victoire 4-2 de l’Hapoël, furent évidemment plus condamnables. Elles ne peuvent justifier le manque de discernement qui s’en est suivi de la part des médias, des hommes politiques et de la justice. Ils ont fait immédiatement de Julien, pourtant tué par balles, le « méchant » de l’histoire et donc le coupable idéal.
Hostile aux supporters, et encore plus à ceux issus de la tribune Boulogne qui avait la réputation d’être « d’extrême droite » – tribune dont faisait partie Julien -, la justice française n’a pas estimé nécessaire de condamner Antoine Granomort. Ce policier était pourtant censé rester dans le métro parisien ce soir-là et était par ailleurs connu pour mythomanie. Il a donc été acquitté en 2011. La justice a décidé d’un non-lieu en précisant qu’il avait réagi en légitime défense face « à un mouvement d’ultras ». Entre temps, Antoine Granomort avait été révoqué de la police des transports pour escroquerie.
Julien Quemener, défendu par plusieurs témoins de la scène, y compris un jeune homme blessé par le même coup de feu qui lui fut fatal, n’aura vraisemblablement jamais gain de cause.
Le morceau du groupe de rock identitaire français Hotel Stella en hommage à Julien Quemener
Yann Lorence, assassiné en 2010
Si le décès de Julien a secoué la France du football, c’est après celui d’un autre membre du Kop de Boulogne, Yann Lorence, 37 ans, le 28 février 2010, commis cette fois par des supporters de la Tribune Auteuil, que des mesures drastiques furent décidées.
Le plan Leproux, du nom du président du PSG de l’époque, entra en effet en vigueur quelques mois plus tard, excluant les groupes ultras des deux virages du stade.
Contrairement à la tribune Boulogne dont on évoquait la réputation, la tribune Auteuil était constituée de nombreux supporters « issus des minorités » ou très à gauche sur l’échiquier politique, et donc bien plus appréciés par les instances.
Ce fameux plan Leproux ne fut appliqué qu’un temps seulement puisque le Collectif Ultras Paris (surnommé « CUP »), réminiscence de l’ancien Virage Auteuil, a retrouvé sa place en août 2017 avec le soutien des propriétaires qataris du PSG. Comme le soulignaient nos confrères de Paris Vox, le président du CUP, Romain Mabille, était tout simplement l’un des amis et soutien d’un des assassins présumés de Yann.
Le « Kop of Boulogne », donc, n’existe plus. Le souvenir de Julien comme de Yann a été effacé de l’enceinte parisienne, mais certains des mortels agresseurs de ce dernier ont à nouveau pignon sur rue à Paris.
La justice pour Gabriele Sandri
Un peu moins d’un an après la mort Julien, Gabriele Sandri, supporter d’un autre club diabolisé, la Lazio de Rome, était à son tour mortellement touché par un coup de feu tiré par un policier.
En déplacement en voiture avec ses amis pour aller assister au match entre l’Inter Milan et la Lazio, il fut impliqué dans une rixe avec des fans de la Juventus de Turin croisés sur une aire d’autoroute.
Cet événement est cependant à écarter de l’enquête et de l’analyse des faits car c’est après cette rixe, une fois les jeunes hommes remontés en voiture, que le carabinier Luigi Spaccarotella a tiré, atteignant le cou de sa cible. Immédiatement, des émeutes éclatèrent dans toute l’Italie, faisant fi des rivalités sportives, pour exprimer la colère des supporters face à cette bavure.
Peut-être un peu plus intègre qu’en France, ou disposant simplement de moins d’excuses, la justice italienne a condamné en appel le coupable à neuf ans et quatre mois de prison. Le jugement initial, estimé dérisoire par la famille et les proches du jeune homme, ne le condamnait qu’à une peine de six ans ferme.
En 2016, l’émission Terres de Sport de TV Libertés revenait longuement sur les morts violentes de Julien et Gabriele, ouvrant par ailleurs son micro à Mounir Boujaer, autre victime du policier Antoine Granomort le 23 novembre 2006, mais qui, heureusement, avait pu s’en sortir ce jour-là.
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Crédit photos : DR
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