Généralement, lorsque l’on s’intéresse au conseil municipal d’une ville, ce sont les « grosses délibérations » qui sont mises en lumière : dossiers d’urbanismes, vœux politiques, dossiers qui font débat au niveau politique ou social, (grosses) subventions ou annulations de subventions, etc. Une part majeure des « petites » délibérations passe ainsi sous les radars, quand bien même elles révèlent leur lot d’insolites ou de coûts réels pour la collectivité. Ou qu’elles soient représentatives de la situation d’une ville. Ainsi, voilà ce que nous apprennent les « petites délibérations » du conseil municipal de Sain-Nazaire du 29 juin dernier.
La délibération n°29 (page 64 du compte-rendu officiel) alloue 1000 € à neuf élèves de l’association Polytech Solidaire – composée d’étudiants en école d’ingénieurs – pour un déplacement humanitaire au Kenya du 24 juillet au 18 août 2018, « en partenariat avec l’association Fungana [basée à Cergy-Pontoise et présidée par la coureuse Nathalie Favreau] qui intervient dans une école au Kenya pour la mise en place de panneaux photovoltaïques et l’alimentation électrique ». Les étudiants sont censés ramener des dessins d’enfants et des photos pour relater leur expérience, mais aussi « pérenniser une dynamique humanitaire au sein de Polytech ».
Bonnes relations avec les journalistes : la municipalité socialiste prépare l’avenir
Page suivante, dans le cadre des bourses à la mobilité internationale, le conseil municipal de Saint-Nazaire attribue 300 € à « Lucie Rolland, jeune nazairienne étudiant dans une école de journalisme, dans le cadre d’un projet de mobilité internationale au Royaume-Uni du 27 mai au 29 juin 2018 » pour réaliser « un projet itinérant autour du cinéma en Angleterre, Pays de Galles, Écosse et Irlande ». A son retour, l’élève journaliste « procédera à une restitution de son expérience notamment à l’espace jeunesse de Saint-Nazaire, la Source et auprès des publics scolaires de la ville ».
Lucie Rolland proclame sur son site en frontispice « être rigoureuse sur l’information, procurer des émotions ». Et la déontologie ? Issue du lycée Saint-Louis de Saint-Nazaire, la jeune fille a été stagiaire en mars 2016 à l’Echo de la Presqu’île et travaille depuis à Radio Campus Tours, en parallèle de ses études à l’école publique de journalisme de Tours. Si elle revient vivre et travailler au pays, elle sera aussi bien reconnaissante envers la municipalité socialiste nazairienne – comme quoi, être bien traité par les journalistes, c’est simple, il suffit de les subventionner dès leurs études.
Vols sur les horodateurs et agents municipaux agressés
Reléguées dans les profondeurs du PV (pages 142 et suivantes), on trouve d’autres informations qui relèvent du quotidien de la ville. Ainsi, un vol de 302 € a été commis [par qui ? quand ? le PV n’en dit rien] sur les horodateurs de la STRAN. Les élus sont invités à en faire la remise gracieuse pour des raisons comptables, après que la responsabilité du régisseur des recettes ait été dégagée. Plus loin, 20 vélos issus du stock des objets trouvés ont été remis aux Restos du Cœur « pour être ensuite donnés à des personnes démunies », une décision fort louable.
Page 150, un cabinet d’avocat est autorisé le 3 mai 2018 d’ester en justice, pour défendre trois agents agressés dans l’exercice de leurs fonctions par D.R suite à une « agression ». En l’occurrence, en janvier 2018, la discussion des policiers municipaux avec un SDF s’était envenimée lorsque D.R – un autre marginal – l’a traité de « collabo ». L’interpellation a été houleuse, l’intrus était en effet armé d’un couteau et d’un tesson de bouteille. Déjà connus pour violences, il a été condamné à trois mois fermes qu’il purge en Sarthe.
5.2 millions d’euros d’emprunts, et 5 millions d’euros en ligne de trésorerie
Toujours pêle-mêle, on apprend que la ville de Saint-Nazaire passe deux nouveaux emprunts auprès de l’agence France Locale, un de 2 millions d’€ sur 15 ans, au taux de 1.30%, un autre de 200.000 € spécifiquement attribué au budget photovoltaïque, sur la même durée avec le même taux. Page 145 du PV, une ligne de trésorerie de 5 millions d’€ auprès d’Arkea sur 12 mois, avec une commission d’engagement de 4000 € et au taux variable Euribor 3 mois avec une marge de 0.34%. Et un emprunt de 3 millions d’euros auprès de la Banque Postale pour « financer les investissements 2018 », sur 15 ans et 3 mois avec un taux variable – Euribor 3 mois avec une marge de 0.21%, assorti d’une commission d’engagement de 3000 €.
Marchés publics : quand la Ville loue un cheptel de moutons
Autre gisement à trouvailles diverses, les marchés publics (p. 159 ss.). En vrac, une mission d’accompagnement pour « une politique globale et transversale de la nuit à Saint-Nazaire » attribuée au collectif culture Bars-Bars, bien connu à Nantes, pour 23.792, 5 € HT, l’attribution du feu d’artifice du 13 juillet à la SAS Féérie pour un montant compris entre 15 et 40.000 €, ou encore la location d’un cheptel de moutons pour 13.050 € au plesséen Régis Fresneau. La municipalité socialiste ne cherche pas à renouveler les élus de sa majorité, mais a fait appel à la société d’écopâturage Écopâtre qui entretient déjà avec quatre brebis et six agneaux les vertes pelouses de la maison de retraite de Plessé.
Le balisage du parcours piétonnier et commerçant en centre-ville engendre aussi diverses dépenses : 2400 € pour une « mission de conseil en couleurs » à l’architecte coloriste Martine Homburger, 7475 € pour une « mission de conception d’un dispositif de fanions pavillon » aux graphistes rezéens de la SCOP Appelle moi papa – elle réalise depuis 2015 l’identité visuelle de la Cantine du Voyage et a déjà travaillé pour l’ADDRN, agence d’urbanisme de la région de Saint-Nazaire, 18.525 € à la paysagiste en milieu urbain Alice Broilliard pour une « mission de conception artistique et technique de neuf marquages au sol » le long dudit parcours. Soit 28.400 € HT rien qu’en conseil !
Louis-Benoît Greffe
Crédit photo : Pouick44/ Wikimedia (CC)
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