Emmanuel Macron devrait écouter Jeanne Emmanuelle Hutin

À peine l’élection d’Emmanuel Macron comme président de la République était-elle annoncée que le regretté François Régis Hutin, à l’époque « président du comité éditorial » d’Ouest France – c’est-à-dire directeur politique -, s’enflammait pour la bonne cause : «  Aujourd’hui, tout est ouvert. Une nouvelle chance est donnée à la France, avec l’élection d’un jeune Président de 39 ans. Elle doit être saisie car la laisser passer nous ferait retrouver l’immobilisme de ces dernières années et nous conduirait à coup sûr à l’échec et au drame que nous avons encore cette fois évité. ».  Par « drame », il entendait évidemment l’élection de Marine Le Pen, « la candidate battue hier ». M. Hutin avait certes de bonnes raisons de se réjouir puisque cette dernière n’avait obtenu, en Bretagne (5), que 24,13% (582 646 voix) des suffrages exprimés, contre 33,94% à l’échelon national.

Emmanuel Macron était de tous les candidats celui qui incarnait le mieux le Système

François Régis Hutin aurait pu utilement compléter son « éditorial » en notant que Emmanuel Macron était de tous les candidats celui qui incarnait le mieux le Système. Avec une carte de visite qui se passait de tout commentaire : énarque, inspecteur général des finances, rapporteur adjoint de la commission « pour la libération de la croissance » (commission Attali) pendant le mandat de Nicolas Sarkozy, associé-gérant chez Rothschild (banque d’affaires), secrétaire général adjoint chargé des affaires économiques à l’Élysée pendant le mandat de François Hollande, ministre de l’Économie  et des Finances de ce dernier… Qui dit mieux ?

Le soir même de son élection (dimanche 7 mai 2017), Emmanuel Macron, dans son discours tenu sur l’esplanade du Louvre, annonçait la couleur : « Je veux avoir un mot pour les Français qui ont voté simplement pour défendre la République face à l’extrémisme. Je sais nos désaccords, je les respecterai mais je resterai fidèle à cet engagement pris : je protégerai la République. ». Dix-huit mois plus tard, on retrouve le même son de cloche, alors que les élections européennes s’annoncent : « L’Europe est face à un risque : celui de se démembrer par la lèpre nationaliste et d’être bousculée par des puissances extérieures ». Comment résister ? « En portant la vigueur démocratique et républicaine », répond le Président au journaliste de Ouest-France qui l’interroge (jeudi 1er novembre 2018). Tout le monde l’aura compris, Emmanuel Macron est entré en campagne. Il « souhaite dessiner un match entre nationalistes et populistes, d’une part, et progressistes d’autre part » (Le Figaro, vendredi 2 novembre 2018).

« Opposer de manière simpliste les progressistes aux nationalistes donnera prise aux anti européens et attisera les divisions. »

Succédant à son père – ancien propriétaire de l’éditorial – Jeanne Emmanuelle Hutin a droit désormais à la « Une ». C’est donc Ouest-France qui s’engage : « Mais aujourd’hui, des vents de division soufflent en Europe. Certains, en France, voudraient transformer les élections européennes en un référendum contre la politique du président de la République (…) Mais opposer de manière simpliste les progressistes aux nationalistes donnera prise aux anti européens et attisera les divisions. » (Ouest-France, 3-4 novembre 2018). Il ne lui reste plus qu’à expliquer cela au Président qui l’écoutera certainement avec le plus grand intérêt. Mais ce dernier a d’autres préoccupations : obtenir que la liste qu’il patronnera aux européennes, arrive en tête. D’où la nécessité de « rassembler » les progressistes de tous poils pour faire barrage à la « lèpre nationaliste ».

Car les temps sont durs pour Emmanuel Macron. 29% des Français approuvent son action (71% désapprouvent), nous indique Ifop – Fiducial (Paris-Match, 31 octobre 2018). 26% des Français lui font confiance (71% ne font pas confiance), annonce Kantar Sofres (Le Figaro magazine, 2 novembre 2018). Voilà pour le côté politique. Mais, en matière de finances, l’ancien locataire de Bercy n’est guère plus brillant : à la fin septembre, le déficit de l’État s’établit à 87,1 milliards d’euros ; en un an, il s’est creusé de 10,8 milliards (Ouest-France, 3 – 4 novembre 2018). Rappelons que le solde général fixé par la loi de finances pour 2018 est de moins 85,673 milliards d’euros. Macron a donc de l’avance ! À coup sûr, Jeanne Emmanuelle Hutin trouvera là matière pour un prochain éditorial.

B.M.

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