Nous vous proposons ci-dessous une analyse de Judith Bergman, chroniqueuse, avocate et analyste politique, pour le Gatestone Institute, à propos du pacte mondial sur les migrations, que certains pays, comme la Hongrie, la Bulgarie, l’Autriche, ont annoncé refuser de le signer, ayant vu le danger migratoire qu’il représentait pour l’Europe et ses frontières.
Le think thank Gatestone Institute s’est donné pour mission d’instruire le grand public sur des thèmes que les grands médias échouent à aborder et à mettre en valeur :
- Les Institutions de la démocratie et l’État de droit
- Les droits de l’Homme
- Une économie libérale forte
- Une défense capable d’assurer la paix sur le territoire national et dans le monde libre
- L’indépendance énergétique
- Les menaces qui pèsent sur les libertés individuelles, l’indépendance nationale et la liberté d’expression
États Membres des Nations Unies : Emigrer devient un Droit de l’Homme
Presque tous les États membres de l’ONU signeront, dans le cadre d’une cérémonie officielle qui se tiendra au Maroc, en décembre prochain, un accord de l’ONU qui fait de la migration un droit de l’homme.
Le texte final de l’accord intitulé Pacte mondial pour des migrations sûres, ordonnées et régulières, est officiellement non contraignant mais il « inscrit fermement la migration dans l’agenda mondial. Ce document constituera un point de référence pour les années à venir et induira un réel changement sur le terrain … » a indiqué Jürg Lauber, représentant de la Suisse auprès de l’ONU qui a dirigé les travaux avec son homologue du Mexique.
L’ironie de cette déclaration est que peu de pays ont des critères aussi restrictifs pour l’entrée et le séjour que la Suisse. Quiconque souhaite rester plus de trois mois doit demander un « permis de séjour » et affronter d’autres règles draconiennes. Ainsi, « dans le but de limiter l’immigration en provenance de pays non-membres de l’UE/AELE (Union européenne/association européenne de libre-échange), les autorités suisses limitent strictement le nombre de permis de séjour et de permis de travail accordés aux étrangers. »
Ces permis-de-séjour-difficiles-à-obtenir sont même devenus une source de revenus pour la Suisse qui vend a de « riches étrangers le droit de résider en Suisse ».
L’accord des Nations Unies, au contraire, spécifie :
« Réfugiés et migrants bénéficient des mêmes droits de l’homme universels et des mêmes libertés fondamentales (que les nationaux), droits qui doivent être respectés, protégés et déployés à tout moment. » (Préambule, section 4)
Répétons-le, cet accord ne vise pas les réfugiés qui fuient des persécutions et ont besoin de la protection du droit international. Non, l’accord promeut l’idée radicale que la migration – quelle qu’en soit la raison – doit être encouragée, autorisée et protégée. La quasi-totalité des États membres de l’ONU, à l’exception des États-Unis, de l’Autriche, de l’Australie, de la Croatie, de la Hongrie et peut-être aussi de la République tchèque et de la Pologne, devraient le signer.
L’ONU se défend vigoureusement de faire des migrations un droit de l’homme. « La question de savoir s’il s’agit d’une manière subreptice de promouvoir la « migration comme un droit de l’homme » n’est pas correcte. Cela ne figure pas dans le texte ; il n’y a aucun sinistre projet de ce type », a récemment déclaré Louise Arbour, représentante spéciale des Nations Unies pour les migrations internationales.
L’ONU n’a évidemment aucun intérêt à admettre que l’accord promeut la migration comme un droit de l’homme ; et jusqu’à il y a peu, le débat est demeuré quasi confidentiel. Trop de lumière aurait sans doute compromis l’ensemble du projet. Le texte de l’accord, tel qu’il est décrit ci-dessous, ne laisse toutefois aucun doute : avec la signature de cet accord, la migration deviendra effectivement un droit de l’homme.
