Au détour du rapport d’information parlementaire enregistré en février dernier contre les incivilités et les atteintes à la sécurité publique dans les transports en commun de voyageurs, on trouve quelques informations croustillantes.
15 à 20 conducteurs d’autobus sans permis repérés chaque année lors d’accidents de la route
En premier, « de nombreux conducteurs de transports en commun continuent à rouler après avoir perdu leur permis de conduire, sans que leur employeur en soit informé. La disposition de la loi Savary permettant de mettre un terme à cette aberration n’est pas entrée en application ». Et pour cause : « le fichier informatique nécessaire à sa mise en œuvre n’a pas été créé en raison, semble-t-il, de la vive opposition des syndicats ». Qui commande ? Le législateur ? Non, les syndicats. Bienvenue en France !
Résultat « sur les 17 000 conducteurs d’autobus ou d’autocars employés en France, 15 à 20 sont repérés chaque année, généralement à l’occasion d’un accident de la circulation, comme ayant perdu leur permis de conduire sans en avoir informé leur employeur ». Et c’est en partie à cause du racket fiscal sur les routes… de la part des services de l’État : « la multiplication des contrôles de vitesse et les retraits de points qui en découlent contribuent à accroître le phénomène ». Il faut reconnaître aussi que les difficultés constantes de recrutement de chauffeurs par les opérateurs de transports en commun de voyageurs n’arrangent rien.
350 SDF ont élu domicile dans le métro de Paris : un problème majeur pour la sécurité
A Paris, un autre problème se pose : « la présence d’environ 350 personnes sans domicile fixe (SDF) qui y ont élu domicile et qui s’y trouvent en permanence, y compris la nuit lorsque le trafic s’arrête et que les installations sont laissées sous tension et sans surveillance ». Or, « ces personnes ont accès à tous les locaux de sécurité et d’équipement – dont les portes ne résistent pas longtemps – et se déplacent librement. L’alimentation des rails n’étant pas coupée la nuit, les accidents sont fréquents ».
Le problème est aggravé par le « dispositif d’urgence permet aux personnes retenues dans le métro d’ouvrir les grilles pour en sortir. Mais cette possibilité d’ouverture permet aussi de faire entrer, en plein cœur de la nuit et sans aucun contrôle, tout type d’individus. Souvent, le nombre de personnes présentes dans les stations à l’heure de l’ouverture (à 5 heures) est supérieur à celui constaté au moment de la fermeture (à 1 heure). » Or, « la possibilité d’intrusion nocturne pouvant donner lieu à des actions malveillantes, voire de sabotage ».
Postes sensibles : le criblage des personnels encore très insuffisant et trop long
L’article 5 de la loi n° 2016-339 du 22 mars 2016 relative à la prévention et à la lutte contre les incivilités, contre les atteintes à la sécurité publique et contre les actes terroristes dans les transports collectifs de voyageurs permet de vérifier auprès du Service national des enquêtes administratives de sécurité (SNAES) que le personnel affecté à un poste sensible n’est pas en cours de radicalisation religieuse – ces vérifications sont nommées « criblage ».
La loi du 28 février 2017 a complété celle du 22 mars 2016 en obligeant l’employeur à reclasser sur un autre poste l’agent titulaire qui ferait l’objet d’un avis d’incompatibilité, et l’oblige à le licencier pour cause réelle et sérieuse s’il refuse le poste.
En réalité, l’obligation de reclassement est en pratique très difficilement applicable dans la mesure où l’avis d’incompatibilité pointe la dangerosité du salarié, aussi bien à l’égard des usagers que de ses collègues de travail », relève la direction de la RATP. Chez cet opérateur parisien, sur 659 demandes d’enquêtes envoyées au 31 décembre 2017, 309 ont été traitées (47%) dont 20 (6.5%) ont fait l’objet d’un avis d’incompatibilité – le délai de traitement par le SNAES est d’ailleurs jugé très, voire trop long, par les opérateurs de transports en commun de voyageurs.
Par ailleurs, d’autres lacunes sont apparues. La SNCF et la RATP souhaiteraient étendre le « criblage » aux personnels d’entretien, « parfois incités à commettre des actes de sabotage par une certaine propagande malveillante ». Les intérimaires ne sont pas concernés non plus, même s’ils sont amenés à occuper un poste sensible, et quant aux salariés protégés [délégués du personnel, élus syndicaux etc.] la loi ne précise pas comment les licencier s’ils font l’objet d’un avis négatif du SNAES.
Idem pour les filiales, notamment en province : « la RATP fait remarquer qu’elle possède une soixantaine de filiales travaillant dans le secteur des transports, qui embauchent et emploient elles aussi des agents occupant des postes sensibles. En l’état actuel de la législation, la RATP n’a pas la possibilité de demander des enquêtes administratives pour les agents de ses filiales : chaque entité doit saisir séparément l’autorité administrative, ce qui multiplie les points d’entrée et ne facilite pas les procédures. Une centralisation des demandes par la société mère serait de nature à simplifier le processus ».
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