Lorsqu’il était député, Ben de Saint-Renan – « P’tit Ben » était le surnom que l’on donnait au PS à Benoît Hamon – condescendait à sa faire élire par les pauvres et les immigrés de Trappes (78). Une clientèle électorale « bas de gamme » lui procurait mandat et casse-croûte. Mais on peut se considérer « homme de gauche » sans se sentir obligé de pratique la mixité sociale. Le « vivre ensemble », on le laisse à d’autres… C’est ce que faisait Benoît Hamon sans que la chose ait l’air de le déranger : il se faisait élire à Trappes par le petit peuple mais vivait bourgeoisement dans une commune résidentielle (Issy-les-Moulineaux) éloigné géographiquement de sa circonscription. Un bourgeois « de gauche » reste un bourgeois préférant cohabiter les gens de sa classe sociale, plutôt qu’avec les classes populaires. En se comportant ainsi, « Ben » méritait le qualificatif de « pauvrophobe ». Malheureusement pour lui, une marcheuse nommée Nadia Hai – sans doute une habitante des « cités » – a mis fin à ce petit jeu en 2017.
Très mal placé pour dénoncer un « gouvernement pauvrophobe »
Pour toutes ces raisons, « Ben » apparaissait très mal placé pour dénoncer un « gouvernement pauvrophobe » – celui de Macron–Philippe – lequel « n’aime pas les pauvres » et pratique « une forme de racisme social » (Le Figaro, lundi 10 septembre 2018). Certes le bourgeois Emmanuel Macron, énarque, inspecteur des finances, ancien associé-gérant de la banque Rothschild, ancien secrétaire général adjoint chargé des affaires économiques à l’Élysée (mandat François Hollande) n’a nulle envie d’habiter à Trappes…
Aujourd’hui la petite entreprise de « Ben » (Génération.s) n’est pas au mieux de sa forme. Il espérait faire alliance avec les écolos pour les élections européennes de 2019. Raté. Yannick Jadot, qui sera tête de liste EELV à cette compétition, refuse : « L’élection européenne est le seul scrutin où les électeurs votent par conviction. C’est un vote de clarté. Notre priorité est de rassembler les écologistes autour d’une ligne claire, pas de faire de la vieille politique, avec ses accords d’appareils et ses confusions. » (Le Figaro, lundi 20 août 2018). David Cormand, le patron de EELV, se veut plus précis : « Je l’aime bien, Benoît Hamon, il est sympathique, et ses proches aussi qui sont très soudés. Mais nous, nous n’avons pas découvert l’écologie il y a un an. Nous y réfléchissons depuis plus de quarante ans. » (Le Figaro, 30 juin – 1er juillet 2018).
Faire de la question des migrants le cœur de son message politique
Mais Benoît Hamon possède une autre corde à son arc : il « veut faire de la question des migrants le cœur de son message politique » (Le Monde, vendredi 6 juillet 2018). D’où la visite de « Ben » à Cedric Herrou, le très médiatique militant promigrants dont il espère le soutien aux européennes (JDD, 9 septembre 2018). Car notre homme dénonce la politique d’accueil des migrants de la France : « Aujourd’hui Macron a la même politique que le ministre de l’Intérieur fasciste italien » (Public Sénat, mardi 4 septembre 2018).
Voilà un positionnement idéal pour « Ben ». En faisant de l’immigration son fonds de commerce, il pourrait peut-être se refaire une santé. Car, pour l’instant les sondages portant sur les intentions de vote pour les européennes, créditent généreusement sa liste Générations.s de… 3% (Ifop, Paris Match, 6 septembre 2018). Or, d’après le politologue québecois Mathieu Bock-Côté, « les élections européennes de juin 2019 prendront la forme d’un « référendum sur l’immigration » qui pourrait accélérer la recomposition de l’espace politique européen » (Le Figaro, mercredi 5 septembre 2018).
Ayant fait l’expérience de la campagne présidentielle de 2017, Benoît Hamon sait que distribuer tracts et brochures ne donne aucun résultat. Travail souvent vain puisque l’électeur ne lit pas. Il est donc urgent pour « Ben » d’inventer quelque chose pour les européennes. Quelque chose qui frappe les esprits et lui vaudra moult reportages à la radio, à la télé et sur le net. Quelque chose qui enthousiasme les militants qui se sentiront enfin utiles.
Une proposition révolutionnaire : distribuer des échantillons du « nouveau parfum » de Dior, JOY. Avec une photo de « Ben » sur le flacon, le public féminin adorera. À coup sûr « P’tit Ben » ferait un tabac. Or madame Hamon – Gabrielle Guallar – a la chance de travailler chez LVMH ; cadre dirigeant, elle est responsable des affaires publiques, donc lobbyiste. Elle pourrait donc faire bénéficier « Ben » d’un prix de gros pour l’achat de ces échantillons. À coup sûr, Bernard Arnault, PDG de LVMH, trouvera l’idée formidable. Dans les grands groupes, on aime les « créatifs ».
Bernard Morvan
Crédit photo : DR
[cc] Breizh-info.com, 2018, dépêches libres de copie et de diffusion sous réserve de mention et de lien vers la source d’origine