L’accord se divise en 23 objectifs qui engagent les signataires. L’objectif numéro trois, par exemple, promeut et encourage les migrations par divers moyens. Les États signataires s’engagent à :
« Lancer et promouvoir un site Web national accessible à tous pour centraliser et mettre à disposition des informations sur les options de migration régulière, telles que les lois et les politiques d’immigration spécifiques à un pays, les exigences de visa, les formalités de candidature, les frais de scolarité et les taux de change, la règlementation des permis de travail, les exigences de qualification professionnelle, l’évaluation des diplômes et leurs équivalences, les possibilités de formation et d’études, ainsi que les coûts et conditions de vie, afin d’aider les migrants dans leur processus de décision. »
En d’autres termes, les États ne s’obligent pas seulement à ouvrir leurs frontières aux migrants du monde entier, ils doivent aussi les informer le plus complètement possible sur le ou les pays où ils pourraient envisager de s’installer.
Le niveau de service destiné à faciliter davantage de migration est également élevé. Les pays sont invités à mettre en place :
« Des points d’information ouverts et accessibles le long des grandes routes migratoires afin de fournir aux migrants un soutien et des conseils adaptés aux enfants et aux spécificités de genre, la possibilité de communiquer avec les représentants consulaires du pays d’origine et des informations pertinentes en matière de droits de l’homme et de libertés fondamentales, de protection et d’assistance appropriées, d’options sur les voies de migration régulière et les possibilités de retour, le tout dans une langue que la personne concernée comprend. »
Une fois les migrants à destination, les pays signataires s’engagent à :
« Fournir aux migrants nouvellement arrivés des informations ciblées, respectueuses des spécificités de genre, adaptées aux enfants, accessibles et complètes, ainsi que des conseils juridiques sur leurs droits et obligations, y compris le respect dû aux lois nationales et locales, l’obtention de permis de travail et de séjour, les ajustements de statut, l’enregistrement auprès des autorités, l’accès à la justice pour déposer des plaintes concernant des violations de leurs droits, ainsi que l’accès aux services de base. »
Les migrants sont, à l’évidence, les citoyens d’un monde nouveau, un monde où tous les pays doivent porter secours et assistance à ceux qui ont choisi de voyager et de séjourner ici ou là pour une raison ou une autre. Les frontières existent peut-être en théorie, mais l’ONU – et presque tous les gouvernements du monde – se sont donnés la consigne de les dissoudre.
L’accord précise également que les pays d’accueil doivent doter les migrants « de tous les moyens susceptibles d’aider à l’intégration et à la cohésion sociale » (objectif 16). Ce qui signifie, entre autres, que les pays d’accueil doivent :
« Promouvoir le respect mutuel des cultures, traditions et coutumes des populations d’accueil aussi bien que des migrants par l’échange et la mise en œuvre les meilleures pratiques en matière de politiques, programmes et activités d’intégration, y compris sur les moyens de promouvoir l’acceptation de la diversité et de faciliter la cohésion et l’inclusion sociales. »
L’idée que toutes les cultures sont égales et doivent être également respectées peut ainsi signifier que les mutilations génitales féminines (MGF) infligées à presque toutes les femmes somaliennes sont une tradition qui doit être « respectée » à Londres et à Paris comme elle l’est à Mogadiscio.
L’accord énumère ensuite les obligations qui incombent aux États pour accueillir chaque migrant. « Des objectifs de politique nationale devront être fixés… concernant l’intégration des migrants dans les sociétés d’accueil, notamment sur le marché du travail, en matière de regroupement familial, d’éducation, de non-discrimination et de santé ». En outre, le pays d’accueil devra faciliter « l’accès à des conditions de travail décentes et à l’emploi pour lequel (le migrant) est le plus qualifié, conformément aux caractéristiques du marché du travail local et à l’offre et la demande de compétences ».
En d’autres termes, les nouveaux arrivants en Europe jouiront des mêmes droits – ou quasi – à l’éducation, au marché du travail et aux soins de santé que les Européens qui ont travaillé dur et payé des impôts un demi-siècle durant pour financer leur système de protection sociale. Bien entendu, toutes ces obligations seront financées par l’impôt prélevé sur les Européens.
Les auteurs de l’accord ne s’attendent évidemment pas à ce que tout se passe bien entre migrants et populations d’accueil. Un accord pour faciliter une migration de masse de l’ensemble de la planète en direction des pays occidentaux (pour l’essentiel, car il n’y a pas de migration en sens inverse) peut en effet être générateur de chocs pour les occidentaux. L’accord spécifie donc clairement qu’aucun désaccord ne sera toléré et que les États signataires s’emploieront à lutter contre les « récits trompeurs générant une perception négative des migrants ».
Pour que cet objectif devienne une réalité, les États signataires s’engagent également à :
« Promouvoir des reportages indépendants, objectifs et de qualité dans les médias et sur Internet, mais aussi à sensibiliser et à informer les professionnels des médias sur les questions migratoires et la terminologie adaptée, en mettant en place des normes éthique pour le reportage et la publicité, et en privant de subventions ou d’aide matérielles tous les médias qui promeuvent systématiquement l’intolérance, la xénophobie, le racisme et d’autres formes de discrimination à l’égard des migrants, le tout dans le plein respect de la liberté des médias. » (Objectif 17)
De l’Orwell sur stéroïdes. Presque tous les États membres de l’ONU vont signer un accord stipulant que les médias en désaccord avec les politiques gouvernementales ne seront plus éligibles aux aides et subventions. Bizarrement, l’accord ajoute noir sur blanc que cet objectif a été conçu « dans le plein respect de la liberté des médias », sans doute parce que cela va mieux en le disant, peu importe que cela soit crédible ou non.
Deuxièmement, les États signataires s’engagent à:
« … éliminer toutes les formes de discrimination ; condamner et contrer les expressions, actes et manifestations de racisme, de discrimination raciale, de violence, de xénophobie et toutes les formes d’intolérance à l’égard des migrants, conformément à la législation internationale sur les droits de l’homme. » (Objectif 17)
De manière bien pratique, l’accord se garde de définir le « racisme » ou la « xénophobie » dans un contexte de migration de masse. Que signifient « toutes les formes d’intolérance » par exemple? Et la critique des politiques migratoires des Nations Unies peut-elle être qualifiée « d’intolérance » ?
À l’origine, tous les États membres de l’ONU, à l’exception des États-Unis, avaient approuvé le texte final de l’accord et semblaient prêts à le signer en décembre. Mais récemment, d’autres États ont annoncé leur retrait.
En juillet, la Hongrie s’est retirée de l’accord. Le ministre hongrois des Affaires étrangères, Peter Szijjarto, a jugé le texte « tout à fait contraire aux intérêts de la sécurité hongroise ». Il a ajouté :
« Ce pacte constitue une menace pour le monde car il est susceptible de mettre en mouvement des millions [de migrants]. Il part du principe que la migration est un phénomène positif et inévitable. Nous considérons que la migration est un processus discutable dont les conséquences peuvent se révéler dramatiques en matière de sécurité. »
En juillet également, l’Australie a annoncé son retrait de l’accord, du moins sous sa forme actuelle. Selon le ministre de l’Intérieur, Peter Dutton :
« Nous n’allons pas signer un accord qui sacrifie quoi que ce soit de notre politique de protection des frontières … Nous n’allons pas abandonner notre souveraineté – je ne laisserai pas des corps non élus décider pour nous, décider pour le peuple australien. »
En novembre, la République Tchèque et la Pologne ont annoncé qu’elles étaient susceptibles de se retirer de l’accord. La présidente croate, Kolinda Grabar-Kitarovic, a déclaré qu’elle ne signerait pas l’accord. Quant au Premier ministre polonais, Mateusz Morawiecki, il a déclaré : « nos principes souverains en matière de sécurité des frontières et de contrôle des flux migratoires demeurent notre priorité ».
Ce mois -ci également, l’Autriche a annoncé son retrait de l’accord. « Certains points du pacte sur les migrations nous paraissent critiquables, notamment la confusion entre recherche de protection et migration de main-d’œuvre », a déclaré le chancelier autrichien Sebastian Kurz.
L’Union européenne a immédiatement critiqué la décision de l’Autriche. « Nous regrettons la décision du gouvernement autrichien. Nous continuons de croire que la migration est un défi mondial qu’il n’est possible de résoudre que par des solutions mondiales et un partage des responsabilités à l’échelle mondiale », a déclaré une porte-parole de la Commission européenne.
Ainsi parle aujourd’hui cette UE qui évoquait il y a peu la nécessité de « juguler »les mouvements migratoires. Si l’on souhaite « juguler » les migrations, à quoi bon signer des accords qui les facilitent et les rendent exponentielles en les transformant en droits de l’homme ?
Judith Bergman, chroniqueuse, avocate et analyste politique, est Distinguished Senior Fellow du Gatestone Institute.
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